Publicité
L'article provient de Le Journal de Québec
Société

L’affaire Rousseau continue de hanter Air Canada

Le commissaire aux langues officielles blâme le transporteur

Le PDG d’Air Canada, Michael Rousseau, lorsqu’il a prononcé son discours en anglais à la CCMM, en novembre dernier. En mortaise, le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge.
Le PDG d’Air Canada, Michael Rousseau, lorsqu’il a prononcé son discours en anglais à la CCMM, en novembre dernier. En mortaise, le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge. Photos d’archives et courtoisie, Sebastien Lavallée
Partager

Olivier Bourque

2022-04-08T15:33:16Z
2022-04-09T04:00:19Z
Partager

Air Canada continue d’être hantée par l’affaire Rousseau. Le commissaire aux langues officielles blâme le transporteur pour les événements de novembre dernier et juge que les 2680 plaintes sont fondées dans un rapport préliminaire consulté par Le Journal. 

• À lire aussi: Air Canada prévoit plus que doubler sa capacité de transport

• À lire aussi: Michael Rousseau s’excuse dans un français qui ne vole pas haut

• À lire aussi: Entreprises fédérales soumises à la loi 101: Michael Rousseau devra travailler en français

Dans un document de 17 pages envoyé aux plaignants et à Air Canada, Raymond Théberge écrit que l’entreprise n’a pas respecté la loi lors du discours de son patron, Michael Rousseau, devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).

« Air Canada n’a pas rempli ses obligations puisqu’elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour s’assurer que les personnes présentes lors des incidents du 3 novembre 2021 pouvaient communiquer et recevoir de l’information dans la langue officielle de leur choix, alors que la Loi l’obligeait à le faire », écrit le commissaire Raymond Théberge. 

« Les plaintes s’avèrent donc fondées compte tenu des obligations prévues à cette partie de la Loi », poursuit-il. 

Genèse du fiasco

Dans son rapport, M. Théberge revient sur la suite des événements qui ont pavé la voie au fiasco du 3 novembre. 

Publicité

En février 2021, Michael Rousseau était devenu le patron du transporteur. L’entreprise avait alors indiqué au Journal qu’il parlait « un français fonctionnel qu’il s’emploie à améliorer continuellement ». 

Le 1er novembre dernier, Le Journal rapportait que le PDG avait décidé de prononcer son premier discours au Québec en anglais. 

En apprenant cette nouvelle, plusieurs intervenants, dont le Commissariat et le bureau du premier ministre du Québec, ont informé Air Canada de ses obligations linguistiques et du risque lié à un tel discours. Mais l’entreprise a décidé de faire fi des avertissements. 

Puis, le dirigeant a fait son discours en anglais, a répondu qu’il n’avait pas le temps d’apprendre le français et qu’il avait pu vivre dans la langue de Shakespeare pendant 14 ans à Montréal, « ce qui était à l’honneur de la ville ». 

« De nombreux plaignants ont dit que les propos du PDG étaient méprisants, irrespectueux, insultants, blessants, inexcusables et honteux et qu’ils manquaient de sensibilité à l’égard de la langue française », souligne le commissaire. 

La CCMM était au courant

Dans sa défense, Air Canada affirme que la CCMM avait été avisée que le discours du PDG serait en anglais et n’a pas jugé utile d’offrir la traduction simultanée aux participants. 

Air Canada considère aussi que lors des interactions avec les journalistes, notamment les représentants du Journal et de TVA, M. Rousseau n’avait pas à respecter les deux langues officielles. 

Le commissaire n’a pas retenu les arguments d’Air Canada, mais a souligné que l’entreprise « s’est engagée à prendre certaines mesures afin de démontrer son engagement à l’égard des deux langues officielles ».

Publicité

Sensibiliser la haute direction au français  

Dans son rapport, le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, ne manque pas de rappeler l’importance de l’affaire Rousseau pour les francophones et formule plusieurs recommandations. 

« Je constate également que les incidents du 3 novembre 2021 ont eu une incidence réelle sur le statut du français au Canada », écrit-il dans le document. 

Ce dernier recommande d’ailleurs qu’Air Canada prenne « des mesures concrètes et efficaces pour sensibiliser les membres de la haute direction » au fait que toutes les communications destinées au public « doivent toujours être effectuées dans les deux langues officielles, et ce, de qualité égale ». 

Le commissaire propose aussi d’ajouter un objectif de rendement précis concernant les langues officielles à l’évaluation de rendement de chaque membre de la haute direction, « objectif qui sera rattaché à des indicateurs de rendement concrets et mesurables ».  

Air Canada devrait aussi soumettre une mise à jour semestrielle de l’avancement de leurs initiatives, conclut M. Théberge. 

Démission demandée

L’organisation Impératif français, dont plusieurs membres ont formulé des plaintes au commissaire après les incidents de novembre, dénonce « la mollesse et la langue de bois » du rapport ainsi que la réaction du gouvernement canadien dans le dossier.

« Ce problème est voulu dans les hautes sphères du Parlement pour l’avancement de l’anglais, pour soutenir le recul du français et pour soumettre le Québec à la vision canadienne », a souligné le président Jean-Paul Perreault. 

Selon lui, le rapport est toutefois un élément de plus qui devrait amener M. Rousseau à partir. « Puisque ce PDG d’Air Canada est unilingue anglais et par conséquent incapable de parler français, ou si peu, il n’aurait jamais dû être embauché », a-t-il affirmé.

Air Canada a affirmé prendre connaissance du rapport et pourra émettre des commentaires. 

« Air Canada a récemment annoncé de nouvelles mesures en matière de langues officielles qui renforceront et consolideront son engagement envers le bilinguisme dans sa culture d’entreprise », nous a-t-on écrit par courriel. 

Publicité
Publicité