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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

L'écrivaine Claire Legendre examine le désir sous toutes ses formes dans son nouveau livre

«Ce désir me point»

L'écrivaine Claire Legendre examine le désir dans tous ses états dans son nouveau livre.
L'écrivaine Claire Legendre examine le désir dans tous ses états dans son nouveau livre. Pierre-Paul Poulin / Le Journal de Montréal / Agence QMI
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Photo portrait de Marie-France Bornais

Marie-France Bornais

2024-02-10T08:30:00Z
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Dans son livre précédent, Le nénuphar et l’araignée, l’écrivaine montréalaise Claire Legendre interrogeait la peur sous toutes ses formes. Dans son nouveau livre, Ce désir me point, elle explore le désir dans tous ses états : le désir sexuel, le désir de plaire, le désir de posséder, donc le désir de consommer toutes sortes de biens... et de relations. Toutes formes de désir se rejoignent, surtout en l’absence ou en l’attente d’un amour.  

Claire Legendre a publié «Ce désir me point» aux Éditions Leméac.
Claire Legendre a publié «Ce désir me point» aux Éditions Leméac. © Éditions Leméac

En courts (mais percutants!) chapitres, Claire Legendre explore le désir, mais aussi le sentiment de manque et d’absence, le célibat prolongé, la quête d’amour, les relations amoureuses, la folie des applis de rencontres et la futilité des dates vides de sens. 

«C’est un sujet qui m’intéressait, dit-elle en entrevue. Il y a deux ans, on m’a proposé de participer à un colloque sur la tentation. J’ai commencé à réfléchir au désir, le plus largement possible. Pas juste le désir sexuel ou amoureux. Je me suis dit que c’était un sujet central qui m’intéressait, au-delà d’une communication dans un colloque. J’ai commencé à écrire mon livre comme ça.»

Elle a mis presque trois ans à écrire Ce désir me point, un petit bijou de livre émaillé de réflexions très justes. Entre-temps, elle a quitté un célibat long de dix ans, ce qui a complètement changé son projet. 

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«À travers cette exploration stylistique du désir est arrivé le récit de ma propre histoire. Le livre n’était pas prévu pour être comme ça au départ, et finalement, je me trouve aussi à raconter quelque chose de très personnel.»

Née en France, l'écrivaine Claire Legendre vit à Montréal depuis 2011.
Née en France, l'écrivaine Claire Legendre vit à Montréal depuis 2011. Pierre-Paul Poulin / Le Journal de Montréal / Agence QMI

Connaître ses fragilités

Claire Legendre est maintenant en couple depuis trois ans. Est-elle, en quelque sorte, «réparée»? «Je crois qu’on n’est jamais «réparée». Je ne pense pas que je serai «réparée» un jour. Par contre, je connais les endroits qui sont recollés. Je connais les failles. Je sais où il ne faut pas aller et je sais aussi que je suis capable de recoller. Avant, je pensais que si mes histoires d’amour se cassaient la gueule, je ne survivrais pas. Maintenant, je sais que je vais survivre.»

Vivre en solo a été une épreuve pour cette écrivaine qui a soutenu sa thèse de doctorat en littérature comparée et études théâtrales à l’Université de Nice, en France. «C’est dix ans de ma vie qui ont été, effectivement, de survivre à la solitude. Et quand même dans un pays où je ne connaissais personne au départ.»

Être la cible d’un marché lucratif

À travers cela, elle voulait aussi explorer comment le désir de consommation, le désir d’autrui, étaient des façons de remplir la solitude. «Je pense qu’il y a quelque chose dans le livre que je n’avais pas envisagé au départ: aujourd’hui, les célibataires sont des cibles pour un marché de la rencontre... et un marché tout court.»

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«En gros, quand tu es seule, tu peux passer beaucoup de temps en face de ton ordi ou de ton cell, soit à essayer de trouver l’amour, soit à essayer de trouver le bon objet qui va te rendre heureuse, qui va t’aider à te sentir moins seule.»

«Je me suis retrouvée à me sentir comme la cible d’un marché: la cosmétique, les vêtements, les sports. Tout ce qui essaie de te faire sentir quelqu’un de bien, quelqu’un de désirable, alors qu’en fait, tu es profondément quelqu’un de seul et malheureux.»

Créer des liens?

Claire Legendre parle aussi de la difficulté de créer des liens véritables dans un monde où les rencontres sont vues comme des biens de consommation.

Elle a constaté qu’il y avait quelque chose de pervers dans les applis de rencontres. «En devenant soi-même une espèce d’objet de consommation, on regarde les autres comme des objets de consommation. Et il n’y a pas tellement de place pour une rencontre avec un humain... c’est quelque chose d’assez frappant.»

Ce désir me point

Claire Legendre

Éditions Leméac

160 pages environ

En librairie le 7 février.

Claire Legendre est née à Nice et vit à Montréal depuis 2011.

Elle a publié une douzaine de livres en France et au Québec.

Son plus récent roman, Bermudes, a été finaliste au Prix des libraires du Québec en 2021.

Elle sera en sabbatique à compter du mois de juin.

«Mon désir n’avait pas besoin d’objet, il était prêt à se poser sur n’importe qui, il frétillait de l’horizon des possibles. Il était un fidèle compagnon, robuste, affable et courageux.
J’ai été une femme célibataire involontaire de 2010 à 2020. Ça ne m’était pas arrivé avant. Je n’étais pas armée pour y faire face. Se retrouver «sur le marché» est une violence de rouleau compresseur.»
Claire Legendre, Ce désir me point, Éditions Leméac
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