La libération conditionnelle de nouveau refusée pour l’un des assassins d’Isabelle Bolduc
Guillaume Cotnoir-Lacroix
Plus de 29 ans après l’un des crimes les plus odieux de l’histoire de la province, l’un des deux meurtriers de la Sherbrookoise Isabelle Bolduc se voit de nouveau refuser une libération conditionnelle.
Jean-Paul Bainbridge, aujourd’hui âgé de 54 ans, s’était toutefois désisté de sa demande et ne s’est pas présenté devant la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) pour défendre ses arguments.
La Commission devait se pencher sur la possibilité d’une libération conditionnelle totale « prévue par la loi » dans le cas de Bainbridge, en plus d’une demande de semi-liberté en maison de transition qu’avait présentée le détenu. Début juin, le meurtrier avait toutefois informé la Commission qu’il renonçait à son audience. La CLCC a malgré tout rendu une décision et a refusé à Bainbridge autant la libération conditionnelle totale que la semi-liberté en maison de transition.

En compagnie de Marcel Blanchette et de Guy Labonté, en 1996, à Sherbrooke, Bainbridge avait enlevé, séquestré et agressé sexuellement Isabelle Bolduc. Après avoir infligé les pires sévices sexuels pendant une vingtaine d’heures à leur victime, Bainbridge et Blanchette l’avaient entraînée dans un boisé pour la tuer à coups de barre de fer.
Marcel Blanchette, aujourd’hui âgé de près de 80 ans, avait obtenu des permissions de sortie avec escorte en 2023, au grand dam de la famille d’Isabelle Bolduc. Guy Labonté, quant à lui, avait purgé une peine de six ans de prison pour séquestration après les événements.
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Le psychologue qui a procédé à la plus récente évaluation du risque du détenu, en février 2025, retient la présence d’un trouble de la personnalité antisociale, d’un trouble d’usage d’alcool en rémission en milieu contrôlé ainsi que d’un trouble d’usage du cannabis et des opiacés. Le résultat d’un test appelé «Guide d’évaluation des risques de violence» est aussi qualifié « d’accablant », Bainbridge se situant dans le 5% des détenus avec le risque de récidive violente le plus élevé, selon la décision de la Commission.
« Ainsi, en soupesant tous les éléments dans votre cas, la Commission ne peut pas faire abstraction qu’à l’heure actuelle, vous présentez, selon les résultats des échelles actuarielles, un risque de récidive au-dessus de la moyenne, ce qui à la lumière de vos délits exige une très grande prudence. Sans minimiser vos progrès et efforts, qui sont réels, la Commission constate, à la lumière de ce qui précède, que la mise en application des outils enseignés doit encore être travaillée », lit-on dans la décision de neuf pages.
La Commission note aussi que le projet de sortie de Bainbridge quant à la semi-liberté n’est « pas dénué de sens », mais ne s’en satisfait pas.
« Vous demeurez un individu qui présente un risque bien au-dessus de la moyenne, soit dans la catégorie de risque le plus élevé. La Commission estime que vous devez poursuivre votre processus de réinsertion sociale de manière graduelle par l’entremise d’une déclassification de votre cote de sécurité. La Commission vous encourage à poursuivre votre engagement correctionnel et à démontrer sur une période significative votre capacité à rester sobre et à demeurer éloigné de codétenus problématiques, tout en développant vos habiletés afin de diminuer votre risque de récidive », lit-on dans l’extrait de la décision de la Commission des libérations conditionnelles du Canada.
«Une victoire»
La tante d’Isabelle Bolduc, Josée Bolduc, a appris la nouvelle ce matin.
« J’avais le sourire aux lèvres. C’est quand même une victoire », a-t-elle exprimé en entrevue avec TVA Nouvelles.
Dans sa décision, la Commission note les impacts majeurs sur la vie des proches de la victime du crime commis par M. Bainbridge.
« C’est sûr que c’est difficile pour la famille, acquiesce Josée Bolduc. Isabelle, c’était mon amie aussi. Je ne la verrai plus, je ne la vois plus. Je ne ferai pas les activités que j’étais censée faire avec elle. Moi, la mienne ma sentence, elle est là. Elle est à vie, sans ma nièce », a-t-elle raconté, en retenant des larmes.

Josée Bolduc explique avoir appris il y a quelques mois que le détenu souhaitait obtenir une semi-liberté. Elle a écrit une lettre qui a été ajoutée au dossier de la CLCC et a appris quelques semaines plus tard que Jean-Paul Bainbridge se désistait de sa demande d’audience. Elle estime que sa lettre a pu avoir un impact.
Le père d’Isabelle, Marcel Bolduc, avait mené la bataille de front pendant de nombreuses années après le meurtre de sa fille. Il est décédé en novembre dernier. Sa sœur, Josée, sort de l’ombre 29 ans après l’événement. Elle avait passé la soirée avec la victime avant son enlèvement, en juin 1996.
« Cette cause-là m’a renforcie. Je n’avais pas l’intention de me battre jusqu’au bout. Là, j’ai pris la décision de me battre jusqu’au bout », a-t-elle lancé.
Josée Bolduc pourrait devoir mener un autre combat bientôt. Le deuxième meurtrier de sa nièce, Marcel Blanchette, pourrait bien demander une libération conditionnelle totale dans les prochains mois, selon ce qu’elle a appris.