Le Canadien n’aura pas le choix de se grossir pour aller à la guerre

Marc de Foy
L’arbitrage est un sujet de discussion récurrent dans les séries de la Coupe Stanley. Mais que dire du comportement de certains joueurs? Avez-vous vu, pour exemple, le placage par-derrière de Max Domi à l’endroit d’Aleksander Barkov à la fin du match entre les Maple Leafs de Toronto et les Panthers de la Floride, dimanche soir?
Domi a écopé d’une pénalité majeure pour avoir donné de la bande, mais il ne restait plus de temps au tableau. Aussi bien dire une punition qui ne comptait pas. On s’est rabattu sur le comité pour la sécurité des joueurs de la Ligue nationale en pensant que l’ancien du Canadien serait suspendu pour son geste, mais non.
Domi n’aura qu’à verser 5000$, ce qui correspond à de la petite monnaie pour un joueur qui a touché un salaire de 3,75 M$ en saison régulière. Le joueur des Leafs sera donc à son poste comme si de rien n’était pour le cinquième match de cette série mercredi soir à Toronto.
Ça ne s’arrête pas là.
Pendant que les officiels tentaient tant bien que mal de rétablir l’ordre, la télévision a montré Matthew Tkachuk au banc des Panthers en train de passer un message à William Nylander, des Leafs. Vous avez frappé notre capitaine et meilleur joueur, attends le prochain match, ça va être ton tour.
Oeil pour œil, dent pour dent!
Au diable le show de l’année!
C’est ça, le hockey des séries éliminatoires de la Ligue nationale de hockey. On devrait être habitués, mais ça ne veut pas dire qu’on peut regarder tout ça sans dire un mot.
Les séries sont censées être le spectacle de l’année dans la LNH.
Avez-vous cette impression?
Voyez-vous des beaux buts?
Les meilleurs joueurs peuvent-ils jouer à la hauteur de leur talent?
À toutes ces questions, je réponds non.
On dirait un mélange de football et de roller-derby sur glace. Les attaquants s’élancent vers le filet adverse comme une équipe de football qui essaie de pénétrer dans la zone des buts avec une verge à faire. Comme au roller-derby, les joueurs se bousculent à passer par-dessus les bandes.
Les gardiens de but sont les joueurs à vaincre et les meilleurs joueurs les hommes à abattre.
De l’argent de poche
Au premier tour des séries, Brandon Hagel a appliqué une mise en échec dans un angle mort au même Barkov, alors que ce dernier n’était pas en possession de la rondelle. Le comité pour la sécurité des joueurs lui a imposé une suspension d’un match.
Tout comme l’autre soir, en Floride, Barkov aurait pu être blessé sérieusement et se retrouver à l’écart du jeu pour une longue période.
Toujours dans la série entre les deux clubs de Floride, le défenseur des Panthers Niko Mikkola a lui aussi reçu une amende de 5000$ pour avoir donné de la bande à Zemgus Girgensons.
Aaron Ekblad, lui aussi défenseur des Panthers, a écopé d’une amende de deux matchs pour avoir donné un coup de coude dangereux à Hagel. À noter dans ce cas-ci que les arbitres n’avaient pas sévi à l’endroit d’Ekblad.
La semaine dernière, Trent Frederic, des Oilers d’Edmonton, a encaissé un double-échec en pleine gueule, gracieuseté de Nicolas Roy, des Golden Knights de Vegas. Les arbitres ont infligé une pénalité majeure et une inconduite de partie à Roy qui, le lendemain, s’est vu soulager de 7812,50$ pour son offense.
Aucun respect
On a beau dire que les joueurs carburent à l’émotion pure pendant les séries, ils n’ont pas à verser dans du hockey de bas étage.
Que font-ils de la notion de respect entre humains?
Ne sont-ils pas privilégiés d’être bien rémunérés en pratiquant ce qui est à la base un jeu?
Un confrère m’a demandé s’il y aura une fin à ce genre de hockey. Je lui ai répondu instinctivement lorsqu’il y aurait un mort. Évidemment, je ne le souhaite pas. Pas plus que j’aimerais voir un joueur tomber paraplégique, comme cela s’est vu au niveau mineur.
C’est aux joueurs d’assumer leurs responsabilités et de mettre fin à ces actes épouvantables que j’irais jusqu’à qualifier de fratricides. La LNH, quant à elle, a la responsabilité d’imposer des sanctions musclées.
Est-ce qu’on verra ça un jour?
J’en doute fort.
C’est pour cette raison que le Canadien n’aura pas le choix de se grossir pour aller à la guerre.