Laïcité à deux vitesses: pas de drapeau en berne pour le pape en raison de la loi 21

L’Assemblée nationale a mis le drapeau en berne en l’honneur de nombreuses personnalités sportives et artistiques, mais pas pour le pape en raison de la Loi sur la laïcité de l’État. Ce qui n’a toutefois pas empêché François Legault de dépêcher une ministre aux funérailles du souverain pontife au nom des Québécois catholiques.

Le drapeau du Canada a été mis en berne sur les édifices fédéraux partout au pays, la semaine dernière.

Ottawa n’a pas hésité à faire usage de cette «puissante démonstration visuelle d’un sentiment de deuil partagé par tous les citoyens» en l’honneur du Saint-Père, qui a aussi le statut de chef d’État.

La Cité du Vatican est le plus petit pays du monde, situé au cœur de Rome, la capitale italienne.

Le fleurdelisé qui flotte sur la plus haute tour de l’Assemblée nationale n’a pas connu le même sort. Il est demeuré hissé bien haut sur son mât.

La loi 21 a empêché le Parlement québécois de rendre hommage à Sa Sainteté, qui a fait le voyage jusqu’à Québec en 2022.

«La Loi sur la laïcité de l’État édicte comme principe la séparation de l’État et des religions ainsi que la neutralité religieuse de l’État. Cette loi exige aussi que les institutions parlementaires respectent l’ensemble de ces principes en fait et en apparence. Dans ces circonstances, il n’y a pas eu de mise en berne pour le décès du pape», a précisé la porte-parole de l’Assemblée nationale, Béatrice Zacharie.

Artistes et sportifs

Par le passé, le Québec a pourtant honoré ainsi la mémoire de nombreuses personnalités de différents horizons.

On pense évidemment à d’anciens premiers ministres québécois et canadiens, comme Bernard Landry, Jacques Parizeau ou Brian Mulroney.

Mais aussi à plusieurs artistes ou sportifs, comme le chanteur des Cowboys Fringants, Karl Tremblay, ou les joueurs de hockey Guy Lafleur et Mike Bossy.

Mais la laïcité de l’État n’a pas empêché la ministre Martine Biron de se rendre aux funérailles du pape samedi dernier.

La ministre des Relations internationales a même justifié sa présence aux obsèques du souverain pontife, car «la majorité des citoyens du Québec sont catholiques».

Manque de cohérence

Un discours qui manque passablement de cohérence, a fait remarquer le Parti libéral.

La CAQ cherche à faire adopter un autre projet de loi pour étendre l’interdiction des signes religieux à plus de membres du personnel des écoles et à mettre fin aux accommodements religieux dans le réseau scolaire.

D’autres institutions, comme la Ville de Québec, ont suivi la direction empruntée par le Parlement québécois et n’ont pas mis en berne leur drapeau pour souligner la mémoire du pape François.

«On suit le protocole de l’Assemblée nationale, on s’est consultés et [...] on suit le protocole du gouvernement du Québec, a précisé le porte-parole François Moisan. C’est parce qu’on est un État laïc».

Notons que la décision de mettre en berne le drapeau québécois est prise conjointement par la présidente de l’Assemblée nationale et le premier ministre François Legault.

«Il symbolise, de façon officielle, le deuil collectif, lit-on sur le site du Parlement. Le drapeau est parfois mis en berne à des dates fixes afin de souligner certaines commémorations. Il est aussi mis en berne lorsque survient le décès d’une personnalité publique significative ou un événement tragique.»

Exemples de personnalités dont le décès a été souligné par la mise en berne du drapeau du Québec

Le chanteur des Cowboys Fringants, Karl Tremblay

Le hockeyeur Guy Lafleur

L’agent d’artiste et chanteur René Angélil

Le hockeyeur Michael Bossy

L’auteur-compositeur-interprète, humoriste et comédien Jean Lapointe

Le producteur et agent d’artiste Guy Latraverse

L’auteur-compositeur et interprète Jean-Pierre Ferland

Le constitutionnaliste et ex-ministre libéral Benoît Pelletier

L’astrophysicien québécois Hubert Reeves