«Je n'étais pas la première»: violée par un soldat russe, elle le fait condamner en justice

TVA Nouvelles
Une jeune ukrainienne de 20 ans ne pourra jamais oublier l’invasion par des soldats russes de son village, mais n’entend pas pour autant laisser ses traumatismes gouverner sa vie.
Karina se souvient de la main qu'il a posée sur son dos alors qu'il la poussait dans la pièce sombre du grenier. C'est là que le soldat russe a pointé une arme sur elle, tout en la poussant plus loin dans les profondeurs noires de la petite pièce bombardée.
Debout à quelques centimètres d'elle, l'haleine encore chargée de whisky, le soldat russe a pointé son arme sur sa tête, menaçant de la tuer si elle ne se déshabillait pas devant lui.
Karina, les mains tremblantes, a suivi ses ordres, sachant que si elle essayait de le combattre comme elle le voulait désespérément, elle ne reverrait jamais le visage de sa mère.
«Et puis il m'a violée», raconte au Daily Mail Karina, la voix hésitante lorsqu'elle se souvient de ce qui s'est passé le 11 mars 2022.
«Après avoir fini, il m'a dit qu'il reviendrait et qu'il me tuerait si je racontais à quelqu'un comment il m'avait violée», a-t-elle poursuivi.
Karina avait 20 ans lorsque les hommes de Poutine sont arrivés dans son village à bord d'énormes chars, le 8 mars 2022. Quelques minutes après leur arrivée, ils ont terrorisé les familles qui vivaient là, et envahi leurs maisons.
Si elle avait bien envisagé les bombardements, Karina n’avait alors pas imaginé les horreurs que les soldats russes lui infligeraient.
Tirs d’artillerie
Le deuxième jour, ils ont commencé à faire du porte-à-porte et à s'installer dans les maisons des familles, les gardant parfois en otage.
«Lorsque les militaires ukrainiens ont commencé à tirer à l'artillerie sur les Russes près de notre village, ils nous ont reproché, à mon petit ami et à moi, d'avoir dévoilé leurs positions», raconte Karina.
C’est à ce moment-là qu’un soldat l’a sortie de chez elle, l’accusant d’avoir informé l’armée ukrainienne des positions russes.
Il l’a ainsi trainée jusqu’à la maison abandonnée de son voisin, où son cauchemar a commencé.
«Je me souviens d'avoir vu des préservatifs usagés éparpillés sur le sol. J'ai compris que je n'étais pas la première à être emmenée là», relate Karina.
Après l’avoir questionnée, puis violée, le soldat l’a menacée qu’il recommencerait si les bombardements ne s’arrêtaient pas.
Dans les jours qui ont suivi, Karina, qui a d’abord tenté de garder la tête hors de l’eau, a fondu en larmes.
«À un moment donné, je me suis effondrée et j'ai pleuré pendant des heures. J'avais l'impression d'être sale, d'être une honte», confie-t-elle.
S'enfuir à tout prix
Elle a toutefois rapidement recouvré son calme, alors que la perspective de nouveaux bombardements la forçait à agir.
«J'ai décidé qu'il n'y aurait pas de prochaine fois. Je savais que je devais faire quelque chose», explique Karina.
Sous le couvert de l'obscurité, elle et son petit ami se sont échappés de chez eux et ont marché pendant des kilomètres à travers les champs, les forêts et les voies ferrées jusqu'à ce qu'ils atteignent un village voisin dans la région de Kyïv.
C'est là qu'elle a trouvé refuge auprès d'un ami proche qui l'a aidée à dénoncer le viol à la police nationale et aux procureurs lorsque son village a été libéré quelques semaines plus tard.
Karina raconte que sa relation avec son petit ami n'a pas duré, car il lui en voulait de raconter ce qui lui était arrivé à ses amis et à sa famille.
«Cela a vraiment affecté notre relation», déplore Karina, qui peine à s’expliquer pourquoi son petit ami n’était pas de son côté.
«Il voulait que je garde le silence et que je n'en parle pas», s’attriste-t-elle.
Karina espère plutôt qu'en racontant son histoire de survie et les horreurs dont elle a été témoin et qu'elle a endurées, d'autres femmes viendront témoigner de ce qui leur est arrivé.
«Il est très important de ne pas garder le silence, car les soldats qui ont fait cela vivront une vie normale si nous ne disons rien, et ce n'est pas juste», déclare-t-elle.
Identifier son violeur
Karina raconte que lorsqu'elle a signalé le viol aux procureurs, ceux-ci lui ont fourni des photos des soldats russes qui avaient envahi son village.
«J'ai pu identifier le soldat qui m'avait violée. Ils avaient également des échantillons d'ADN qui prouvaient que c'était lui qui m'avait fait ça», relate la jeune femme.
Karina était présente au tribunal lorsque le soldat a été déclaré coupable. Ce dernier a toutefois été condamné par contumace, ce qui signifie qu'il ne se retrouvera probablement jamais derrière les barreaux.
La jeune femme a depuis repris sa vie en main. Elle a notamment épousé l'amour de sa vie en décembre et bénéficie depuis 20 mois des conseils de psychologues de la Fondation de la famille Andreiev.
Karina travaille aujourd'hui comme gestionnaire de cas dans le cadre du projet Assisto de la Fondation familiale Andreiev, où elle aide les survivantes de violences sexuelles.