Publicité
L'article provient de Le Journal de Québec
Société

Le Canada veut aller sur la Lune... et plus loin encore

«On parlera d’Artemis comme on a parlé d’Appolo», dit David Saint-Jacques au Journal

Photo fournie par la NASA
Partager
Photo portrait de Mathieu-Robert Sauvé

Mathieu-Robert Sauvé

2025-08-03T04:00:00Z
Partager

Le Canada se lance dans la construction d’un véhicule lunaire et compte en faire l’emblème de son expertise spatiale, comme le bras robotisé Canadarm a symbolisé sa réussite dans la Station spatiale internationale.

L’Agence spatiale canadienne a annoncé mardi l’octroi d’un budget de 14,6M$ à trois compagnies (Canadensys, MDA et Mission Control) pour la mise au point d’une astromobile lunaire capable de transporter des tonnes de matériel entre le site d’alunissage et la station lunaire permanente.

Vue d’artiste d’un astronaute, d’un atterrisseur et d’une astromobile sur la Lune.
Vue d’artiste d’un astronaute, d’un atterrisseur et d’une astromobile sur la Lune. Photo fournie par l'Agence spatiale canadienne

«Oubliez le moon buggy, la voiturette de golf comme le rover martien ou la fourgonnette de type van life, explique en entrevue au Journal l’astronaute David Saint-Jacques. Nous sommes à développer un véhicule de grande taille dont les roues nous arriveront au menton... Peut-être plus haut encore. Mais sans aller jusqu’aux camions de la Baie-James.»

David Saint-Jacques a mené plusieurs expériences à bord de la Station spatiale internationale.
David Saint-Jacques a mené plusieurs expériences à bord de la Station spatiale internationale. Photo Explora

L’astronaute canadien David Saint-Jacques en entrevue avec TVA Nouvelles en 2020.
L’astronaute canadien David Saint-Jacques en entrevue avec TVA Nouvelles en 2020. Capture d'écran TVA NOUVELLES, AGENCE QMI

Carte blanche

Il souligne que la NASA a donné carte blanche au Canada pour qu’il développe la mobilité lunaire dans le programme Artemis, ce qui implique la mise au point de petits rovers télécommandés capables de mesurer les indices de la présence de glace sur le pôle sud, mais aussi d’autres véhicules.

Publicité

L’annonce de la semaine dernière marque le début d’une autre étape, plus complexe et plus ambitieuse.

Vue d’artiste du vaisseau «Orion» survolant la Lune et d’un lever de Terre durant la mission Artemis I.
Vue d’artiste du vaisseau «Orion» survolant la Lune et d’un lever de Terre durant la mission Artemis I. Photo fournie par la NASA

«Les sites où se poseront les vaisseaux en provenance de la Terre seront éloignés de plusieurs kilomètres du site permanent afin d’éviter les accidents. On aura donc besoin de véhicules techniques et logistiques, sans conducteurs, capables de transporter le matériel. C’est à ça qu’on va se concentrer maintenant», dit-il.

Parmi les défis à relever, l’astromobile devra pouvoir surmonter la nuit lunaire, se déplacer sur un sol «pareil à du papier sablé» et avoir suffisamment d’autonomie.

M. Saint-Jacques juge l’«Équipe Canada» capable d’y arriver en vertu de ses exploits en aérospatiale, en intelligence artificielle et en génie des matériaux et de son expertise industrielle.

Le programme du bras robotisé Canadarm, qui a fait la gloire de l’Agence, sera bientôt dans sa dernière ligne droite, car la Station spatiale internationale n’en a plus que pour cinq ou six ans avant d’être abandonnée. L’astromobile canadienne le remplacera, du moins, c’est ce qu’on souhaite.

Période excitante

L’astronaute, qui a réalisé quatre missions spatiales – il demeure le Canadien qui a vécu le plus long séjour en apesanteur, soit 204 jours –, est depuis deux ans directeur adjoint du volet Exploration lunaire à l’Agence spatiale canadienne.

Il affirme que les Canadiens sont à l’aube d’une période extrêmement excitante durant laquelle on verra l’humain retourner sur la Lune non seulement pour y récolter quelques minéraux, mais pour «s’installer durablement afin d’aller éventuellement vers Mars».

Publicité

La mission Artemis, qui en est à sa deuxième étape, marquera sa génération comme la mission Apollo a marqué la sienne. «J’étais dans le ventre de ma mère quand on a marché sur la Lune, mais j’ai suivi passionnément les autres missions Apollo. Je crois que nos enfants en diront autant d’Artemis», ajoute le père de famille, qui est né à Québec et qui a grandi à Saint-Lambert.

