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L'article provient de TVA Sports
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Le baseball d’octobre: une lenteur nécessaire dans un monde trop pressé

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Photo portrait de Jean-Charles Lajoie

Jean-Charles Lajoie

2025-10-29T22:23:46Z
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Clarifions une chose d’entrée de jeu: le baseball ne figure pas sur mon podium personnel de sports favoris. Il vient après le hockey, le football et le basketball. Pourtant, chaque automne, le baseball d’octobre réussit l’exploit de me captiver comme aucun autre sport ne le fait.

Il n’y a que le baseball d’octobre pour me faire organiser un happening en pleine semaine, juste pour regarder un match numéro 7 en gang. Je me souviens du 29 octobre 2014, un mercredi. Les improbables Royals de Kansas City affrontaient les puissants Giants de San Francisco dans le match ultime d’une Série mondiale qui semblait acquise à Frisco, en route vers un troisième championnat en cinq ans.

Madison Bumgarner, le lanceur vedette des Giants, avait déjà réduit au silence les Royals dans les matchs 1 et 5. Et ce soir-là, malgré seulement deux jours de repos, il est revenu en relève pour cinq manches magistrales. Les Giants ont gagné. Les sous-chiens ont perdu. Et moi, au lieu d’être déçu, j’ai été ébloui. Parce que ma partisanerie s’incline toujours devant l’exploit sportif hors normes. Bumgarner a marqué mon imaginaire à jamais, comme Reggie Jackson l’a fait pour tant d’autres.

Je n’aime pas particulièrement Toronto. Je ne suis pas dupe: depuis le fameux «j’ai jamais pensé que je pourrais être aussi fier d’être Québécois que ce soir» de René Lévesque en 1976, le Québec a commencé à être dépossédé. Toronto est devenue la banque centrale canadienne, la ville qui a tout, pendant que nous, il ne nous reste plus grand-chose.

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Toronto a la NBA, Montréal a un club local qui joue à Verdun. Toronto a les Blue Jays, Montréal, ses Expos en documentaire. Même pas un parc digne de ce nom pour jouer à la p’tite balle. Mais j’aime les Blue Jays. Surtout pour Vladimir Guerrero fils, né ici, à Montréal, chef de file d’une équipe sans peur qui rêve d’un championnat.

Aimer ou ne pas aimer le baseball? Je dis aimer! Dans une société qui n’a cessé d’accélérer, le baseball avait perdu de son lustre. Certains le qualifiaient de sport pour flancs mous, pour gens sans vie avec trop de temps à perdre. Mais dans une société qui frappe le mur à 120 km/h, le baseball devient un exutoire. L’éloge d’une lenteur nécessaire.

On a intégré une horloge au baseball, mais juste pour éviter les séquences interminables où le lanceur se fouille dans le nez pendant que le frappeur se replace le paquet. On a limité les matchs de saison régulière, mais en éliminatoires, on joue. On joue jusqu’à ce que ce soit fini. Pas de limite. Pas de souper qui appelle. On joue.

Dans notre société pressée, où les médecins ont six minutes pour nous écouter, nous examiner et nous rassurer, le baseball offre un rare moment non limité dans le temps. On joue 18 manches s’il le faut. Et après, on va manger. Certains, des protéines, d’autres comme Alejandro Kirk, probablement une excellente pizza flanquée de deux bières. Je n’en sais rien, mais je l’espère.

Capitaine Kirk donne espoir. Le p’tit gros dont tout le monde a déjà ri au parc du coin peut gagner la Série mondiale en jouant un rôle déterminant. Alejandro et Guerrero, le p’tit Québécois qui nous rend fiers. Fiers de regarder le baseball d’octobre en pensant à Rodger, celui qui, le premier, nous a fait aimer ce sport! Je t’aime, Rodger!

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