Litige contre l’Église Essénienne: la Cour supérieure tranche en faveur de la ville

Camille Payant | Journal de Montréal
L’Église Essénienne, une communauté spirituelle de l’Estrie, devra cesser ses célébrations de culte sur des terrains qui n’ont jamais permis de le faire, ordonne la Cour supérieure.
« L’entêtement de [l’Église Essénienne] ne peut servir de motif pour demander le rejet du recours de la Ville [de Cookshire-Eaton] », tranche la juge Line Samoisette.
• À lire aussi: Violation des mesures sanitaires: une église forcée de fermer
• À lire aussi: Des citoyens de Cookshire-Eaton choqués des révélations de J.E.
• À lire aussi: «Pour l'avoir vécu, je peux dire que c'est une secte!»
L’Église Essénienne organise des cérémonies mystiques et ésotériques sur sa propriété depuis 2007.
Le zonage actuel ne lui permet pas d’en faire cette utilisation, car le site du Village essénien de l’érable se situe en zone verte. Une section peut être utilisée à des fins récréotouristiques seulement, en raison de droits acquis.
L’Église a tenté de faire modifier ce zonage en 2015 afin d’y ajouter l’usage de culte, s’adressant au conseil municipal de Cookshire-Eaton. La Ville a refusé à l’unanimité cette demande.
« On ne peut pas accepter ça sur des terres agricoles », affirme le maire de Cookshire-Eaton, Mario Gendron.
La communauté spirituelle, qui héberge actuellement une cinquantaine de personnes, a contesté cette décision devant les tribunaux.
Malgré sa défaite en Cour supérieure, l’Église invite toujours ses membres à participer à des cérémonies religieuses sur son site estrien, comme la Célébration de l’Archange Gabriel qui se tiendra du 15 au 19 décembre prochains.
La communauté souhaite porter sa cause en appel. « L’Église a présenté plusieurs preuves de la violation de sa liberté de religion et elle estime que la Cour supérieure aurait dû procéder à l’analyse qu’impose l’article 1 de la Charte canadienne », soutient-elle dans un communiqué envoyé au Journal. Cet article confirme que les droits et libertés sont garantis.
Un litige qui s’étire
L’Église Essénienne savait qu’elle ne pouvait pas utiliser son domaine de 1 km2 comme lieu de culte avant même d’en faire l’achat, contrairement à ce qu’elle prétend, selon le jugement rendu le 2 décembre dernier.
« Trois mois avant l’achat, [elle] avait reçu une lettre [...] décrivant clairement quels usages étaient permis et le lieu de culte n’en faisait pas partie », confirme la juge Line Samoisette.
Afin de régulariser la situation, la Ville a proposé en 2012 aux Esséniens d’acheter une église vacante située sur le territoire de la municipalité, ce qu’ils ont fait.
Or, le lieu de culte nouvellement acquis n’a jamais réellement été utilisé par les Esséniens. « L’achat de l’ancienne église a servi d’écran de fumée puisque le culte continuait tout de même à être exercé sur le site », note la juge.
L’établissement a été abandonnée en 2016 et vendue par après.
La Commission de la protection du territoire agricole s’était également penchée sur le dossier, ordonnant en 2016 la démolition de 33 bâtiments. Selon la Ville, cette ordonnance n’a toujours pas été respectée par l’Église.
En 2018, l’émission « J.E. » avait fait la lumière sur cette communauté religieuse méconnue. D’anciens disciples y qualifiaient le groupe de « secte » dans lequel il fallait débourser des milliers de dollars pour suivre des formations et grimper dans la hiérarchie.