Trump, Poutine et les leçons de l'histoire


Joseph Facal
Nous sommes en septembre 1938.
Le monde entier se demande jusqu’où Hitler est prêt à aller.
Il bluffe? Il veut la guerre?
Un fou furieux? Un fin renard dans un costume d’énergumène?
Trahison
Le premier ministre britannique, Neville Chamberlain, s’envole pour Munich et signe avec Hitler un document qui reconnaît l’annexion par l’Allemagne nazie de la partie de la Tchécoslovaquie où habite une minorité germanophone.
Daladier, au nom de la France, et Mussolini, au nom de l’Italie, signent aussi.
On ne demande pas au gouvernement tchécoslovaque son avis avant de démembrer son pays.
Chamberlain pense avoir comblé l’appétit d’Hitler.
De retour à Londres, dès sa descente d’avion, il lance: «Je vous ramène la paix, et une paix, je l’espère, honorable».
Churchill lui répond avec des mots restés célèbres: «Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur; vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre».
Une large majorité du Parlement, et sans doute de l’opinion publique, donne cependant raison à Chamberlain.
Moins d’un an plus tard, Hitler envahissait la Pologne, et la Deuxième Guerre mondiale débutait.
Plusieurs pensent aujourd’hui que Poutine se contentera de quelques morceaux de l’Ukraine.
Il n’est pas Hitler, mais il ne cache pas son désir de donner à la Russie la puissance et le prestige qui étaient ceux de l’URSS, pour laquelle il ne fait pas mystère de sa nostalgie.
Trump, lui, n’est pas Chamberlain.
Le Britannique était un naïf qui ne comprenait rien à la mentalité d’un tyran.
Trump, lui, est peut-être naïf s’il pense que Poutine se satisfera de 20% du territoire ukrainien.
Mais Trump lorgne aussi les ressources naturelles de ce pays, a lui-même un tempérament autocratique, et ne dissimule pas sa troublante estime pour Poutine.
Il coiffe cela d’une rhétorique proprement délirante, accusant l’Ukraine d’avoir déclenché la guerre, et disant sur le financement occidental des faussetés telles qu’elles forcèrent Emmanuel Macron à lui couper la parole pour rétablir les faits.
Et que disent ceux autour de nous qui rechignent à soutenir l’Ukraine?
Qu’il faut être «réaliste», que tout cela coûte cher, que c’est loin de chez nous, que l’Ukraine n’est pas sans reproches, qu’on nous lave le cerveau, etc.
Pour justifier de lâcher la Tchécoslovaquie, on entendit jadis les mêmes arguments.
Est-ce à dire que, si on lui donne des morceaux de l’Ukraine, Poutine, stimulé, attaquera ensuite d’autres pays limitrophes?
Peut-être que oui, peut-être que non, mais la Finlande, la Pologne, les pays baltes augmentent leurs dépenses militaires et renforcent leurs défenses.
Ils craignent quoi, selon vous?
De toute façon, si Poutine ne les envahit pas, mais leur fait suffisamment peur pour obtenir leur soumission, cela reviendra au même ou presque.
Leçons
Poutine, comme tous les tyrans, ne comprend que la force.
Mais il comprend au moins cela.
Tout autour de nous, des tas de gens ne comprennent rien à rien, à commencer par les leçons de l’Histoire.