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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

Jésus est une femme noire?

Photo MEGA/WENN
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Photo portrait de Sophie Durocher

Sophie Durocher

2025-02-21T00:00:00Z
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Bon, eh bien, on est rendu là.

C’est une femme, noire, qui va incarner Jésus dans une nouvelle version de la comédie musicale Jesus Christ Superstar qui sera présentée cet été, au Hollywood Bowl de Los Angeles.

Que l’on veuille faire un James Bond noir, ça ne regarde que les créateurs, puisque l’agent 007 est un personnage de fiction.

Qu’on fasse une Hermione, copine d’Harry Potter, noire, asiatique ou extra-terrestre, je m’en fiche. Je n’ai jamais cru à l’existence des sorciers.

Mais Jésus de Nazareth a bel et bien existé, qu’on croie ou non qu’il est le fils de Dieu, né par l’opération du Saint-Esprit.

C’est un personnage historique, au même titre que Winston Churchill ou Cléopâtre.

J’ai vraiment très hâte de voir quelle sera la prochaine idée, la prochaine lubie des wokes: Martin Luther King incarné par une femme blanche? Beyoncé incarnée par un homme blanc de plus de 50 ans ?

Ben non, voyons, ça n’arrivera jamais ! Vous ne saviez pas que le wokisme est à sens unique?

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Touche pas à mon pote

Ce sera donc la vedette du film Wicked, Cynthia Erivo, qui jouera Jésus dans cette fabuleuse comédie musicale, qui ravit les foules depuis les années 1970.

C’est quand même bizarre : quand je vois passer des textes sur des décisions «audacieuses» du milieu artistique, l’audace va toujours dans le même sens!

Aujourd’hui, on prend une femme noire pour jouer Jésus dans une comédie musicale. Hier, c’était la comédie musicale Hamilton, sur les pères fondateurs des États-Unis (tous des hommes blancs ) dont la troupe était entièrement composée de comédiens/chanteurs/danseurs noirs ou hispaniques ou asiatiques.

On nous disait que c’était pour «raconter l’Amérique d’hier avec les yeux de l’Amérique d’aujourd’hui». On nous disait que c’était pour remplacer le «supémacisme blanc» par «la diversité».

C’est là qu’on voit que ceux qui prônent la diversité manquent terriblement de diversité.

On ne trouverait pas «audacieux» de demander à Clint Eastwood de jouer Nelson Mandela.

Quand on a demandé aux membres de la distribution originale de Hamilton (qui est encore aujourd’hui un des plus grands succès de Broadway) ce qu’ils aimeraient dire aux personnages historiques qu’ils incarnent, s’ils pouvaient voyager dans le temps, un des comédiens a répondu : «Je veux voir la face qu’ils feront quand ils verront qu’ils sont joués par un homme noir.»

Bizarrement, personne n’a pensé à demander à de fervents catholiques ce qu’ils aimeraient dire à la distribution de Jesus Christ Superstar.

La question qui tue

Comprenez-moi bien. Je suis la première à critiquer la religion catholique, j’ai fait mon apostasie il y a plusieurs années, et je trouve cette idéologie misogyne et homophobe.

Je pourrais trouver assez drôle que ce soit une femme qui incarne Jésus (alors que les femmes ne peuvent même pas être prêtres). Je pourrais trouver ça drôle que ce soit une personne queer qui incarne Jésus (vu que l’Église interdit le mariage gai).

Mais j’aimerais simplement que les audacieux artistes diversifient leur audace. Pourquoi c’est toujours les mêmes qui doivent se faire brasser la cage?

J’aimerais poser une question. Est-ce que les artistes qui engagent Cynthia Erivo pour jouer Jésus l’auraient engagée pour jouer Mahomet?

Poser la question, c’est y répondre. Il y a curieusement des cages que personne n’a l’«audace» de brasser.

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