La COVID longue guette toujours les Québécois, préviennent des experts
Ils sont déjà débordés de patients et ils craignent que d’autres cas s’ajoutent cet automne


Hugo Duchaine
La COVID longue guette toujours les Québécois qui contractent le virus, préviennent des experts, déjà débordés par le nombre de patients à soigner et qui craignent que d’autres cas s’ajoutent cet automne.
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« Je pense qu’on va encore avoir de nouveaux cas de COVID longue, car le virus est encore là. Et le risque n’est pas à zéro », souffle la Dre Emilia Liana Falcone, directrice de la clinique de recherche Post-COVID-19 à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM).
Cette dernière fait partie de la centaine de scientifiques canadiens, qui étaient réunis à Montréal cette semaine pour prendre part au premier symposium au pays sur la COVID longue.
Encore méconnue et inexpliquée, la COVID longue touche environ 10 à 20 % des personnes infectées par le virus de la COVID-19. Elle est marquée par divers symptômes qui persistent plus de trois mois après l’infection, comme une grande fatigue, de l’essoufflement, des trous de mémoire ou diverses douleurs.
Même si la vaccination a réduit les risques de garder des séquelles à long terme, les experts continuent de voir des malades. Et après plus de trois ans, les symptômes ne s’estompent pas, ont-ils relaté.
Débordés
D’ailleurs, les listes d’attente sont longues, a soutenu le microbiologiste-infectiologue Alain Piché, qui dirige la clinique spécialisée pour les affections post-COVID-19 du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS).
Avec seulement une infirmière et lui, ils prennent en charge plus de 400 patients, et leur liste d’attente en contient autant. Il remplit de 15 à 20 formulaires d’invalidité par semaine, un travail qu’il n’avait jamais eu à faire auparavant comme infectiologue.
« On continue d’aller de vague en vague, ça ne disparaît pas », renchérit le cardiologue albertain, Gavin Oudit.
Plus vite
Même si les Québécois se disent fatigués d’entendre parler de la COVID-19, le sujet reste essentiel, plaide Carole Jabet, directrice scientifique des Fonds de recherche du Québec-Santé (FRQS).

« Il va falloir que ce soit rapide », dit-elle à propos de la recherche sur la COVID longue, car les gens souffrent et les impacts sur la société sont nombreux. Jusqu’à 15 % d’entre eux se disent incapables de retourner au travail, par exemple.
Et si tout découlait de l’intestin ?
Les personnes atteintes de COVID longue auraient l’intestin plus perméable, causant des fuites de particules microbiennes microscopiques pouvant dérégler divers organes.
La Dre Emilia Liana Falcone de l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) étudie le rôle de l’intestin dans la COVID longue, sachant que cet organe a un lien avec le cerveau, les poumons et le système immunitaire.
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Le microbiote des malades, avec des atteintes neurologiques comme la fatigue ou le brouillard mental, peut causer ces mêmes symptômes lorsque transféré à des souris, qui avaient auparavant une flore intestinale vierge, a souligné la Dre Falcone.
Elle cherche désormais à savoir si l’inflammation de l’intestin qu’entraîne le virus perdure ou si un réservoir de la maladie s’y retrouve, par exemple.
La taurine comme remède ?
Le cardiologue et professeur à l’Université d’Alberta Dr Gavin Oudit espère que la taurine pourrait être un remède facilement accessible et peu coûteux contre la COVID longue.

La taurine est un acide aminé présent dans le corps humain. Et ses premières recherches indiquent les malades aigus de la COVID-19 avaient un faible taux de taurine dans le sang et ceux qui se portaient mieux gardaient un taux élevé.
Mais attention, le Dr Oudit souligne qu’il doit encore démontrer un lien de cause à effet de la taurine contre la COVID-19. Il espère se lancer dans des essais cliniques sous peu.
« C’est très excitant, mais encore faut-il le prouver », tempère le chercheur.
1 travailleur de la santé sur 10
Jusqu’à un travailleur de la santé sur 10 pourrait être atteint de la COVID longue, selon les premiers résultats d’une vaste enquête épidémiologique de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ).
« La plupart des travailleurs de la santé qui vivent avec le syndrome de COVID longue ont été infectés depuis l’arrivée d’Omicron », a soutenu la Dre Sara Carazo.
Avec un peu plus de 23 000 répondants au sein du réseau de la santé, les résultats préliminaires de l’INSPQ montrent qu’environ 10 à 6 % des travailleurs éprouvaient encore des symptômes plus de trois mois après une infection.
Et le tiers rapporte qu’ils sont sévères.