Le CH a le pouvoir de faire le coup d'éclat du repêchage


Nicolas Cloutier
Il y a un nom qui prend de l’ampleur en coulisses depuis la conclusion de la semaine d’évaluation de la Ligue nationale de hockey (Combine). Il pique la curiosité des équipes au plus haut point, et les Canadiens de Montréal se retrouvent dans une position qui les incite à le considérer, avec deux choix de 1er tour, les 16e et 17e.
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Il s’agit de l’athlète d’exception Mason West, quart-arrière géant de 6 pieds 6 pouces, courtisé par plusieurs programmes de football de division 1 de la NCAA, mais dont l’avenir est encore plus brillant au hockey.
Imaginez, West n’avait pas immédiatement réalisé au début de la saison qu’il s’agissait de son année de repêchage au hockey. Son dévouement dans les deux sports était divisé en deux parts égales jusqu’à ce qu’il connaisse une solide fin de saison avec le Force de Fargo dans la meilleure ligue junior aux États-Unis, la USHL, et qu’il réalise son potentiel. Un moment qui lui a ouvert les yeux et qui a contribué à sa décision de privilégier le hockey au football, décision que nous vous rapportions en exclusivité peu avant le Combine.
Il parait tiré par les cheveux de considérer West au milieu du premier tour, mais des intervenants que nous avons contactés pour prendre le pouls étaient prêts à avoir cette discussion.
L’intrigue autour de West est énorme pour les raisons suivantes: primo, on ne peut définir les limites du potentiel d’un super athlète qui n’avait pas mis tous ses œufs dans le panier du hockey et, deuxio, bien malin celui qui prédira quelle équipe sera la première à oser le réclamer.
Cette crainte de le voir sortir deviendra de plus en plus importante au fur et à mesure que les choix s’enchaîneront le 27 juin et elle pourrait inviter un club à se jeter sur lui avant longtemps dans la deuxième portion du premier tour. On peut d'ailleurs confirmer que West sera sur place au repêchage au Peacock Theater de Los Angeles.
«Je ne le verrais pas comme un reach [une sélection précoce] au 17e échelon», s’est prononcé un recruteur sous le couvert de l’anonymat. Celui-ci ajoute qu’on ne devient pas athlète multidisciplinaire par hasard, sans rigueur et discipline. West a une tête sur les épaules, ce qui en fait un bon candidat pour évoluer dans un marché comme Montréal. «Son caractère est phénoménal», nous a glissé un membre de son entourage.
Comme les Canadiens ont deux droits de parole en première ronde, que plusieurs espoirs incontournables risquent d’avoir trouvé preneur et que les attaquants de 6 pieds 6 pouces bougeant avec l’aisance de West sont rares comme de la marde de pape, il y a un incitatif supplémentaire à s’élancer pour le coup de circuit, ou la bombe dans la zone des buts, plutôt, avec le 17e choix.
West, qui est doté d’un bon tir, a été utilisé à la pointe en avantage numérique cette saison; rien de plus naturel pour un quart-arrière dans l’âme. Au test cognitif que les Rangers de New York lui ont fait subir au Combine, il a d’ailleurs été fumant. Celui-ci consistait à faire tourner une feuille de papier et à repérer dans l’ordre une série de chiffres de 1 à 100 placés pêle-mêle. Le tout en l’espace de 30 secondes. West s’est rendu jusqu’à 12, le score le plus élevé dont nous avons eu vent à Buffalo. Son expérience comme pivot au football a contribué à développer sa vision cognitive et elle pourrait en théorie se transposer dans ses lectures de jeu sur la patinoire.
«D’habitude, pour un joueur comme West, on ciblerait davantage une équipe qui a des choix séparés, dont un vers la fin du premier tour. Mais si [les Canadiens] ont un plan de développement pour lui, qu’ils sont convaincus de son dévouement au hockey et qu’ils ont vu quelque chose d’extraordinaire en entrevue, je dirais que c’est 50/50», a analysé un autre éclaireur. Après une autre année dans la USHL et deux saisons dans la NCAA, West pourrait débarquer dans la grande ligue à 21 ans, fort d’une compréhension du jeu bien plus élevée.
Les 32 équipes de la LNH, pratiquement, aiment le joueur ou se disent à tout le moins intriguées par son potentiel: «Quand je suis allé le voir au Minnesota, l’aréna était plein, raconte un intervenant. L’intérêt est très important.»
Le doute qui subsiste
Mais le fait que West disputera d’abord sa dernière saison comme quart-arrière à l’école secondaire avant de faire une croix sur le football chicote environ le tiers d’entre elles.
West a répété à qui veut l’entendre au Combine qu’il était 100% dévoué au projet de devenir un hockeyeur professionnel, mais sa volonté de fermer le chapitre du football l’automne prochain fait en sorte que le doute subsiste.
«Je lance encore le ballon tous les jours», nous a même confié le jeune homme au Combine la semaine dernière. Il avoue avoir choisi le sport qui lui assure les meilleures chances de réussir au plus haut niveau, puisqu’il aime tout autant le football.
Qu’arrive-t-il si West domine outrageusement lors de sa dernière saison à Edina High School, qu’il devient un espoir 4 ou 5 étoiles et qu’un programme des plus prestigieux lui fait une offre impossible à refuser?
Le principal intéressé a répondu catégoriquement que cela ne changerait rien, samedi dernier, après avoir effectué ses tests physiques à Buffalo. Aussi, il devrait signer dans les prochaines semaines sa lettre d’intention avec un programme de hockey universitaire, ce qui cristallisera son plan et sa décision.
Encore là, qu’arrive-t-il s’il subit une blessure lors de cette dernière saison au football à Edina? Les quarts-arrières sont naturellement exposés aux contacts.
Le risque zéro, bref, n’existe pas. Mais avec un tel phénomène, des équipes seront prêtes à lancer les dés. West, l'un des plus jeunes joueurs de ce repêchage, n'aura 18 ans qu'au mois d'août. On remarque aussi qu'il ne livre pratiquement pas de mises en échec malgré son intimidante charpente, autre indice d'un potentiel inexploité. Voilà un beau projet pour le département de développement des joueurs d'une équipe de la LNH, qui pourra lui enseigner quand sortir les épaules.
Le codirecteur du recrutement amateur des Canadiens, Nick Bobrov, n’a jamais caché son amour pour les licornes, ces hockeyeurs au profil et aux attributs rarissimes. Mais par le passé, il s’est armé de patience pour repêcher un joueur unique tel que Florian Xhekaj au quatrième tour (101e au total).
Or, dans l’optique où les Flyers de Philadelphie détiennent deux choix de premier tour et que les Predators de Nashville en ont trois, le CH peut dire adieu à West s’il ne le réclame pas au 17e rang, puisque son prochain droit de parole ne sera qu’au 41e échelon, au deuxième tour.
«C’est exactement le genre de joueur sur lequel les recruteurs miseraient un vieux billet de 10$ pour sortir premier en deuxième ronde s’il ne sort pas au premier tour», illustre un dépisteur au téléphone.
Durant la semaine du Combine, le CH s’est amusé à demander aux espoirs ce qu’ils feraient sur une île déserte si leur ami avait une bouteille d’eau entre les mains et qu’ils disposaient eux d’un bâton de baseball. Pour étancher sa soif de talent et de grosseur, le Tricolore devrait peut-être saisir ce bâton pour frapper le coup de circuit que serait Mason West au 17e rang.