La Ville de Montréal crée un panneau orange personnalisé à cette fameuse microbrasserie dissimulée par des chantiers de construction qui perdurent
L’établissement ouvre sa terrasse ce jeudi malgré le tintamarre des travaux


Louis-Philippe Messier
À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Pour indiquer qu’un bar est bel et bien ouvert, même s’il est enclavé par deux chantiers majeurs qui cachent son accès, la Ville a fait concevoir deux panneaux orange à son nom.
Parmi les sempiternels affichages orange réfléchissants, TROTTOIR BARRÉ et DÉTOUR se trouvent des originalités de circonstance, comme ici: LE CHEVAL BLANC ACCESSIBLE.
Depuis plusieurs mois, il y a beaucoup plus de cônes orange que de clients potentiels autour de la taverne du Cheval blanc, un débit de boisson centenaire au centre-ville qui a adopté son nom actuel lorsqu’il est devenu la première microbrasserie de Montréal en 1987.
Non seulement la rue Ontario est bloquée à la circulation automobile, mais la rue Saint-Hubert, à l’angle du bar, est également accaparée par un gros chantier de construction privé.
À mon arrivée, dans un labyrinthe de grillages, je peine à trouver mon chemin.

««Les travailleurs à l’œuvre sur le chantier peuvent nous voir. Ils se rendent bien compte du dérangement et ils sont gênés de nous embêter», raconte le propriétaire Jérôme Catelli-Denys.
«Les panneaux indiquent que nous sommes toujours là même si ça ne paraît pas. C’est une sorte de prix de consolation pour nous aider un peu à passer à travers», poursuit celui qui ne se gêne pas pour manifester son impatience à la Ville et à l’entrepreneur.
Lors de l’entrevue, M. Catelli-Denys était en train de monter sa terrasse qu’il entend ouvrir dès le 1er mai comme son permis l’y autorise, même si le doux chant du marteau piqueur d’Amérique risque de se faire entendre.
Égouts du XIXe siècle
Si l’âge du Cheval blanc vous impressionne, songez que ce débit de boisson de 101 ans est une petite jeunesse fringante en comparaison du collecteur d’égout que la Ville est en train de revamper sous la rue Ontario afin d’éviter un éventuel accident de type «geyser» comme c’est survenu au pied du courant en août 2024.
«Ça a bien 150 ou 160 ans, ce canal-là! Regarde-le!» s’exclame un travailleur de chantier en me montrant l’espèce de gros tube de vieilles briques qu’il est en train d’imperméabiliser de l’intérieur.

«Quelqu’un de la compagnie a demandé les panneaux pour le Cheval blanc à la Ville et elle les a fait faire pour que ça soit clair que c’est ouvert», précise-t-il quand je lui parle des panneaux.
«Nous étions constamment en train d’aller voir les signaleurs de chantier pour leur dire d’arrêter de bloquer les gens qui voulaient venir au bar en leur disant que tout [était] fermé», s’exaspère Annie Blouin, alias Boubou, la gérante.

«J’ai éclaté de rire et j’étais joyeuse en voyant les panneaux apparaître la semaine dernière», se souvient-elle.
Afin d’orienter ses clients dans le dédale de grillages, M. Catelli-Denys a aussi fait concevoir quatre autres panneaux indicateurs.
L’établissement espère pouvoir garder les panneaux orange à son nom.
Prions pour qu’aucun collectionneur malhonnête n’aille dérober ces artefacts montréalais d’ici la fin du chantier.
Lors de ma visite, un des deux panneaux semblait déjà introuvable...