Si le programme Artemis a été marqué par plusieurs reports, l’échéancier actuel sera respecté, croit-il. «Oui, le programme Apollo allait plus vite, mais on prenait alors des risques énormes. On fait plus attention aujourd’hui», souligne-t-il.

Artemis ou les débuts extraterrestres de l’humanité

Selon la mythologie grecque, Artémis était la déesse de la Lune

Artemis I – Vol téléguidé

Vol sans équipage du 16 novembre au 11 décembre 2022, un périple de 2,25 millions de kilomètres. Effectue une fois et demie le tour de la Lune, y compris derrière la «face cachée».

Artemis II – Vol habité

En avril 2026, quatre astronautes, dont le Canadien Jeremy Hansen, feront le tour de la Lune sans s’y poser.

Artemis III – On marche sur la Lune

Prévue pour 2027, la mission consiste à faire marcher des astronautes sur la Lune pour la première fois depuis 1972.

Artémis IV, V, VI, VII – Construction de la base lunaire

En 2028, un premier module d’habitation permanent est livré. Les vols suivants, prévus pour 2030, 2031 et 2032, consistent en la finalisation de la base lunaire.

Chine et États-Unis s’ignorent

Les projets lunaires de la Chine et des États-Unis convergent vers le pôle Sud, «là où on pense qu’il y a de la glace dans des cratères à l’abri du Soleil. C’est comme de l’or, car avec de la glace on peut faire de l’eau et de l’oxygène», explique l’astronaute David Saint-Jacques.

Publicité

On ignore presque tout du programme spatial chinois. «Malheureusement, il n’y a pas de pont ouvert actuellement. Mon opinion personnelle, c’est qu’il devrait y avoir un meilleur dialogue. L’espace reste un endroit où les collaborations internationales sont possibles», dit-il en faisant référence aux projets communs entre la NASA et l’URSS après la Guerre froide.

Le Canada dans l’espace: les dates marquantes

1962: premier satellite canadien

Après le Spoutnik d’URSS en 1957 et l’Explorer des États-Unis l’année suivante, le Canada lance le satellite Alouette en 1962 pour étudier l’ionosphère, devenant le troisième pays au monde à lancer des satellites artificiels.

Les premières expériences du Canada dans l’espace remontent à 1962, avec le lancement du satellite scientifique Alouette I, conçu pour l’étude de l’ionosphère. Alouette I a transmis des données pendant 10 ans.
Les premières expériences du Canada dans l’espace remontent à 1962, avec le lancement du satellite scientifique Alouette I, conçu pour l’étude de l’ionosphère. Alouette I a transmis des données pendant 10 ans. Photo Agence spatiale canadienne

1981: Déploiement du Canadarm

Le 13 novembre 1981, la navette spatiale Columbia déploie le bras télémanipulateur canadien, appelé Canadarm. Cet outil technologique de 15,2m peut lever jusqu’à 266 000kg de charge en microgravité, l’équivalent sur terre d’une locomotive et de plusieurs wagons ou de 190 automobiles. Et tout ça en consommant moins d’électricité qu’une cafetière!

Ce fleuron de l’aérospatiale canadienne a permis l’assemblage de la Station spatiale internationale et le lancement du télescope Hubble, qui a permis d’observer mieux que jamais le cosmos.

Canadarm2 a été utilisé par les astronautes lors de leurs sorties dans l’espace à partir de 1998. On voit ici l’astronaute de la NASA Stephen Robinson retenu par le Canadarm2 lors de la troisième sortie extravéhiculaire.
Canadarm2 a été utilisé par les astronautes lors de leurs sorties dans l’espace à partir de 1998. On voit ici l’astronaute de la NASA Stephen Robinson retenu par le Canadarm2 lors de la troisième sortie extravéhiculaire. Photo fournie par la NASA

Le Canadarm connaîtra une deuxième version en 1998. Plus long de 2,4m, il n’est pas fixé sur la navette et il peut donc se déplacer et être contrôlé de la Terre.

1995: RADARSAT, télédétection

Lancé en 1995, RADARSAT est le premier satellite canadien dédié à l’observation de la Terre. Il offre des images radar capables de traverser les nuages et de surveiller l’évolution des glaciers, des océans et des forêts. Avec cette innovation, le Canada se positionne comme un chef de file en télédétection.

2008: DEXTRE, robot d’entretien

En 2008, le système robotique DEXTRE (ou Canada Hand) est lancé. Doté de deux bras, il réalise des opérations d’entretien et d’inspection autonomes sur la Station spatiale internationale, réduisant la dépendance aux sorties extravéhiculaires humaines.

Vous avez un scoop à nous transmettre?

Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?

Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.

Publicité
Publicité