La gaffe présidentielle de trop: la fois où Gerald Ford a dit des âneries sur la politique étrangère et que ça lui a coûté l’élection

Martin Landry
Il y a de ces maladresses politiques qui marquent la mémoire collective. Des gaffes qui peuvent déstabiliser ou faire tomber un gouvernement. Celle de l’administration Trump, qui a dévoilé le plan d’attaque contre les Houthis à un journaliste, n’est pas banale.
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On se souviendra que le scandale de l’hôtel Watergate a conduit à la démission du président Nixon et que le Monicagate a failli conduire à la destitution du président Clinton.
Une autre gaffe présidentielle, souvent oubliée mais drôlement plus spectaculaire, est celle du président Gerald Ford, qui a déclaré une ânerie en plein débat des chefs. La connaissez-vous?
CONTEXTE HISTORIQUE
Il faut savoir que Gerald Ford était un politicien aguerri, mais qu’il n’était pas prédestiné à la présidence américaine. Puis, à la suite de la démission surprise du vice-président Spiro Agnew en décembre 1973, il est nommé en remplacement pour seconder le président Richard Nixon. Mais, coup de théâtre, l’année suivante, Nixon démissionne à cause du scandale du Watergate et, de facto, Ford devient président des États-Unis.
Il s’assoit dans le siège présidentiel à un moment où personne ne voulait l’emploi. Il sera un président courageux, plutôt combatif, d’un optimisme naturel, mais il n’aura vraiment pas l’étoffe d’un Abraham Lincoln. Il était perçu comme un bon gars sympathique, un peu simple et surtout remarquablement maladroit.

LA GAFFE DE TROP
Nous sommes en octobre 1976, en pleine campagne présidentielle américaine. Durant un débat face à Jimmy Carter, le président Gerald Ford déclare:
«L’Europe de l’Est n’est pas et ne sera jamais sous la domination soviétique sous une administration Ford.»
Une gaffe plutôt malhabile, certes, surtout que son adversaire, Jimmy Carter, martelait déjà l’idée que Ford n’avait pas vraiment de stratégie en matière de politique étrangère. L’équipe électorale de Carter sous-entendait même que le président ne connaissait rien aux questions internationales et que tout était laissé entre les mains du stratège Henry Kissinger.
Au lendemain de cette déclaration malheureuse, l’opinion publique se laissera convaincre par cette rhétorique de Jimmy Carter. Plus personne ne veut écouter les tentatives d’explication du président. Il n’en fallait pas plus pour que des millions d’Américains perçoivent le président en fonction comme un opportuniste incompétent, qui occupe le Bureau ovale uniquement à cause de la démission de Nixon. En quelques jours, Gerald Ford deviendra la risée de l’Amérique.
Une fois cette étiquette de gaffeur accolée, chaque petite maladresse est montée en épingle par les médias. Ils le mettent à l’avant-scène quand il tombe en descendant d’Air Force One ou quand il se cogne la tête en sortant d’un hélicoptère, plutôt que lorsqu’il expose ses stratégies pour relancer l’économie.
Bref, la campagne devient une vraie parodie; et Gerald Ford, une tête de Turc dans Saturday Night Live.
Ainsi, une maladresse, une de trop, a fait passer le président américain pour un homme complètement bête. Comme dirait Manon Massé: il ne passait pas pour «le pogo le plus décongelé de la boîte».
Bon... Difficile de prédire si la gaffe de l’administration Trump affectera l’opinion publique, mais il n’y a pas si longtemps, une histoire comme celle-là aurait été suffisante pour la discréditer complètement, voire entraîner la destitution du président. Mais ça, c’était avant l’arrivée d’un milliardaire téflon à Washington.