La Sainte-Flanelle pourra-t-elle nous sauver de Donald Trump?


Isabelle Maréchal
Croyez-vous que les dieux du hockey vont exaucer les vœux des partisans du CH? Nos Glorieux vont-ils être touchés par une main divine? Le match de lundi soir devrait confirmer notre place au paradis des séries. Préparez-vous à être aux anges. Les cris de joie vont retentir bruyamment dans la cathédrale du Centre Bell. Alléluia! Avouez qu’on le mérite, ce miracle-là!
Peu d’équipes sportives suscitent un tel langage mystique. On prie pour une remontée, on sacre en prolongation, et on se confesse le lendemain de défaite. Quand le CH gagne, c’est comme si une lumière béatifique réchauffait nos cœurs, traversait notre quotidien gris, nos hivers trop longs. Un but en échappée suffit à nous faire croire à nouveau que le bonheur existe. Chaque victoire est une résurrection. Ce club unique à qui on pardonne tout est notre salvateur.
Le diable en personne
Peut-on sérieusement penser que le CH nous sauve du diabolique Trump? Il y a une vérité à creuser dans cette question un brin provocatrice. Car si le hockey occupe une place quasi spirituelle dans nos vies, c’est qu’on cherche un sens à une époque qui en manque cruellement.
Trump replonge le monde dans une spirale d’inflation, d’incertitude et de repli. Il chamboule l’équilibre du jeu. C’est un goon qui refuse de respecter les règles du jeu. Il joue rough, distribue les mises en échec, impose des tarifs comme des punitions majeures. Ce président démoniaque mérite plus qu’un «deux minutes pour obstruction économique». Il faut le sortir du match.
Oui, notre moral a pris un méchant coup de palette. On a mordu la glace en désavantage numérique. Mais la game est pas finie.
Si le CH ne peut pas nous sauver de Trump, il peut nous rappeler qui nous sommes. Nous rassembler. Il peut être cette rare chose qui transcende les générations, les classes sociales, les origines. Dans un monde éclaté, la Sainte-Flanelle nous permet une rare communion. C’est peut-être la seule bonne nouvelle à laquelle on peut se raccrocher.
Le hockey devient une distraction noble, une passion collective, un ciment identitaire. Le CH, c’est l’antidote à notre fatigue collective. C’est peut-être naïf de penser que des gars en patins qui se battent pour une rondelle contrebalancent les élans mégalomanes d’un président fou. C’est rendu révolutionnaire d’avoir envie de rêver. C’est de la résistance en chandail tricoté serré.
L’évangile selon St-Louis
On connaît par cœur le chapelet de justifications de l’entraîneur Martin St-Louis: phases de «reconstruction», saisons «de transition», années où «l’avenir est prometteur». Ses paroles sont autant de commandements à ses joueurs: «T’amènes TA game à LA game», «Jouer en dedans, c’est important».
Cette année, les astres sont alignés. À 96% «dans le mix». On leur souhaite juste de pas «se vomir dessus».
La preuve que le CH obtient les faveurs célestes, le nouveau venu, Demidov, va porter le numéro 93. Ça vous dit quelque chose? Notre dernière Coupe Stanley, remportée le 9 juin 1993, lors d’une soirée mémorable au Forum. Ceux qui étaient là en parlent encore! Les autres n’étaient pas nés.
Des t-shirts «Demigod» circulent déjà à l’effigie du nouveau venu, qui devrait se démener sur la glace «comme un bon Dieu dans l’eau bénite».
Si c’est pas un signe, ça!
Une prière pour les séries
Ben oui, on connaît la game, on se fera pas de faux espoirs. On est encore loin de la coupe. Mais on peut prier. En bonne profane qui redécouvre sa foi en série, je dédie à cette équipe qui ne finira jamais de nous surprendre cette prière au ciel:
Notre Sainte-Flanelle, qui êtes bénie des cieux, que ton nom soit scandé dans tous les arénas, que ta présence en séries soit sanctifiée.
Que tes tirs atteignent toujours le filet adverse, donne-nous ce soir notre victoire si méritée, et pardonne-nous nos infidélités envers d’autres clubs, comme nous pardonnons à ceux qui ont douté de toi.
Ne nous laisse pas tomber en troisième période, et délivre-nous de la défaite.
Car c’est à toi qu’appartiennent la coupe, la gloire et notre amour inconditionnel, jusqu’à la dernière seconde et pour toujours.
Amen, go Habs go.