Le chemin de croix de Anglade

Rémi Nadeau
Depuis qu’elle est devenue cheffe du PLQ le 11 mai 2020, le parcours de Dominique Anglade a été parsemé de revers de fortune et de mauvais choix.
Le Parti libéral du Québec a connu son pire résultat électoral avec 25 % d’appuis en 2018. Mais avec Anglade comme cheffe, la baisse s’est poursuivie, sans soubresaut.
D’abord, le couronnement sans véritable course à la chefferie ne l’a pas aidée. Alexandre Cusson ayant abandonné peu de temps après avoir été poussé à présenter sa candidature, elle n’a pas pu se faire les dents dans des débats.
La pandémie lui a ensuite enlevé toute possibilité de se faire voir et de se faire connaître.
La rupture avec le passé était nécessaire, après les dérives éthiques de l’ère Charest et la déconnexion de Philippe Couillard des préoccupations des Québécois.
Elle est néanmoins difficile.
Son virage à gauche, comme si la relance du parti passait par une imitation de Québec solidaire, a laissé perplexes bien des anciens fidèles rouges, qui ne s’y retrouvent plus.
Éco, quoi ?
À sa première chance de se faire valoir dans un congrès devant les militants l’automne dernier, elle a acheté du temps en présentant une vision axée sur le développement de l’hydrogène.
La cheffe ne pouvait se présenter les mains vides, mais avec le recul, le projet « Éco », dont on n’a plus entendu parler depuis, avait l’air d’un lapin dans un chapeau.
Comme lorsque Philippe Couillard avait relancé l’idée bien éphémère d’un lien rapide entre Québec et Montréal en novembre 2017 à Québec.
La première portion de la session parlementaire a été difficile.
L’absence de Marie Montpetit, qu’Anglade a décidé d’expulser du caucus, s’est fait sentir. Marwah Rizqy, retenue pour des raisons personnelles, n’a pas été présente au Salon bleu, où elle avait pris l’habitude d’occuper beaucoup d’espace.
Difficulté chez les anglos
Dans l’espoir de se redonner une image nationaliste, le PLQ « nouveau » est allé assez loin dans ses propositions pour le français.
Hélène David a même suggéré au ministre Jolin-Barrette d’inclure les ayants droit de la communauté anglophone dans ceux devant réussir trois cours en français dans les cégeps anglos, ce qui a dû faire surchauffer David Birnbaum.
La cheffe a compris que son virage allait trop loin pour la traditionnelle clientèle anglophone du parti et a battu en retraite, en annonçant qu’elle voterait contre la nouvelle Charte de la langue française. Elle avait probablement été alertée par son caucus du risque de perdre ce qui restait d’appuis au parti.
Le sondage Léger paru hier montre que le PLQ a perdu 13 points chez les non-francophones en un seul mois. Et malgré ses tentatives, elle n’a pas fait bouger l’aiguille d’un iota chez les francophones.
Peut-être pour cette raison, contrairement aux autres chefs, la libérale ne s’est pas rendue dans Marie-Victorin pour appuyer sa candidate, mardi, alors que la partielle a été déclenchée.
François Legault, PSPP et Manon Massé posaient fièrement avec leur représentant. Émilie Nolet, elle, était bien seule avec sa pancarte sur Twitter.
Dominique Anglade a préféré mener campagne en Outaouais, où le PLQ a perdu des circonscriptions aux mains de la CAQ en 2018.
Le parti est en danger dans différents secteurs : Laval, Anjou, Verdun, par exemple.
Comble de malheur pour elle, le retour de Jean Charest à l’avant-scène, chez les conservateurs fédéraux, ramène une image qu’elle cherchait à faire oublier, tout en drainant des militants et organisateurs de longue date qui veulent s’impliquer pour leur ancien leader.
À cinq mois du déclenchement de l’élection générale, Dominique Anglade semble confrontée à différentes stations de souffrance, comme sur un chemin de croix.