La glace se fait attendre dans l’estuaire du Saint-Laurent
Vanessa Limoges | TVA Nouvelles
Les navires peuvent naviguer aisément dans l’estuaire du Saint-Laurent ces jours-ci puisque la glace n’a pas encore pris sa place, un retard de plus en plus fréquent qui a son lot de conséquences.
«Ça ne nous arrive pratiquement jamais d’avoir si peu ou une absence totale de glace à cette date-ci», a souligné Émilien Pelletier, professeur émérite à l’Institut des sciences de la mer de Rimouski.
«Au niveau de la formation de la glace, on observe un retard en effet, mais il faut toutefois souligner qu’on est quand même au tout début de la période de formation rapide de la glace», a indiqué la météorologue chez Environnement et Changement climatique Canada, Marie-Ève Giguère.
Les températures plus élevées des derniers mois, le récent redoux, les forts vents du 23 décembre et les vagues qui les ont accompagnées, tous ces facteurs sont en cause.
«Décembre, novembre, octobre, septembre, ce sont tous des mois où les températures étaient un peu au-dessus de la normale alors oui ça vient jouer», a spécifié Mme Giguère.
L’arrivée tardive des glaces est observée plus fréquemment depuis quelques décennies.
«On est dans un processus évidemment impossible à nier. Un processus de changement, de bouleversement, de réchauffement climatique. C’est clair que ce phénomène que l’on voit aujourd’hui fait partie d’un ensemble», a expliqué M. Pelletier.
«Selon les données, dans le milieu des années 90, on a eu une grosse chute au niveau de la quantité du couvert de glace et c’est resté bas depuis ce temps-là», a indiqué Mme Giguère.
L’absence de ce couvert prive les berges de leur protection habituelle, ce qui accentue l’érosion côtière.
«Les vagues atteignent directement la côte comme si on était en plein été. La glace ne protège pas du tout la côte, donc si on avait une tempête on est exposé comme en été alors ça, c’est plus négatif», a expliqué le chercheur Émilien Pelletier.
Les eaux de l’estuaire se réchauffent
«C’est dans les eaux profondes de l’estuaire du Saint-Laurent que les changements sont les plus importants. On a une différence de 3 à 4 degrés de plus qu’il y a 20-30 ans, ce qui est énorme !», a lancé M. Pelletier.
Plus l’eau est chaude, moins elle est riche en oxygène, ce qui bouleverse la vie marine.
«La perte d’oxygène c’est dramatique. On va finir par avoir des zones où il n’y a plus d’oxygène du tout, ce qui va modifier complètement l’écosystème dans le fond».
Difficile de prédire ce qu’il en sera pour le reste de la saison hivernale toutefois, à court terme, on prévoit des températures plus froides, ce qui pourrait permettre à la glace de prendre lentement sa place.