Un drame historique entre la Conquête et l’invasion américaine sur la Côte-du-Sud raconté dans le nouveau roman de la journaliste Stéphanie Martin


Marie-France Bornais
Après avoir gagné le cœur de ses lectrices et de ses lecteurs avec les deux tomes de la série Le destin d’Aurélie Lafrenière et avec son roman Les grandes traversées, la journaliste et romancière Stéphanie Martin propose cette année Les étrangères de Saint-Michel. Cette nouvelle série historique se déroule sur la Côte-du-Sud et fait découvrir les défis et les passions de Marie, une femme qui a perdu son mari pendant la Conquête.

Partie de Nantes, Marie s’est installée à Saint-Michel-de-Bellechasse en 1755 avec son amoureux Gabriel. Ils filaient le parfait bonheur dans leur petite maison sur le bord du fleuve lorsque les Anglais ont débarqué. Marie a perdu l’homme de sa vie et a élevé seule sa fille Bénédicte, avec l’aide du curé, qui l’a prise sous son aile.
Quelques années plus tard, une période tourmentée s’annonce, et les rebelles américains font planer une nouvelle menace sur les habitants de la paisible bourgade.
Un ouvrage de référence
Stéphanie Martin, romancière passionnée d’histoire, s’est intéressée à Saint-Michel-de-Bellechasse en lisant un ouvrage de référence. «Je pige souvent mes idées de faits historiques réels, qui sont bien documentés. Dans le cas actuel, c’est vraiment un livre écrit par l’historien-géographe Gaston Cadrin, qui habite sur la Côte-du-Sud et qui a des ancêtres à Saint-Michel-de-Bellechasse», explique-t-elle en entrevue.
«C’est un ouvrage historique qui s’appelle Les excommuniés de Saint-Michel. Il relate toute cette période de l’été 1759 et l’invasion américaine en 1775. C’est une bible d’information que je mentionne dans mes notes d’auteure, à la fin du tome 1, et qui m’a vraiment servi de base historique. Après, j’ai campé mes personnages dans cet environnement historique que Gaston Cadrin décrivait très précisément.»
Contre la volonté de l’Église
Des excommunications? Qu’est-ce qui s’est passé sur la Côte-du-Sud? «Des gens ont appuyé les rebelles américains contre la volonté de l’Église de l’époque», explique la romancière.
«L’Église a combattu les Anglais quand ils sont arrivés en 1759, mais une fois que le pouvoir britannique s’est établi, l’Église s’est rangée derrière l’autorité anglaise. Lors de l’invasion américaine, l’Église prêchait la loyauté au Roi et faisait de l’urticaire juste à penser que les habitants puissent avoir des intérêts pour la cause américaine.»
«Tous ceux qui, de près ou de loin, étaient soupçonnés d’être de connivence avec les “Bostonnais” étaient très mal vus par l’Église. Au bout de l’invasion ratée, il y a eu une espèce de chasse aux sorcières qui s’est effectuée sur la Côte-du-Sud, à l’île d’Orléans et un peu partout dans les paroisses autour de Québec, pour punir les gens qui s’étaient détournés de la bonne voie.»
Les représailles ont été sévères. «Certaines personnes ont été excommuniées et ont dû être enterrées à l’extérieur du village. C’est le cas d’un des ancêtres de Gaston Cadrin, qui s’appelait Pierre Cadrin.»
Le sort des femmes
Marie, l’héroïne des Étrangères de Saint-Michel, a une vie chargée de drames. «On parle beaucoup de la bataille des plaines d’Abraham, mais tout au long de l’été 1759, la dévastation s’est étendue un peu partout sur la Côte-du-Sud et dans les paroisses avoisinantes. Les Anglais faisaient des rafles, brûlaient les maisons, détruisaient les champs, les cultures, volaient le bétail. Évidemment, le viol, c’est une arme de guerre. Ça s’est passé dans nos villages, près de Québec.»
Elle précise. «C’est pas quelque chose d’inusité, malheureusement: les femmes en ont subi énormément les conséquences. Elles ont été déplacées, violentées, privées de plein de choses de leur quotidien dans ce bouleversement.»
Stéphanie Martin voulait raconter le destin d’une femme dans la quarantaine. «Mes héroïnes, jusqu’à date, avaient été plus jeunes. Je voulais explorer le destin d’une femme mature qui a eu à vivre à travers plusieurs événements bouleversants.»
Les étrangères de Saint-Michel, tome 1: Marie
Stéphanie Martin
Saint-Jean
Environ 400 pages
▶ En librairie le 5 février.
- Stéphanie Martin est journaliste au Journal de Québec depuis plusieurs années et vit à Québec depuis 20 ans.
- Elle est originaire de la vallée de La Matapédia.
- Après sa saga en deux tomes Le destin d’Aurélie Lafrenière (2020), elle a écrit Les grandes traversées (2022), un hommage aux Îles-de-la-Madeleine, où elle séjourne régulièrement.
- Le tome 2 sortira le 11 juin.
«Marie voit des villageois qu’elle côtoie depuis des lustres. Elle les connaît tous par leur prénom, elle sait l’histoire de leur clan. Eux aussi s’imaginent tout savoir de Marie et Bénédicte, les deux dames Chamberland. Dans un petit village comme celui de Saint-Michel, les joies et les peines d’une famille déteignent sur toute la communauté, et les secrets sont rares. Pour Marie, il est fascinant de constater qu’on puisse vivre en si grande proximité avec des voisins et se sentir pourtant comme une étrangère parmi eux.»
–Stéphanie Martin, Les étrangères de Saint-Michel, tome 1: Marie, Saint-Jean
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