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L'article provient de TVA Sports
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Laurent Dubreuil a trouvé la recette magique

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Richard Boutin

2022-02-05T05:58:01Z
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Laurent Dubreuil est en feu depuis deux ans et connaît les meilleurs moments de sa carrière même s’il a réduit considérablement sa cadence d’entraînement.

«C’est paradoxal comme situation, convient le champion du monde en titre sur 500 m, mais c’est la réalité. Nous avons trouvé la recette parfaite qui me convient, et compris ce dont j’ai besoin. Comme sprinter, j’en faisais trop.»

«Le volume est la clé pour un cycliste qui fait le Tour de France, mais pas pour moi. Après une journée de repos, je reviens plus fort le lendemain et je pousse plus fort.»

C’était trop

Le patineur de Lévis estime qu’un changement était nécessaire.

«Je me serais blessé si j’avais gardé le même rythme, résume-t-il. Avec la mentalité de toujours en faire plus, je m’entraînais trop dans le temps. Je me sentais coupable si je prenais une journée de congé et je me disais que j’allais prendre du retard parce qu’un adversaire s’entraînait ailleurs dans le monde.»

Dubreuil avait l’habitude de s’entraîner six jours par semaine à raison de deux séances quotidiennes. Il a réduit le rythme à six ou sept fois par semaine.

«Avant un entraînement, on se questionne sur les raisons de le faire et on ne le fait pas si on ne trouve pas la réponse, raconte-t-il. On a abandonné les périodes de remplissage. Il y a un objectif derrière chaque entraînement. Les séances sont plus productives parce que je suis plus reposé et plus concentré au lieu de simplement puncher.»

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Creuser sa tombe

S’il avait déjà réduit la fréquence deux ans avant la naissance de sa fille Rose, en juillet 2019, Dubreuil a encore diminué depuis qu’il est papa.

«On faisait des essais-erreurs et on n’avait pas encore trouvé la recette magique, illustre-t-il. Les entraînements sont plus qualificatifs.»

«En misant sur le volume, je creusais ma propre tombe et j’étais moins rapide. J’ai eu besoin de plusieurs années à le réaliser. J’ai cheminé avec Gregor[Jelonek, son entraîneur] et nous avons trouvé la bonne recette. Je savais que le repos permettait de s’améliorer, mais on doit se faire confiance.»

Qualité de vie

Cette recette lui permet d’avoir une très belle qualité de vie.

«Je passe plus de temps en famille que si je travaillais de 9 à 5. Tous les jours, je suis de retour à midi à la maison. J’ai un horaire souple et une flexibilité que je n’aurai pas dans mon après-carrière.Je fais ma musculation dans le garage et je vais chercher Rose à la garderie en fin d’après-midi, alors que mon épouse revient du travail. Je me sens en vacances à l’année. C’est la vie de rêve.»

Heureux de son sort

Avec son talent et un titre mondial en poche, Laurent Dubreuil serait une vedette au compte de banque bien garni s’il avait vu le jour aux Pays-Bas, où le patinage de vitesse longue piste est le sport national d’hiver.

Les champions néerlandais gagnent des centaines de milliers d’euros, apparaissent dans les émissions télévisées de fin de soirée et sont des stars dans leur pays comme les vedettes de soccer.

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Qualifiés pour Pékin, Sven Kramer et Ireen Wust comptent 19 médailles olympiques à leur actif, dont neuf d’or. Le premier des deux a aussi neuf titres mondiaux à son palmarès.

«Kramer est dans une classe à part avec des gains annuels de 1,5 million d’euros [2,1 M$ CA] sans compter ses commanditaires, raconte Dubreuil. Il est aussi gros que Max Verstappen en F1. Les patineurs de mon calibre gagnent entre 100 000 [142 000$ CA] et 500 000 euros [709 000$ CA] par année.»

Beaucoup d’attention

«Bon comme je suis, j’aurais été pas mal mieux de naître aux Pays-Bas, de poursuivre Dubreuil avec le sourire. Mon compte de banque serait pas mal mieux. Un patineur de mon calibre gagne le quadruple de mon salaire. Les meilleurs patineurs se retrouvent dans les émissions de fin de soirée et à la télé nationale. C’est spécial toute l’attention dont ils sont l’objet.»

Le patinage de vitesse longue piste suscite l’engouement. Présentés aux Pays-Bas l’an dernier dans la bulle de Dordrecht, les Championnats mondiaux ont cartonné.

«Dans un pays de 17 millions d’habitants, quatre millions de personnes ont regardé les épreuves, mentionne le Québécois. Les succès des patineurs hollandais représentent une source de fierté nationale. Les meilleurs patineurs sont des gros noms associés à Red Bull ou invités à la F1. La royauté assiste à toutes les courses. En 2021, les spectateurs n’étaient pas admis aux Mondiaux en raison de la COVID-19, mais 4 millions de personnes le voyaient si tu connaissais une mauvaise course. Les cotes d’écoute sont aussi élevées pour les nationaux.»

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S’il est bien conscient des différences entre les deux pays, Dubreuil vit très bien avec la situation.

«Je ne me plains pas de mes conditions, loin de là, assure-t-il. J’ai la passion de mon sport et je ne serais pas plus heureux si mon revenu était plus élevé. J’ai tout ce dont j’ai besoin pour être heureux et tous les éléments pour les battre.»

Ça rapporte

Sa médaille aux Mondiaux a amené de l’eau au moulin et le jour où il accrochera ses patins n’est pas arrivé.

«Je n’ai jamais gagné autant d’argent et il n’y a aucune raison pour que j’arrête de patiner. Tous les efforts investis depuis 15 ans payent en ce moment. C’est gros de remporter le Mondial, mais c’est encore plus gros de remporter les Olympiques. Ça devrait exploser si je gagne à Pékin.»

Chez les pros

Les Pays-Bas sont le seul pays au monde qui compte un circuit professionnel de patinage de vitesse. Dubreuil a déjà eu des discussions informelles avec quelques équipes.

«C’est un rêve que j’entretiens depuis un bout de passer un an aux Pays-Bas, confie-t-il. C’est le meilleur système de développement au monde. Des patineurs moins bons que moi gagnent des médailles. J’aimerais vivre l’expérience un an et voir pourquoi ils sont si bons. Alex [Harvey] avait passé un été à s’entraîner avec les Norvégiens pour les mêmes raisons.»

Le patineur de 29 ans croit qu’une bonne saison cette année pourrait lui ouvrir les portes. Il regarde la formation Jumbo Visma qui compte Kramer dans ses rangs et qui s’aligne aussi au Tour de France.

«Ça ne fait pas assez longtemps que je suis assez bon pour susciter de l’intérêt, mais je pourrais devenir intéressant puisque je suis parmi les meilleurs sprinters au monde, explique-t-il. Le but est d’être payé pour patiner.»

Bien qu’il aimerait vivre l’expérience dès l’an prochain, Dubreuil ne fera pas le saut en Europe seul.

«Je ne laisserai pas ma famille derrière moi. Mon épouse pourrait prendre un congé sabbatique ou prendre un congé de maternité si on décide d’avoir un deuxième enfant.»

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