«Je n’avais pas envie de me cacher»: Alex Perron a toujours assumé son homosexualité


Guillaume Picard
Après le succès de La Cage aux folles qui l’a ramené au jeu par la grande porte, Alex Perron enchaîne maintenant avec le théâtre d’été.
Il jouera dès la mi-juin dans la pièce Mécanique Raymond au Théâtre des Hirondelles de Saint-Mathieu-de-Belœil, à 15 minutes de chez lui, un luxe qui lui permettra de profiter aussi de l’été.
«Ça fait comme 108 ans que je n’ai pas joué au théâtre. J’ai fait des shows solos et des galas, mais La Cage aux folles a déclenché ça, on dirait, ce désir de jouer. L’an passé, si tu m’avais dit que je ferais deux shows de théâtre de suite, je t’aurais ri en pleine face. C’est comme deux belles surprises de suite», a-t-il dit à l'Agence QMI, reconnaissant que son goût du risque et sa polyvalence lui ont permis de durer dans le métier. L’an prochain, le compteur de sa carrière affichera d’ailleurs «30 ans», ce qui n’est pas rien.

Le secret d’Alex Perron pour demeurer dans nos écrans et sur les scènes de la Belle Province a trait à la diversification de ses champs de compétence, donc à sa polyvalence.
Il affirme aussi que d'avoir misé sur sa «couleur» en tant qu'homme gai, dès ses débuts en 1996 aux côtés de Jean-François Baril et de Louis Morissette, dans le trio humoristique Les Mecs comiques, l'a également bien servi.
«Ça a été un avantage, car longtemps, je vais le dire entre guillemets: “je n’avais pas de compétition!” [Rires] Maintenant, il y en a des gars qui ont fait leur coming out en humour, mais à mon époque j’étais seul. Même Dany Turcotte ne l’avait pas fait encore. J’avais le champ libre [rires][ et j’étais dans un groupe avec deux hétéros, puis on montrait jour après jour que ça se pouvait, dans le sens où eux riaient de moi et moi je faisais de même. Tout était équitable.»
Il croit avoir «probablement perdu des contrats» en raison de son orientation sexuelle et du fait qu'il s'affiche sans faire de concessions, «mais en contrepartie, j’ai eu bien plus d’opportunités», ajoute-t-il du même souffle.
«Souvent, encore aujourd’hui, on m’engage pour cette couleur-là et il faut miser là-dessus. Cette carte de visite là m’a totalement avantagé, ça, c’est sûr et certain», a souligné Alex, qui est en interaction au quotidien avec ses admirateurs sur les réseaux sociaux, lui qui s’est bâti une fidèle communauté. Si, auparavant, c'étaient surtout de jeunes gais qui lui écrivaient, aujourd'hui ce sont des parents qui cherchent à connaître ses trucs pour aborder le sujet avec leur fils ou leur fille. Il se prête volontiers au jeu, bien qu'il dise en riant «ne pas être Janette Bertrand!»
Pour lui, s'assumer n'est pas un geste courageux. «Je ne voyais pas ça comme du courage au départ, je voulais juste être moi-même. Dans ma tête, je ne voyais pas comment je pouvais faire autrement, et l’humour, ça tient à la vérité. Je n’avais pas envie de me cacher de toute manière!» a relaté celui qui est sorti du placard à l’âge de 17 ans, en révélant son homosexualité à tous ses proches la même semaine.

Et durer, de toute manière, est un exploit, peu importe qui l’on est dans ce milieu hyper compétitif constitué de pigistes.
«C’est un privilège d’être encore là dans le contexte actuel. D’avoir encore des projets que l’on me propose, ça me touche énormément. Et on ne se le cachera pas, j’ai 54 ans et il y a beaucoup de jeunes avec énormément de talent qui me poussent dans le dos. C’est correct, car j’ai dû moi-même, sans le savoir, pousser dans le dos de certains.»
Alex Perron a multiplié les projets sur scène ainsi que les émissions de télé et de radio. Il a aussi écrit pour lui et pour d’autres, en plus d’enseigner depuis presque 10 ans à l’École nationale de l’humour. Mais il n’a pas nécessairement attendu qu’on pense à lui.
«J’ai ouvert un peu ma palette et il faut le dire aux producteurs: “Hey, je suis capable de faire ça, j’ai envie de faire ça!” Je dis toujours à mes étudiants d’ouvrir leurs œillères, de se donner l’occasion d’essayer des affaires. Je préfère qu’on me dise non que de ne pas avoir essayé. Puis des non, j’en ai eu!»
Pour la pièce Mécanique Raymond, la proposition d’incarner plusieurs personnages sur scène est venue de Stéphan Allard, qui a écrit la pièce et en assure la mise en scène. Stéphan est l'un de ses camarades de jeu dans La Cage aux folles.

«À mon âge, je suis plus dans l’optique que quand il y a des choses qui se présentent et que ça m’allume, j’y vais. Et c’est la rencontre avec des gens, moi qui suis issu d’un groupe. J’aime ça être entouré de monde, c’est un trip de gang! C’est ce que j’ai retrouvé avec La Cage aux folles et maintenant avec Mécanique Raymond.»
La pièce Mécanique Raymond, qui met aussi en vedette Roger La Rue, Myriam LeBlanc, Lucien Ratio et Geneviève Rochette, sera présentée au Théâtre des Hirondelles de Saint-Mathieu-de-Belœil, du jeudi au samedi, du 14 juin au 23 août.
Alex Perron nous a récemment parlé de sa mère, qui est atteinte de la maladie d'Alzheimer. Lisez le compte-rendu ici.