L'an 1 du legs de Trudeau

Guillaume St-Pierre
«Nous savons que les Canadiens travaillent fort pour gagner leur vie et s’attendent à ce que nous fassions attention à leur argent.»
C’était juste avant Noël. La ministre des Finances Chrystia Freeland promettait de faire attention à la dépense après la pandémie qui nous a fait perdre tout sens des proportions.
Coup de pub ou réel changement de cap ?
C’est ce que nous verrons ce jeudi au moment où le gouvernement Trudeau déposera un premier budget post-programmes d’aide d’urgence pandémique.
Quadrature du cercle
Les paris sont ouverts, mais réconcilier les nouvelles dépenses promises par les libéraux et la rigueur budgétaire demandera beaucoup de créativité.
La guerre en Ukraine laisse présager une hausse des dépenses militaires, et le pacte conclu avec le NPD étendra le filet social comme on l’a rarement vu.
Ce n’est pas demain la veille que le Canada joindra le club sélect des pays de l’OTAN qui dépensent 2 % de la valeur de leur économie en défense.
Cela équivaudrait à une ponction de plus de 15 G$ annuellement pour le Canada.
Mais on s’attend à ce que les libéraux posent un geste.
À elle seule, l’assurance dentaire promise par l’alliance libérale et néo-démocrate coûtera à terme 1,7 G$ par année.
À cela s’ajoutent les milliards en promesses électorales libérales de toutes sortes.
Et on ne parle même pas des transferts en santé que réclament les provinces, des négociations avec la fonction publique fédérale, de la transition écologique, des investissements dans le logement et la réconciliation avec les Autochtones.
Lunettes roses
Chrystia Freeland pourra compter sur des dizaines de milliards en revenus supplémentaires grâce à l’inflation et aux redevances du pétrole.
Le portrait qu’elle brossera des finances publiques sera assurément reluisant.
Mais ce portrait est «assez faux» par rapport à la réalité dans un contexte où l’économie canadienne est boostée aux «stéroïdes», croit Robert Asselin, un ancien conseiller économique de Justin Trudeau.
Si le passé est garant de l’avenir, les libéraux n’auront aucun souci à utiliser ces nouveaux revenus pour financer des programmes permanents.
Le déficit structurel du fédéral date de bien avant la pandémie.
Héritage
Dans son discours de décembre, Mme Freeland a soutenu que le budget printanier mettra l’accent sur «la croissance et la compétitivité».
«Nous sommes bien conscients du fait que nous devons rembourser nos dettes», a-t-elle affirmé.
Un héritage ne se bâtit pas sur le court terme. Justin Trudeau et Chrystia Freeland devront un jour démontrer que leurs programmes sociaux généreux sont viables financièrement.
Ils n’en ont pas encore fait la démonstration. Beaucoup de Canadiens et même des libéraux seraient rassurés si le tandem Trudeau-Freeland commençait à en faire la preuve dès cette semaine.