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L'article provient de TVA Nouvelles

L’identité québécoise est-elle en train de s’effondrer?

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Photo portrait de Antoine Robitaille

Antoine Robitaille

2025-03-13T04:00:00Z
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Mélanie Joly a eu des mots forts hier... qu’on aurait aimé entendre sortir de la bouche du premier ministre du Québec.

La «bataille» qui s’entame revêt un caractère «existentiel» pour les emplois, notre «identité» et notre «souveraineté», a dit la ministre fédérale. «Ce n’est pas juste une question économique. C’est ultimement l’avenir de notre pays qui est en jeu.»

Joly changement

«Pays», «souveraineté», «identité»: des concepts qu’on n’imaginait aucunement Joly défendre il y a une décennie, lorsqu’elle publiait Changer les règles du jeu (Québec Amérique, 2014). Un essai où elle développait sa vision politique: «Au XXIe siècle, le fait d’appartenir à un pays n’est plus une fin en soi», écrivait-elle entre autres.

Photo Agence QMI, MARIO BEAUREGARD
Photo Agence QMI, MARIO BEAUREGARD

Le postnationalisme au Parti libéral du Canada s’est évaporé dès le début de l’ère Trump.

En 2015, Justin Trudeau et ses ouailles défendaient l’idée d’un Canada «sans identité principale». Dimanche, ils applaudissaient à tout rompre le discours patriotique de Jean Chrétien, 91 ans. Pour le vieux «snoro» de Shawinigan, Trump mérite l’Ordre du Canada pour avoir «uni les Canadiens» comme jamais auparavant.

Ah oui? Plus unis qu’en 1982, lorsque Chrétien orchestra un coup de force constitutionnel excluant le Québec? Plus unis qu’après le référendum de 1995, lorsque son gouvernement, à coup de commandites frauduleuses et de plans B, tenta d’annihiler l’identification des Québécois à leur nation?

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Effondrement

Dimanche, un ami historien m’écrit: il se désole de «l’effondrement rapide de notre identité québécoise au profit de l’autre». L’agression tarifaire de Trump contre le Dominion réussira-t-elle là où Jean Chrétien, P.E. Trudeau et le PLC ont échoué depuis 1968?

Pourquoi n’est-ce pas François Legault qui déclare: «Ce n’est pas juste une question économique. C’est, en définitive, l’avenir de notre nation qui est en jeu»? Réflexe hérité de la gestion covidienne? Face à une menace, on met des programmes en place et on se croise les doigts? (Ce qui tranche avec la promptitude de Doug Ford.)

Le trumpisme n’est pas, comme une pandémie, un «Act of God». C’est une tentative politique brutale de redéfinir l’Amérique du Nord, l’économie mondiale, l’Occident et les rapports entre les grandes puissances. Un «changement de paradigme» (expression galvaudée qui, pour une fois, est de mise).

Stratégique

Face à cette nouvelle donne radicale, l’absence de pensée stratégique proprement québécoise est inquiétante. On laisse le Canada s’en charger. On accepte et relaie les appels à l’«unité canadienne», même si celle-ci a plutôt eu tendance à nier notre existence nationale, nos compétences constitutionnelles, nos intérêts économiques particuliers et nos choix de société (laïcité, français). Et maintenant, au sud, les États-Uniens convoitent notre eau, nos minéraux stratégiques et notre Arctique et remettent en question les frontières fixées en 1908.

Quelle place pour le Québec dans cet énorme chambardement? Un lecteur souverainiste m’écrit qu’il faudrait peut-être se reposer la question de 1995, après l’avoir ajustée: «Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement [aux États-Unis, au Canada, à l’Union européenne] un nouveau partenariat économique et politique?» Ça n’arrivera pas, mais ça fait réfléchir.

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