La psychose de la fin du monde

Richard Latendresse
La planète est aux prises, à grande échelle, avec un problème que les Américains connaissent uniquement sur leur territoire, mais de façon non moins tragique. Il y a, chaque jour, de plus en plus d’armes en circulation aux États-Unis et de moins en moins de garde-fous pour les encadrer.
Maintenant, transposez les pistolets et les fusils d’assaut en armes de destruction massive et l’absence de restrictions en suspension de traités internationaux et vous avez les éléments d’un désastre d’une ampleur à peine imaginable.
Au pire de la Guerre froide, alors qu’Américains et Soviétiques se méfiaient profondément les uns des autres, ils en étaient, malgré tout, venus à comprendre qu’il fallait calmer le jeu. Atténuer les tensions s’est fait en réduisant les arsenaux nucléaires qui auraient non seulement permis à chaque pays de détruire l’autre, mais aussi le reste de la planète dans le même bang.
Un traité a été signé par-ci, un autre par-là et progressivement, l’horloge de l’Apocalypse s’est mise à reculer de quelques courtes minutes, nous éloignant, pour un temps tout au moins, de la fin du monde. On en parlait littéralement ainsi.
LE SYSTÈME SE DÉSAGRÈGE
Plus tôt cette semaine, lors d’une conférence organisée par le département d’État, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, s’est inquiété de voir s’effilocher les derniers accords sur le contrôle des armements issus de la Guerre froide.
Nous nous trouvons à un carrefour affolant, constate-t-il, où se croisent l’effondrement de l’ordre international de contrôle des armements et la prolifération sans restriction des armes de destruction massive.
Jens Stoltenberg faisait notamment allusion à la suspension de la participation de la Russie, il y a deux mois, au traité « New Start », le dernier accord en vigueur entre Washington et Moscou sur la limitation des armes nucléaires.
La guerre en Ukraine et les références nullement nuancées du président russe à son arsenal nucléaire rendent d’autant plus angoissant son retrait du traité signé en 2010 par les présidents de l’époque, Barack Obama côté américain, et Dmitri Medvedev pour la Russie.
UNE PARANOÏA À CONTRÔLER
Le New York Times a ajouté, cette semaine, à la terreur ambiante en révélant que les Chinois s’apprêtaient à mettre en marche un nouveau réacteur nucléaire, utilisant de l’uranium hautement enrichi fourni par la Russie.
Moscou et Pékin, selon le grand quotidien new-yorkais, coopèrent désormais sur un projet qui facilitera leur propre modernisation nucléaire. En d’autres mots, le Pentagone croit que d’ici les années 2030, les États-Unis seront, pour la première fois de leur histoire, confrontés à deux puissances nucléaires majeures.
Et c’est sans compter le danger que constitue la dictature paranoïaque nord-coréenne et que pourrait prochainement constituer l’Iran avec son propre programme nucléaire.
Toutes comparaisons ne se valent pas, mais le rapprochement, dans ce cas-ci, est tout de même tentant : d’un État à l’autre, aux États-Unis, sauf pour quelques cas isolés, les limites à l’accès aux armes sautent les unes après les autres. Parallèlement, il se vend chaque semaine, chaque mois plus d’armes à feu.
Souhaitons que l’absence d’encadrement et de contraintes ne créera pas, à l’échelle planétaire, ces carnages qui ensanglantent jour après jour les États-Unis.
L’arsenal des puissances nucléaires
Estimation du nombre total d’ogives nucléaires détenues par pays en janvier 2022
- Russie : 5 977
- États-Unis : 5 428
- Chine : 350
- France : 290
- Royaume-Uni : 225
- Pakistan : 165
- Inde : 160
- Israël : 90
- Corée du Nord : 20
TOTAL : 12 705
Source : sipri