La paix intérieure de Koriass


Cédric Bélanger
La dernière fois que Koriass a lancé un album, il sortait de l’hôpital psychiatrique, et ses chansons, et toute sa tournée de promotion, tournaient autour de la façon dont il avait dompté ses démons. Quatre ans plus tard, le rappeur de Québec est ailleurs.
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«Je suis dans une paix intérieure que j’ai le goût d’entretenir», confie Emmanuel Dubois, alias Koriass, alias Korey Hart pour les intimes, que Le Journal a rencontré dans un café de la basse ville de Québec, en marge de la parution de son sixième album, Abri de fortune (pour fin du monde).
Koriass a connu la vie de débauche qui accompagne trop souvent la célébrité. Excès de substances et conflits interpersonnels ont marqué son parcours. Tout cela, dit-il, est derrière lui. Aucune rechute à signaler.
«J’ai envie d’être une meilleure personne, pas juste dans la vie de tous les jours, mais aussi dans ma création. Je ne parle pas seulement de la qualité de la musique, mais aussi d’être stimulé et inspiré. Je consomme beaucoup d’art. J’aime beaucoup la littérature, les arts visuels. Ça donne un petit boost à ma curiosité parce qu’avec le temps, on peut parfois s’essouffler et devenir paresseux.»
Urbain
Si la paresse était un piège qui le guettait, Koriass l’a habilement évité sur les 13 chansons de cet Abri de fortune (pour fin du monde) robuste, poétique et réfléchi.
Sa plume a toujours autant de punch et s’inspire de son passé turbulent sur des titres comme Matusalem et Cordes à linge, où il se demande s’il a fait une marche dans la rivière Saint-Charles pour illustrer son allure débraillée après une nuit blanche.
Son quotidien de gars de Québec lui fournit aussi du bon matériel.
«Sur l’album, il y a beaucoup de trucs qui parlent de la vie de tous les jours, la vie de quartier. Je me crée beaucoup de champs lexicaux et là-dedans, il y avait Lavoir St-Fidèle, Village des valeurs, Cordes à linge, beaucoup de références au thrift shopping. C’est très urbain, très ruelle.»
Sur Disparaître, il ose aborder sa peur de la mort.
«Il y a même, ajoute-t-il, une petite ambiance conspirationniste dans l’introduction où ça parle des reptiliens. Je ne sais pas jusqu’à quel point ça colle à moi. Disons que j’aime dire des affaires que je ne dirais pas dans la vie de tous les jours.»
La musique d’abord
Il aime aussi varier les ambiances. Ses mélodies au tempo plus enlevant que la moyenne des rappeurs québécois empruntent ça et là des éléments à la musique pop ou électronique.
Même s’il n’hésite pas à demander le soutien de gars talentueux comme Ruffsound ou Philippe Brault, Koriass se fait une fierté de créer lui-même ses beats. Dans le processus créatif, la musique précède d’ailleurs presque toujours les textes, lesquels lui demandent plus de jus.

Il en parle même sur la pièce Juste fais-le, où il s’implore de «passer de la parole au chef-d’œuvre.»
«Pour moi, écrire est un chiard, concède-t-il. Spontanément, j’écris des poèmes dans mon bloc-notes, mais finir des chansons est un travail difficile. C’est chargé ce que j’écris, il y a beaucoup de paroles. Mettons que je vois moins la composition musicale comme du travail que l’écriture.»
Une affaire de famille
Pour l’épauler, Koriass a pu compter sur ses proches. Sa conjointe, Valérie Bourget, artiste en art visuel, a pris en charge la direction artistique du projet tandis que sa fille, Sacha-East, 11 ans, fait des chœurs sur trois chansons.
«Elle suit des cours de chant et elle chante juste. Tout cela est venu d’elle. J’avais besoin de voix et je ne voulais pas engager une chanteuse. Je lui ai proposé d’essayer et si ça marche tant mieux.»
- Abri de fortune (pour fin du monde) est présentement sur le marché.
- Depuis mardi, Koriass forme un jury avec Souldia et Sarahmée à l’émission La fin des faibles, à Télé-Québec.
- Il est l’une des têtes d’affiche du festival Metro Metro, à Montréal, du 20 au 22 mai.