La Fonderie Horne de Glencore a diminué ses émissions d'arsenic mais augmenté celles de plomb en 2022
Annabelle Blais | Bureau d'enquête
La Fonderie Horne a recraché beaucoup plus de plomb dans l’atmosphère en 2022: en un an, ses rejets ont explosé de plus 64%.
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L'usine de Glencore à Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue, a rejeté dans l'air 89 tonnes de cette substance toxique l'an dernier, contre 54 tonnes en 2021, selon les données de l’Inventaire national de rejets polluants qui viennent d’être rendues publiques.
Ce sont les plus importantes émissions de plomb pour la fonderie depuis 2002.
Quant à ses rejets d’arsenic, qui ont fait la manchette l'an dernier, ils sont en importante diminution par rapport à 2021 (60%), mais l’usine demeure tout de même celle qui émet le plus d’arsenic dans l’air au pays, et de loin.
En réalité, il s’agit d’un retour à la normale pour l’usine de Glencore. «Les émissions totales sont similaires aux années antérieures», souligne le porte-parole Simon Landry.
La fonderie a ainsi émis quelque 15 tonnes d’arsenic en 2022 contre 36 tonnes l’année précédente, une valeur qui était alors anormalement élevée. « Deux échantillons présentaient des valeurs au-dessus de la normale, en raison de la contamination de la sonde », nous expliquait une autre porte-parole, Cindy Caouette, en mai dernier.
- Écoutez la réaction de Émilie Robert, biologiste et porte-parole du mouvement à Mères au front à Rouyn-Noranda au dossier via QUB radio :
Dangereux pour les jeunes enfants
Glencore n’était pas en mesure de fournir une explication concernant la hausse des émissions de plomb avant le 8 août en raison des vacances de la personne experte aux émissions atmosphériques pour l’entreprise.
La Direction de la santé publique de l’Abitibi-Témiscamingue a notamment abordé la question du plomb dans l'air dans le cadre de son étude de biosurveillance de 2019 qui s’est intéressée à l’impact de la fonderie dans le quartier Notre-Dame (QND) à Rouyn-Noranda.
«Il est reconnu qu’une exposition à l’arsenic et au plomb peut causer des troubles neurodéveloppementaux, spécialement chez les jeunes enfants», peut-on lire.
«Les concentrations atmosphériques d’arsenic, de plomb et de cadmium mesurées dans l’air ambiant du QND excèdent les valeurs seuils québécoises prescrites par le [ministère]», rappelait l’étude.
La toxicité de l’arsenic est d’ailleurs accentuée par ses interactions avec le plomb et le cadmium, est-il écrit.
- Écoutez l'entrevue de Rémi Villemure avec Diane Dallaire mairesse de Rouyn-Noranda via QUB radio :
Des sommets canadiens
La Fonderie Horne de Glencore à Rouyn-Noranda a été le plus gros émetteur canadien de plusieurs contaminants toxiques dans l’air en 2022, soit l’arsenic, le plomb, l’argent, le fluor ainsi que le sélénium.
En tout, la fonderie a déclaré des rejets de 23 polluants différents, en 2022.
«Depuis les années 1980 et plus particulièrement depuis les années 1990, on insiste pour qu’on regarde les émissions de façon globale et pas une à une, souligne André Belisle, président de l’Association québécoise pour la lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA). Il n’y a pas que l’arsenic, comme problème!»
En vertu de sa nouvelle attestation ministérielle, la fonderie devra réduire la moyenne annuelle de ses rejets d’arsenic. En 2022, sa moyenne était de 73 ng/m3 (nanogramme par mètre cube), soit 24 fois la norme québécoise. Elle devra toutefois réduire ses émissions d’arsenic à 15 ng/m3 d’ici 2027.
«La moyenne en date du 12 avril était de 28,55 ng/m3», a indiqué le porte-parole Simon Landry. Il s’agit de la mesure à la station légale et l’entreprise a maintenant l’obligation de rendre publiques ses données, ce qu’elle fait depuis quelques semaines.
Elle devra aussi réduire ses rejets de plomb et de cadmium pour se conformer aux normes québécoises d’ici 2027. Elle devra alors respecter une moyenne de 100 ng/m3 pour le plomb (contre 450 ng/m3 en 2023). Le 12 avril, sa moyenne était de 231,30 ng/m3.
La moyenne journalière du 7 mars révèle toutefois des rejets problématiques de 6770 ng/m3 de plomb et de 1196 ng/m3 d’arsenic. À partir de 2027, l'entreprise devra d'ailleurs se conformer à des normes quotidiennes.