La crise climatique expliquée

Jacques Lanctôt
L’an 2050, c’est demain. On peut donc raisonnablement se poser la question : quel temps fera-t-il en 2050 ? Même si plusieurs d’entre nous n’y seront plus, nos enfants, eux, devront vivre avec notre héritage et nous devons nous en préoccuper.
Avec sa formation en mathématiques appliquées, en physique et en informatique, Gaëtan Lafrance est un pionnier dans le domaine de l’intelligence artificielle. C’est ainsi que grâce à des chercheurs scientifiques de pointe comme lui, on peut prévoir le temps qu’il fera demain. Bien sûr, il s’agit d’approximations, précise le chercheur.
Lafrance n’est pas un climatosceptique, loin de là, mais il veut démontrer, dans cet ouvrage, que la plus grande incertitude règne autour des différents modèles climatiques qui prévoient des hausses de température entre 1,2 % et 3 %. « Où se situe la vérité ? » s’interroge-t-il.
Pour éveiller notre conscience, pour nous alarmer, les écologistes nous ont proposé « des scénarios du pire ». Les gouvernements, comme ceux de Joe Biden et de Justin Trudeau, se sont mis de la partie, en proposant des réductions des émissions de GES de 50 % et de 45 % d’ici 2030. Mission impossible, dit le chercheur.
« Dans les 16 dernières années, le bilan des émissions pour ces deux pays est resté à peu près stable. Au Canada, leur courbe globale demeure ascendante depuis 1990. Ce qui revient en somme à affirmer une volonté tout en laissant prospérer son contraire. »
Or, carboneutre signifie zéro émission de GES ou sa compensation « par des mesures comme la plantation d’arbres ou l’utilisation de technologies qui peuvent capter le carbone ». On est loin du compte.
Et le chercheur se demande à quel moment exactement nous vivrons dans un univers sans pétrole et sans combustibles fossiles. Somme-nous à prêts à changer nos habitudes de vie et de consommation pour y arriver ?
Selon le rapport de l’Agence internationale de l’énergie, publié en mai 2021, « pour atteindre la carboneutralité en 2050, l’économie mondiale devra nécessairement produire et consommer 75 % moins de pétrole qu’aujourd’hui et 90 % moins de charbon ». Cela signifie plus d’éolien et de solaire, des énergies qui exigent beaucoup d’espace et de visibilité, d’hydrogène, de nucléaire qui rebute de nombreux pays occidentaux, et de bioénergie, dont la production devra augmenter de 60 %.
Pas de retour en arrière
Tout cela ne se fera pas de gaieté de cœur. Si des gens rouspétaient pendant la pandémie en raison de l’imposition de mesures contraignantes, imaginez ce qu’il en sera avec les programmes verts – « des catalogues très épais de mesures extrêmement variées qui concernent un nombre considérable d’acteurs » –, qui obligeront les gouvernements à imposer des mesures encore plus strictes, dit-il. Il ne faut pas oublier que l’activité humaine est la principale cause des changements climatiques. Mais personne n’est prêt à abandonner son confort.
Lafrance rappelle comment de 30 ans en 30 ans, les menaces d’apocalypse se répètent, sous de nouveaux vocables, avec de nouveaux rapports tous plus inquiétants les uns que les autres et de nouveaux lanceurs d’alerte, comme Greta Thunberg, Dominic Champagne ou « autres apôtres de l’urgence climatique ».
Une chose est certaine, précise-t-il : on ne peut revenir en arrière ni vivre comme on le faisait au 19e siècle.
Ce qu’il faut retenir, c’est qu’un grand nombre d’experts en climatologie, réunis sous diverses organisations scientifiques, travaillent à des scénarios pour prédire l’avenir d’ici 2100.
« Les scientifiques s’entendent pour dire que, au milieu du xxie siècle, l’élévation moyenne de température sera au minimum de 1,6 °C par rapport à l’ère préindustrielle. » Plus de chaleur signifie plus d’eau à certains endroits et de la sécheresse ailleurs. Des incendies, des canicules, des pluies torrentielles, des ouragans. La boule de cristal n’est pas infaillible et l’on se donne une bonne marge de manœuvre, car « l’histoire des 150 dernières années est trop limitée pour en déduire un environnement climatique que le monde moderne n’a pas connu ».
Les propos du chercheur Gaëtan Lafrance ont de quoi nous rassurer. Loin de banaliser nos inquiétudes justifiées, il nous dit d’être optimistes tout en étant vigilants, car « l’adaptation aux changements de la nature fait partie des qualités intrinsèques de l’être humain ».
À lire aussi
PLANÈTE EN ÉBULLITION/ÉCOLOGIE, FÉMINISME ET RESPONSABILITÉ

Voici une tout autre approche pour sauver la planète que celle des chercheurs scientifiques. Une méthode radicale qui peut aller jusqu’à perforer un pipeline. Une révolution planétaire – « plurielle, éclatée, protéiforme, éclectique, non dogmatique » – est en cours, dit l’auteure, elle est surtout l’œuvre de femmes et de jeunes et touche des domaines les plus variés : « le mouvement des droits civiques, la révolution féministe, les désordres écologiques, le dérèglement climatique, mais aussi les révolutions technologiques ». Par contre, mettre sur un piédestal Valérie Plante, Naomi Klein, Anne Hidalgo, Kamala Harris, pour le simple fait d’être femmes, ne prouve surtout pas que ladite révolution apporte un vent de changement. Pourquoi pas y ajouter Margaret Tatcher tant qu’à y être ? Contrairement au chercheur Lafrance, qui se montre plutôt optimiste et réaliste, la professeure Hansen-Løve fait appel à des scénarios catastrophiques concoctés par le National Intelligence Council (« l’équipe de chercheurs responsables de la CIA »). Je préfère la vision scientifique de Lafrance, qui ne croit pas que « l’accélération des révolutions technologiques et la multiplication des innovations scientifiques seront déstabilisantes pour tous ».
D’UNE NÉGRITUDE À L’AUTRE/AIMÉ CÉSAIRE ET LE QUÉBEC

Voici un ouvrage qui ne sera sans doute pas mis au programme des livres à lire dans nos bonnes universités repaires de « woke », même s’il a été publié par des presses universitaires, parce qu’il parle de Nègre et de négritude, concept inventé par le poète martiniquais Aimé Césaire à qui est consacré cet ouvrage. Césaire, comme Albert Memmi et son fameux Portrait du colonisé, a entretenu des liens étroits avec certains de nos plus grands poètes, comme Gaston Miron, Paul Chamberland et Yves Préfontaine, entre autres. Découvrant le non moins fameux Nègres blancs d’Amérique, de Pierre Vallières, Césaire, « l’écrivain des Caraïbes et de l’Afrique qui a eu le plus d’influence au Québec », s’exclamera : « Les Québécois ont compris que la négritude n’est pas une affaire de peau et de couleur. » À elle seule, l’imposante introduction, qui porte sur les débats et controverses autour du « mot en N », vaut le détour. Un livre à haut risque.