Attentats du 11 septembre: «Une journée qu’on ne veut pas revivre» - Jean Chrétien

Agence QMI
La plupart des gens aimeraient chasser de leurs souvenirs les événements qui se sont produits le 11 septembre 2001 aux États-Unis. Pour le premier ministre canadien de l’époque, Jean Chrétien, impossible d’oublier cette journée qui l'a maintenu sur la corde raide.
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L’homme aujourd’hui âgé de 87 ans était en pleine réunion avec le premier ministre de la Saskatchewan lorsque son assistant l’a invité à regarder les images qui passaient en boucle à la télévision. Il a ainsi pu voir le deuxième avion s’écraser dans les tours jumelles du World Trade Center.
Lorsque la panique a rapidement gagné les rangs américains, le Canada a dû s’improviser comme un refuge pour les avions devant au départ atterrir aux États-Unis. Le gouvernement venait alors de fermer tous les aéroports du territoire.
Un appareil sud-coréen a donné beaucoup de fil à retordre à M. Chrétien et son groupe à Ottawa. Après être passé par l’Alaska, la crainte était que l’avion se dirige vers Vancouver, où il aurait pu faire de gros dégâts. On étudiait alors les pires scénarios.
«Les pilotes ne communiquaient pas avec les tours de contrôle. Ils ne répondaient pas aux communications qu’ils recevaient de qui que ce soit», a raconté M. Chrétien vendredi, pendant un entretien avec Mario Dumont sur les ondes de QUB radio.
«On en a conclu que s’il allait vers Vancouver, qu’il faudrait, comme on dit, le “descendre”. [...] Ils m’ont expliqué que c’était un avion commercial et qu’il [transportait] probablement 300 passagers. J’ai dit que si on devait le faire, on allait le faire», a ajouté le 20e premier ministre du Canada.
Heureusement, M. Chrétien n’a pas reçu d’autres appels à ce sujet cette journée-là parce que le pilote de l’avion sud-coréen s’est finalement identifié.
Les conséquences
Cette triste journée fut suivie du durcissement du ton américain quant à la situation au Moyen-Orient. Si M. Chrétien a choisi de ne pas suivre George W. Bush dans la guerre en Irak, c’est parce qu’il avait ses propres réserves quant aux motivations des Américains.
Le premier ministre avait des doutes sur la présence d’armes de destruction massive sur le territoire irakien et il ne pensait pas que les États-Unis obtiendraient l’accord des Nations unies pour se lancer en guerre.
«Je lisais des documents à la maison, et je voyais qu’ils [les Américains] avaient surpris un camion avec de l’armement de destruction massive, du point A au point B, en Irak. Je me suis dit que si c’était vrai, ils n’appelleraient pas ça des armes de destruction massive. Ils diraient les “meubles de ma belle-mère sont transportés”, ils ne seraient pas aussi ouverts. En tout cas, j’ai eu des doutes», a confié M. Chrétien.
Ultimement, la décision de se tenir à l’écart du conflit n’a pas eu d’impact sur les relations entre le Canada et son voisin du sud. C’est plutôt avec le premier ministre britannique Tony Blair, désireux de renverser le régime de Saddam Hussein, que Jean Chrétien a rencontré des difficultés.
En outre, le politicien originaire de Shawinigan se souviendra toujours du 11 septembre 2001 comme d'une journée fatale qui aurait pu avoir davantage de conséquences.
«C’est une journée qu’on ne veut pas revivre. Quand vous réalisez que vous avez dit oui à la possibilité de faire tomber un avion avec 300 passagers, vous avez des sueurs sur le front», a-t-il admis.
Résultat des élections: Jean Chrétien ne veut pas se mouiller
Louis Cloutier
L'ex-premier ministre Jean Chrétien s’est montré très, très prudent quant à l'issue des élections fédérales. Il s'est formellement refusé vendredi à prédire une victoire des libéraux de Justin Trudeau.
«Évidemment des élections c'est des élections. On a des surprises et parfois c'est prévisible. Alors j'en ai fait 12 et puis ce n'est jamais fini avant que ça soit fini, s'est-il limité à dire. Sa retenue ne vaut toutefois pas pour le candidat libéral de son comté de Saint-Maurice-Champlain, François-Philippe Champagne, dont il est «sûr qu'il va gagner».
Sur la question des pensionnats autochtones, Jean Chrétien ne s'était pas encore prononcé, lui qui avait déjà agi comme ministre des Affaires indiennes du Canada.

Il plaide qu'il s'agit d'une façon de faire ayant prévalu il y a cent ans, que les derniers pensionnats ont fermé sous son règne de premier ministre et surtout qu'il ne faut pas juger le passé avec un regard d'aujourd'hui.
«C'est difficile de réécrire l'histoire. Je n'étais pas fort là-dessus moi parce que je croyais que mon rôle n'était pas de corriger le passé, mais de bâtir le futur. Sauf que là la mode, pas seulement au Canada, mais partout, c'est de réécrire le passé», a-t-il déploré.

M. Chrétien a confié qu'il a lui-même été pensionnaire dans des communautés pendant 14 ans.
«J'y ai été 14 ans et je n'ai jamais aimé ça non plus. Moi j'étais obligé d'y aller à cause de la santé de ma mère et puis ils m'ont donné, je pense, une assez bonne éducation.» Jean Chrétien a été honoré vendredi pour avoir créé le Parc national de la Mauricie, à titre de ministre fédéral, il y a 51 ans.
À 87 ans, il est apparu en bonne forme avec toute sa vivacité et toute sa mémoire. Il publiera d'ailleurs, dans un mois, un quatrième livre relatant d'autres souvenirs de ses 40 ans en politique.