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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

La guerre de l’audiovisuel avec les États-Unis est lancée

Jon Voight
Jon Voight Photo Getty Images via AFP
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Photo portrait de Guy Fournier

Guy Fournier

2025-05-28T21:00:00Z
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Jon Voight, oscarisé en 1978 pour son rôle de paraplégique dans le film Coming Home, n’entend pas revenir handicapé de la guerre de l’audiovisuel que lance Donald Trump.

Le célèbre acteur, que Trump a nommé pour mener la charge contre le Canada, qu’il juge responsable du déclin de Hollywood, propose à son président d’utiliser contre nous les mêmes armes que nous employons contre les États-Unis.

La Maison-Blanche entend donc consentir à ses producteurs des crédits d’impôt de 10% durant cinq ans, en plus de ceux qu’ils peuvent déjà toucher dans tout État américain. Washington ajoutera même un crédit supplémentaire de 5% à 10% si le film ou la série est produit dans une région défavorisée.

Washington accordera aussi des crédits d’impôt pour la construction ou la rénovation de studios et de salles de cinéma. On instaurera aussi des traités de coproduction, une formule boudée jusqu’ici par les Américains. Jon Voight veut s’assurer que les producteurs indépendants conserveront la propriété intellectuelle de leurs œuvres et qu’ils recevront une juste rémunération des géants du numérique... dont il se méfie lui aussi!

La manne américaine

Ce sont les mêmes mesures qui nous ont permis de produire chez nous autant de films et de séries américaines: pour 4,46 milliards $ l’an dernier, créant l’équivalent de 86 000 emplois. C’est la moitié de tous nos emplois en audiovisuel. Des 442 productions réalisées dans nos studios, 384 étaient américaines. Dans l’espoir de donner le coup de grâce à l’exil des productions américaines, Trump imposera aussi des tarifs de 120% sur la valeur de tous les services que les producteurs américains auraient pu se procurer dans leur propre pays.

Nos ministres de la culture (d’Ottawa ou des provinces) ne cessent de répéter que les États-Unis ne peuvent imposer de tarifs sur les films et les séries en raison de la clause d’exception culturelle que comporte l’ACEUM (l’Accord Canada–États-Unis–Mexique). Mais en quoi la production de films et de séries AMÉRICAINES chez nous menace-t-elle notre culture? C’est uniquement une question de gros sous!

Une division irrémédiable

Les productions américaines ont suscité la construction d’immenses studios que n’auraient pu rentabiliser les productions canadiennes seulement. Elles n’en bénéficient pas moins, toutefois. Les productions américaines ont aussi permis de former des artisans et des techniciens extrêmement qualifiés dont l’expertise sert bien nos propres productions. Malheureusement, les productions américaines créent aussi une dichotomie qui divise irrémédiablement notre industrie entre ceux qui gagnent leur vie grâce à celles-ci et les autres.

Pendant ce temps, les grandes plateformes comme Netflix, Disney et compagnie mobilisent l’attention des Canadiens et des Québécois, réduisant comme peau de chagrin l’auditoire de nos séries et, partant, les revenus publicitaires de nos réseaux. Jusqu’à maintenant, des streamers insatiables n’ont encore rien versé. Les menaces de tarifs de Donald Trump pourraient bien servir de monnaie d’échange, les dispensant à jamais de toute contribution...

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