Le défi de réconcilier «deux France»


Francis Pilon
Le président réélu Emmanuel Macron devra réconcilier la France désormais divisée plus que jamais par les électeurs qui ont préféré voter pour Marine Le Pen ou encore s’abstenir plutôt que de le choisir, soutiennent des experts.
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« Le taux d’abstention est de plus de 28 % pour le deuxième tour. C’est un taux très important. Ça exprime quand même une tension chez les électeurs français qui n’ont pas voulu voter Le Pen ou Macron », analyse Jean-Pierre Beaud, professeur titulaire au Département de science politique à l’UQAM.
M. Beaud ajoute aussi que 6,5 % des Français ont refusé hier de choisir un des deux candidats en glissant un bulletin blanc ou nul, soit plus de 3 millions d’électeurs.
« Ça, c’est un événement qui est remarquable, s’exprime-t-il. On parle ici des gens qui se déplacent. Ils font l’effort d’aller voter. On voit qu’ils avaient donc une méfiance envers les deux candidats. »
« Danger pour Macron »
Jean-Pierre Beaud mentionne donc qu’Emmanuel Macron devra réconcilier ces « deux France » et ceux qui se sont abstenus pour éviter des émeutes dans la rue, comme lors de la crise sociale parfois violente des « gilets jaunes ».
« Le danger pour Macron, c’est de penser que tout d’un coup il est très légitime, et d’oublier qu’il y a un bon paquet de Français qui ne sont pas à l’aise avec ce qu’il fait ou avec son style. [...] On peut s’attendre à un mandat très difficile », estime Line Beauchamp, ex-déléguée générale du Québec à Paris.
Selon ces deux experts, le prochain défi de Macron sera surtout aux législatives en juin prochain.
« Dans cette gauche et cette droite divisée, on assiste à la montée des partis les plus extrémistes. On pourrait s’attendre à plus de députés [des partis d’extrêmes gauche et droite], mais néanmoins, l’Assemblée nationale aura une majorité Macron », prédit Line Beauchamp.
– Avec Marie-Pier Roy
CE QU'ILS ONT DIT
« Je suis venu de Rouyn-Noranda pour voter à Montréal. J’ai fait neuf heures de route pour voter blanc. Je n’avais plus aucun espoir parce qu’entre voter pour Macron ou Le Pen, c’est un peu comme choisir entre la peste ou le choléra. »
– Clémence Boivin, Montréal
« La montée de l’extrême droite, ça vient de l’expérience et de la peur des candidats. Les attentats terroristes en France, c’est encore chaud. »
– Pierre-Marie Nicolas, Québec
« Les gens en ont tellement marre de cette alternance gauche-droite qu’ils préfèrent voter dans les extrêmes ou alors faire front et voter Macron. »
– Marie Alibert, Québec
«
Le programme de Le Pen s’est transformé avec les problèmes actuels. Par exemple, avec le pouvoir d’achat qui a été accentué avec la guerre en Ukraine. »
– Maxime Clerc, Québec
«
On revient à la case départ comme il y a cinq ans. Finalement, ça ne change rien, ça va être la même chose. »
– Pierre-Marie Nicolas, Québec
– Propos recueillis par Marie-Pier Roy et Francis Pilon