La famille de Jacques Teasdale compte poursuivre le CHU de Québec pour près d’1 M$

La famille de Jacques Teasdale, décédé d’un cancer du poumon qui aurait pu être évité, veut engager une poursuite de 960 000$, notamment contre le CHU de Québec et sa médecin de famille, pour avoir «oublié» d’effectuer d’importants suivis médicaux.

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«Mon père, il est mort et il a souffert, il ne faut pas oublier ce bout-là», affirme le fils du défunt, Olivier Teasdale, qui a envoyé une mise en demeure en ce sens au CHU de Québec, le 10 octobre dernier.

Celle-ci vise, outre le CHU de Québec, le Dr Pierre D'Amours, chef pneumologue du CHU, la médecin de famille de M. Teasdale, Véronique Fournier, et son infirmière praticienne Amélie Bouchard, qui suivaient l'homme de 74 ans à la clinique médicale de Loretteville.

Selon la famille, une meilleure prise en charge médicale dès sa première visite à l’urgence en décembre 2020 – où une tomodensitométrie thoracique (TACO) a révélé la présence de cancer – aurait pu permettre à l’ancien conseiller municipal et ancien journaliste de TVA de vivre «encore plusieurs années».

La radiologiste qui était chargée d’analyser les résultats écrit en effet dans son rapport que M. Teasdale présente un «adénocarcinome in situ en progression», soit un stade précoce de cancer.

Rendez-vous manquant

Ce rapport fut notamment envoyé au D^r Pierre D’Amours, qui, quelques semaines plus tard, a suggéré à M. Teasdale d’effectuer un suivi dans un an en l’informant qu’il avait un «nodule» au poumon.

«Jacques se disait: "Ce n’est pas trop grave, je vais attendre mon rendez-vous". Mais, selon l’oncologue de mon père à la fin, ça aurait nécessité un suivi dans les trois mois», déplore Olivier.

Mais, ce suivi n’aura jamais lieu, car le pneumologue n’en a pas fait la requête, révèle son fils après avoir effectué des demandes d’accès à l’information dans le dossier médical de son père.

C’est d’ailleurs ce dernier qui a demandé à son fils de documenter les nombreux manquements commis à son égard.

«Son esprit journaliste est sorti. [...] Encore la veille de son décès, il le répétait: "Il y a des fautifs dans mon dossier et je ne veux pas être oublié, tout comme je ne veux pas qu’il y en ait d’autres comme moi"», explique son fils, qui a multiplié les enregistrements et les photos afin de préparer cette éventuelle poursuite.

Faute majeure

Jacques Teasdale a lui-même rappelé à la centrale de rendez-vous du CHU, en janvier 2022, pour s’informer de son rendez-vous. Il n’a jamais eu de retour, soutient son fils.

«Il s’agit d’une faute majeure du D^r D’Amours, lequel était tenu à cet égard à une obligation de résultat», lit-on dans la mise en demeure.

De 2020 à 2024, M. Teasdale a par ailleurs été hospitalisé à cinq reprises pour des problèmes respiratoires, dans trois urgences du CHU de Québec. Chaque fois, il en ressortait avec un diagnostic de bronchite.

Il a aussi entre-temps consulté sa médecin de famille et l’infirmière praticienne à cinq reprises pendant la même période. Cette dernière avait aussi reçu les rapports d’examens effectués au CHU, sans que des tests plus poussés ne soient exigés, critique M. Teasdale.

«Il voulait se battre»

Jacques Teasdale s’est éteint le 16 juillet dernier, des suites d’un cancer du poumon de stade IV, dont il avait reçu un diagnostic à peine deux mois auparavant.

«Il voulait se battre, mais le combat était perdu d’avance. On n’était aucunement à forces égales contre la maladie, qui avait pris trop d’avance», déplore son fils, qui souhaite maintenant rendre justice à son père.

Contacté par Le Journal, le CHU de Québec n'a pas commenté l'affaire. 

La mise en demeure établit que les personnes visées ont jusqu'au 26 octobre pour y répondre, sans quoi, une poursuite judiciaire pourrait être déposée au palais de justice de Québec, soutient l'avocate de la famille, Me Florence Morin.

Extraits de la mise en demeure

• «Le CHU et ses préposés n’ont assuré aucune continuité, aucune cohérence, aucune suite logique et aucun suivi quant aux soins administrés à notre client traitant chacune de ses hospitalisations en vase clos et hermétique.»
• «La D^re Fournier [médecin de famille] et M^me Bouchard [infirmière praticienne] ont été spécifiquement avisées par notre client, en janvier 2023, soit plus d’un an après la date convenue pour le TACO, qu’il n’avait pas réussi à prendre rendez-vous avec le pneumologue malgré ses tentatives. Cette information, à tout le moins, aurait dû les alarmer et les pousser à intervenir auprès du médecin spécialiste.»
• «La négligence du D^r D’Amours, du CHU et de ses préposés, de D^re Fournier et de M^me Bouchard, l’aura fait souffrir indûment et lui aura finalement, coûté la vie.»
• «En plus d’avoir été injustement victime d’une erreur médicale qui lui aura coûté la vie, notre client aura également été victime d’une affligeante déshumanisation des soins et des services, l’empêchant de vivre ses derniers moments dans le confort et la dignité.»