La construction d’éoliennes «trop rapide» et «anti-démocratique», s’inquiètent des citoyens et des élus


Jean-Philippe Guilbault
Des voix commencent à s’élever contre les multiples projets de parcs d’éoliennes autorisés par Hydro-Québec, notamment au Bas-Saint-Laurent où on dénonce un manque de transparence des promoteurs et la rapidité des mises en chantier.
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Fin janvier, la société d’État annonçait retenir la soumission du projet de parc éolien Pohénégamook–Picard–Saint-Antonin–Wolastokuk 2, près de Rivière-du-Loup, qui doit produire, d’ici 2029, 291 mW d’électricité.
Le projet est piloté par l’entreprise Invenergy en partenariat avec l’Alliance de l’énergie de l’Est, un regroupement de MRC et de municipalités du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, et la Première Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk.
Or, ce projet ne fait pas que des heureux et des citoyens de la région s’inquiètent d’une course au vent.
«C’est d’une ampleur phénoménale ce qui se prépare dans la région», lance d’emblée la co-porte-parole du nouveau comité citoyen Tourne pas chez nous!, Cassandre Henry. «Ces projets en partie privés se feront sur des terres publiques et on craint vraiment une fragmentation du territoire.»
À Rivière-du-Loup, le journal local Le Mouton Noir a même dédié un dossier complet dans sa dernière édition pour dénoncer «le piège à homard» de la filière éolienne.
«J’avais l’impression qu’on ne donnait jusqu’à maintenant qu’un seul côté de la médaille», explique le chroniqueur et membre du comité de rédaction du Mouton Noir Jean-François Vallée. «On présente ces projets comme étant impossibles à critiquer. [...] Moi, j’ai le goût de demander: “Il est où le frein?”»

Chapeau d’élu et chapeau de promoteur
Ces citoyens s’inquiètent notamment de la proximité entre les élus locaux et les promoteurs. En étant elles-mêmes partenaires des projets de parcs éoliens, les municipalités, aux yeux des critiques, se retrouvent dans une sorte de conflit d’intérêts.
«Le municipal, ce n’est pas une entreprise, avance Mme Henry. Je suis convaincue qu’il y a des élus, dans leur bureau, qui doutent.»
Une trentaine d’élus et d’ex-élus qui doutent se sont justement rassemblés dans le groupe Vent d’élus, né en août dernier au Centre-du-Québec.
Ils demandent de «repenser le modèle de développement de la filière éolienne», notamment en confiant au BAPE un mandat générique, comme ce fut le cas en 2011 pour l’exploitation des gaz de schiste.
«On nous propose des projets pièce par pièce, mais on n’a aucune information sur l’impact global de tous ces projets», dénonce la co-porte-parole de Vents d’élus, Rachel Fahlman. «L’argent vient brouiller les eaux. Ça semble si facile, mais il y a beaucoup de risques à de tels projets.»
Le compte à rebours des changements climatiques
De son côté, le président de l’Alliance de l’énergie de l’Est et préfet de la MRC de Rivière-du-Loup, Michel Lagacé, assure que des consultations ont été menées depuis 2021 pour le projet autorisé par Hydro-Québec.

«De manière générale, les gens avaient une vision positive du projet», note-t-il, ajoutant que d’autres projets ont déjà été refusés par le passé «pour protéger les paysages».
À ceux qui affirment que le développement éolien va trop vite au Québec, il rétorque que «le dérèglement climatique va encore plus vite» et que son organisation a «une fierté de contribuer à la transition énergétique».
Un BAPE sur la Côte-de-Beaupré
Pendant ce temps, le projet de parc éolien Des Neiges – Secteur sud, qui doit être aménagé par Boralex sur les terres privées du Séminaire de Québec, est l’objet d’un BAPE depuis plusieurs semaines. Ce projet suscite également des inquiétudes de la population, notamment en raison de sa proximité avec le mont Saint-Anne et des impacts sonores et visuels.
Pour ce projet, un rapport doit être remis au ministre de l’Environnement au plus tard le 5 juin prochain.