La nouvelle tentative de François Legault et de Christian Dubé pour dompter les médecins... laisse sceptique


Rémi Nadeau
On ne compte plus les fois où François Legault et son ministre de la Santé ont proclamé qu’ils mettraient les médecins au pas au moyen de menaces et de projets de loi. Alors qu’on ne l’attendait plus vraiment, Christian Dubé récidive avec une nouvelle tentative, et c’est peut-être la bonne, mais le scepticisme est de mise.
Pendant la campagne électorale de 2018, François Legault promettait d’aller chercher un milliard $ dans l’enveloppe de rémunération annuelle des médecins spécialistes, en faisant preuve de «courage».
Finalement, une entente complexe a été conclue visant à récupérer 450 millions $ en trois ans.
En 2021, le PM et le ministre avaient claironné qu’ils imposeraient des pénalités aux omnipraticiens les moins «productifs», pour atteindre l’engagement de fournir un médecin de famille à tous les Québécois.
Ils avaient ensuite changé leur fusil d’épaule en misant sur la négociation, et en demandant de rendre disponibles davantage de rendez-vous.
Tentative échouée
Il y a eu aussi la tentative de forcer les médecins spécialistes à fournir plus d’actes les soirs et les fins de semaine, laquelle se retrouvait dans le projet de loi «mammouth» de Christian Dubé en 2023.
Finalement, le ministre avait retiré cet élément de la loi, à cause d’une entente avec la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) pour «un meilleur accès».
Une entente de principe qui visait à... s’entendre plus tard!
Les spécialistes devaient, «en fonction des caractéristiques de chaque spécialité, combler certaines heures de consultation ou encore de prise en charge», indiquait-on dans le communiqué du 16 novembre 2023.
Mais voilà, il n’y a pas eu d’entente.
Donc, quand on regarde Christian Dubé présenter son nouveau projet de loi comme si c’était le plus beau jour de sa vie, on a l’impression d’avoir déjà assisté à ce moment.
Ça ne veut pas dire que le ministre n’a pas apporté de véritables changements sous son règne.
Récemment, il a fait adopter sa loi forçant les jeunes médecins à pratiquer pendant cinq ans dans le régime public.
Bonne volonté, mais des questions
Mais encore une fois dans la loi déposée jeudi, il y a des zones de brouillard.
Ainsi, une portion de 25% de la masse salariale des médecins serait liée à l’atteinte d’indicateurs de performance, mais, collectivement, dans un territoire donné.
Ce ne sont pas les médecins individuellement qui seraient pénalisés, mais tout le groupe territorial.
Qu’arriverait-il aux médecins qui travaillent moins?
On ne le sait pas.
Ce sont des éléments qui doivent être négociés, dit le ministre, renforçant encore les airs de déjà-vu.
Chose certaine, il y a encore 1,5 million de Québécois qui n’ont ni médecin de famille ni inscription à un GMF.
Il y a beaucoup trop de citoyens qui souffrent, en attente d’une chirurgie.
Après avoir résisté devant l’évidente nécessité de lancer des travaux à l’hôpital vétuste Maisonneuve-Rosemont, le gouvernement a trouvé de l’argent comme par magie cette semaine.
On sent qu’il y a un peu de poudre de perlimpinpin aussi dans cette sortie du gouvernement afin de faire entrer les médecins dans le rang.
Le «ça va brasser» de François Legault sonne comme une bande-annonce visant à mousser sa colonne vertébrale.
Peut-être en vue d’une élection.
Quoi qu’il en soit, il n’est pas trop tard pour le chef caquiste et Christian Dubé, s’ils veulent vraiment accomplir ce pour quoi ils ont déjà consenti pas mal d’efforts sans atteindre vraiment leur but.
Il leur reste un peu plus d’un an avant la fin de leur mandat.