«Je pensais que j’avais un cancer»: le mercure dans les poissons l’a rendu malade
Le guide de pêche Jimmy Lachapelle a souffert de douleurs musculaires, de tremblements et de violents maux de tête

Éric Yvan Lemay
La pêche sportive est un loisir pratiqué par des centaines de milliers de Québécois. Si la plupart des pêcheurs savent que la chair des poissons peut contenir du mercure, plusieurs ignorent encore les effets nocifs de ce métal lourd sur la santé ou en minimisent les dangers. Notre Bureau d'enquête vous aide à y voir plus clair pour en manger en toute sécurité.
Un guide de pêche d’expérience a souffert de graves problèmes de santé après avoir consommé pendant des années trop de poissons qui contenaient des quantités importantes de mercure.
«Je serais décédé si je n’avais pas arrêté de manger du poisson», lance Jimmy Lachapelle. Durant ses 30 ans comme guide à temps plein, Jimmy Lachapelle avait l’habitude de manger environ chaque année une centaine de shore lunches, des repas de poissons cuisinés pour les clients en bordure de lac.

Ce dernier a accepté de partager son expérience dans le cadre d’un dossier de notre Bureau d’enquête sur le mercure dans les poissons pêchés au Québec qui sera publié dans les prochains jours. Si la majorité des poissons sont sans danger, certains plans d’eau et certaines espèces représentent un plus grand risque, surtout lorsque ces dernières sont consommées en grande quantité.
Par exemple, dans le cas du réservoir Dozois où Jimmy Lachapelle a souvent agi comme guide de pêche, il est recommandé de ne pas consommer plus de deux à quatre repas de doré jaune par mois, selon leur grosseur.
Douleurs et tremblements
L’homme de 50 ans, qui est aussi connu sous le surnom «Le pro chasse et pêche», a commencé à ressentir des symptômes physiques dès la trentaine.
Il ignorait toutefois ce qui causait ses violents maux de tête, aux yeux et au ventre, ses douleurs et sa faiblesse musculaire, ainsi que ses tremblements. Même la pratique de sports comme le hockey ou des travaux de rénovation devenaient difficiles.
«Je pensais que j’avais un cancer. Je dépérissais vite», dit celui qui est aujourd’hui propriétaire de la Pourvoirie L’Aventure du Pro, dans le nord de l’Outaouais.
Il y a quelques années, frustré par un autre rendez-vous sans résultat chez le médecin, il a décidé de faire des recherches sur internet. Il avait déjà vaguement entendu parler des risques du mercure, mais les symptômes décrits en ligne correspondaient en tout point à ce qu’il vivait.

Il a donc rappelé son médecin, qui lui a fait passer des tests pour connaître son taux de mercure dans le sang.
«Il était le double d’un humain qui commence à être malade d'un taux de mercure trop élevé», dit-il en se rappelant le choc de l’annonce.
Au régime sec
Son médecin lui a tout de suite recommandé de cesser toute consommation de poisson. Jimmy Lachapelle a suivi strictement cette recommandation pendant trois ans. Depuis, il en mange seulement quelques repas par année.
Il croit toutefois que la majorité des pêcheurs et pourvoyeurs ne courent aucun danger, puisque leur consommation de poisson est limitée. De plus, selon l’endroit, le risque est moins élevé.
«Mon père a guidé toute sa vie et il n’a jamais eu de problèmes de mercure», raconte celui qui continue de se faire tester chaque hiver pour son taux de mercure dans le sang.
Si ce dernier a beaucoup baissé, il continue de ressentir quelques symptômes comme de légers tremblements, mais rien qui l’empêche de travailler.
«J’étais comme l’exception à la règle. Je mangeais beaucoup trop de poisson. Il ne faut pas abuser», conclut-il.