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L'article provient de Le Journal de Québec
Société

La mission de l’entrepreneure en technologie Annick Charbonneau

Toujours avide de connaissances, Annick Charbonneau a profité de la pandémie pour faire un certificat en intelligence appliquée aux affaires de la MIT, ce qui lui a été utile dans la création du fonds Accelia.
Toujours avide de connaissances, Annick Charbonneau a profité de la pandémie pour faire un certificat en intelligence appliquée aux affaires de la MIT, ce qui lui a été utile dans la création du fonds Accelia. Photo Stevens LeBlanc
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Photo portrait de Karine Gagnon

Karine Gagnon

2023-06-06T04:00:00Z
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Pionnière au Québec parmi les entrepreneures et investisseures féminines en technologies, Annick Charbonneau a pu constater, au fil de son parcours, les nombreux obstacles qui se dressent devant les femmes dans ce domaine, et a décidé de contribuer à des solutions.

«Mes premiers souvenirs de Québec, ce sont des fonds de piscines», lance en riant Annick Charbonneau, devenue entrepreneure technologique en 2008.

Née à Montréal, elle est déménagée avec sa famille à Québec à l’âge de huit ans. Pendant plusieurs années, elle s’est adonnée à une grande passion, la nage synchronisée, appelée depuis la natation artistique. 

Elle a même fait partie de l’équipe nationale junior, et a intégré la première cohorte du premier programme sports-études au Québec, à l’école Cardinal-Roy.

«Une des grandes rencontres déterminantes pour moi, ce fut celle de Jojo Carrier, qui a été mon entraîneure et qui a eu une grande influence sur la femme d’affaires que j’allais devenir sans le savoir. J’ai beaucoup appris auprès de cette légende, beaucoup de leçons de vie, dit-elle, ajoutant qu’elles ont toujours gardé contact. 

Et j’ai appris aussi beaucoup dans le sport de compétition, où parfois on gagne, mais où parfois aussi il faut se relever après l’échec [...]. Ça te forme de façon admirable pour le futur.»

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Ouverture sur le monde

La natation artistique a donc occupé toute l’adolescence d’Annick Charbonneau. Puis à l’âge de 18 ans, comme son sport n’était pas accessible au niveau universitaire, elle a bifurqué vers la natation. 

Recrutée dans l’équipe de natation du Rouge et Or, elle est pressentie par l’Université Pepperdine en Californie, où elle fait un baccalauréat en affaires internationales, avec une session à Florence en Italie. 

En 2003, après avoir travaillé cinq ans à Montréal, elle décide de s’établir à San Francisco. «Là-bas, j’ai eu l’éveil de ce que c’était que la numérisation d’une société. C’était le début d’Amazon, de grandes entreprises qui allaient devenir des géants. Je me suis dit: tout est à faire.» 

Elle revient au Québec en 2004 et donne naissance à sa première fille – elle en a deux aujourd’hui. Puis survient ce qu’elle décrit comme la tempête parfaite. «L’entreprise où je travaillais m’a offert une promotion mais sans me donner le titre, alors j’ai dit non. C’était une question de principe. J’ai décidé de quitter mon emploi et j’ai fondé ma première entreprise.»

Chiccane.com, destinée au segment des designers de mode, devient l’une des premières plateformes de vente en ligne au Canada. Un important partenariat avec la Coupe Rogers de tennis à Montréal contribue à son succès. 

Puis Annick Charbonneau cofonde et dirige Soul.City, application qui vise la découverte de villes via une expérience technologique augmentée. Le tout est déployé dans une dizaine de villes en Amérique du Nord et en Europe, et reçoit le prix Coup de cœur d’Air Canada, en 2018.

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Constat frappant

Lorsqu’elle est devenue entrepreneure technologique, Annick Charbonneau a rapidement constaté le sous-financement des femmes qui démarrent des entreprises dans le domaine. Et en cherchant des données, sa plus grande surprise a été de constater que les femmes, qui étaient rares au début des années 2000 dans le domaine, sont de plus en plus en nombreuses.

Mais voilà, même si elles comptent en effet pour environ 30% des dirigeantes et fondatrices des entreprises technologiques au Québec, les femmes ne reçoivent que 2,5% des dollars en capital de risque. 

Le coupable? Les biais inconscients, selon ce qu’en disent les études. «On a tendance à investir dans ce qui nous ressemble, explique Annick Charbonneau. Or, quand on sait que 90% des décideurs en capital de risque et de croissance sont des hommes, après tu regardes les statistiques du financement des femmes et tu vois une corrélation.»

Ce constat mène Mme Charbonneau et sa collègue Christine Beaubien, elle aussi entrepreneure en technologie, à imaginer Accelia en 2021. Ce fonds de capital de risque priorise l’aide à des entreprises technologiques dirigées ou fondées par des femmes. 

«C’est beau de dire aux jeunes femmes entrepreneures “on va vous accompagner, on va vous ouvrir des réseaux”, mais si on veut que nos entreprises féminines soient capables de se démarquer sur les marchés globaux, il faut que ça commence avec un chèque.»

Après quelques refus et bien de la persévérance, le fonds de capital de risque est parvenu à lever la somme de 60 M$ et à regrouper une vingtaine de femmes d’affaires du Québec Inc., qui appuient l’initiative de différentes manières. 

La rencontre de Mme Charbonneau avec Monique Leroux, ex-pdg du Mouvement Desjardins et conseillère principale chez Fiera Capital, a aussi été déterminante. «Elle m’a ouvert des portes extraordinaires, qui ont fait en sorte qu’on a été capables d’aller chercher davantage de capital engagé pour notre fonds, mais ça lui a demandé de prendre des risques [...]. Ç'a tout changé.»

Annick Charbonneau se réjouit de constater que sa collègue et elle ont vu juste, car les femmes entrepreneures sont au rendez-vous. 

Pour le dernier trimestre de 2022, Accelia Capital a reçu pas moins de 122 dossiers. Il dispose d’un espace au Camp à Québec, où on retrouve de belles entreprises à financer, note l’entrepreneure, qui se réjouit de voir l’initiative porter fruit, et qui voit grand, très grand, pour la suite. 


Les grandes entrevues de Karine Gagnon feront relâche pour l’été.

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