Ken Dryden partage un moment marquant de l'histoire

Agence QMI
La Série du siècle a marqué les esprits de tout un pays il y a 50 ans et Ken Dryden, le gardien de la formation canadienne face aux Soviétiques, livre son témoignage dans un livre qui paraîtra mercredi aux Éditions de l’Homme.
Dans «La Série du siècle» qui sera publié en version originale anglaise le même jour, l’ancien porte-couleurs du Canadien de Montréal partage ses souvenirs, ses sensations et ce qui en reste aujourd’hui. Outre les mots de celui ayant aidé l’unifolié à revenir de l’arrière pour remporter la confrontation, de nombreuses photos illustrent toute l’importance de cette confrontation dépassant de loin le cadre sportif.
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Effectivement, le Canada et l’Union soviétique ont croisé le fer pour une première fois quand la célèbre série a pris son envol le 2 septembre 1972 au Forum de Montréal. Le choc impliquait des hockeyeurs professionnels, mais mettait également en scène deux systèmes politiques aux antipodes, des façons de vivre et de penser opposées, le tout sous les yeux de millions de gens des deux nations concernées. Les jeunes qui fréquentaient l’école à l’époque sont fiers de dire maintenant qu’ils ont séché leurs cours le jour du huitième et dernier match, le 28 septembre de cette année-là, quand environ 16 des 22 millions de Canadiens ont regardé la rencontre décisive à la télévision.
D’ailleurs, l’ambiance qui régnait sur la patinoire et aux alentours restait particulière, étrange, même.
«Un long cri : constant, incontrôlable, de la mise au jeu inaugurale, à Montréal, jusqu’au son de la sirène, du sifflet ou de quoi que ce fut d’autre annonçant la fin de la série, à Moscou, décrit ainsi Dryden au début de son livre. Ce cri avait commencé à m’habiter bien avant, dès le jour où un coup de téléphone m’avait appris que j’allais faire partie de l’équipe. Et il m’habite encore aujourd’hui, 50 ans plus tard. Tout, dans cette série, fut plus grand que nature ; ses accents, plus sonores ; ses silences, plus lourds ; ses hauts, ses bas, ses peurs, ses univers imaginaires, sa portée ; tout fut plus grand que nature.»
Pas question de perdre
À la surprise et déception de plusieurs partisans canadiens, les joueurs du pays avaient éprouvé des ennuis lors des quatre premières parties, n’obtenant qu’un gain contre deux défaites et un verdict nul. Aux yeux de nombreux amateurs, le Canada n’avait pas le droit de perdre cette série contre «l’ennemi». Or, celui-ci impressionnait par son talent et son imagination sur la glace, ce qui a placé Dryden et ses comparses dans un embarras évident.
«Avant même que commence la Série du siècle, le Canada voulait remporter les huit matchs. Il devait remporter les huit matchs. Les Russes, eux, voulaient gagner la série. Pour ce faire, ils devaient être compétitifs au plus haut niveau. Personne n’a obtenu ce qu’il voulait, mais nous avons tous reçu ce dont nous avions besoin. Les deux équipes ont triomphé d’une manière et dans une dimension qu’elles n’avaient pas imaginées. Comme Shackleton. C’est peut-être la seule série jamais disputée où le perdant éprouve aujourd’hui presque la même satisfaction que le gagnant», considère ainsi l’ex-gardien.
Un match historique
Bien sûr, le dernier duel de la série, tenu le 28 septembre 1972, demeure dans les annales de l’histoire canadienne tout court, et pas uniquement à cause de la remontée du pays qui a effacé un retard de 3-1-1 en gagnant les rendez-vous 6, 7 et 8 à Moscou. Si le but vainqueur de Paul Henderson en fin de troisième période de la partie décisive est souvent présenté au petit écran, c’est que la symbolique reliée à l’événement, le contexte et les attentes du public étaient impossibles à ignorer. Une défaite aurait changé le cours de l’histoire, et pas seulement dans le cadre de la série.
«Le 28 septembre 1972, avant le match ultime de la Série du siècle à Moscou, personne ne savait qui serait le héros ni qui serait le bouc émissaire. Quand je n’étais pas assez occupé et que je ne pouvais contrôler le feu roulant de mes pensées, je me disais que, le 29 septembre 1972, je pourrais bien me réveiller au matin dans la peau de l’homme le plus détesté au Canada, admet Dryden.
«Il m’arrive de penser à ce qui serait arrivé si par malheur nous avions perdu le huitième match. Si nous avions perdu la série. Tous ces flots de vitriol qu’on avait lancés sur nous à Vancouver [après le quatrième match] se seraient multipliés. [...] Après la série de 1972, j’ai fait partie de l’équipe championne de la Coupe Stanley à cinq reprises à Montréal. Je ne suis pas certain que les choses se seraient passées aussi bien pour moi si nous avions perdu la Série du siècle.»
