«J’ai réalisé l’ampleur de mon mal-être depuis que je ne l’ai plus»: cette femme trans a trouvé le bonheur dans sa véritable identité de genre
À 46 ans, Marianne Bonin est soulagée d'être «enfin» elle-même

Hugo Duchaine
Plonger les mains dans la terre, manger un sandwich avant d'aller au lit, apprécier la beauté du monde: des Québécois ont trouvé leur bonheur dans une panoplie de petites et grandes choses. Voici une série de témoignages pour vous inspirer.
Une femme trans de la Montérégie a trouvé le bonheur en acceptant pleinement sa véritable identité de genre, après plus de 40 ans à souffrir dans le déni.
«J’ai réalisé l’ampleur de mon mal-être depuis que je ne l’ai plus», confie Marianne Bonin, âgée de 46 ans. C’était quelque chose qui me rongeait de l’intérieur, c’était insupportable.»
Elle a doucement entamé sa transition en 2020. Attablée à un resto-bar de Saint-Hyacinthe, où elle demeure, Mme Bonin avoue avoir eu «une légère crise de la quarantaine», ironise-t-elle en riant.
Tout pour être heureuse
Mais même si c'est récent, elle l'a toujours su.
«Mon plus vieux souvenir remonte à quand j’avais cinq ans et que j’ai dit à ma mère: “Je suis une fille, ça ne fonctionne pas”», relate-t-elle.
Mais son beau-père de l’époque lui avait fait comprendre que c’était honteux en lui donnant la fessée.

Ce n’est qu’en janvier 2020, à 41 ans, qu’elle a annoncé à sa conjointe de l’époque qu’elle souffrait de dysphorie de genre.
«Une bombe a explosé dans mon salon», souffle Marie-Claude Cournoyer, qui est restée une bonne amie malgré tout.
«J’avais tout pour être heureux (sic). La femme de mes rêves, une famille reconstituée, une nouvelle maison, une piscine dans la cour, un nouveau char, ça allait bien à la job... mais quelque chose clochait», confie Mme Bonin.
Elle n’avait encore jamais voulu assumer sa transidentité auparavant. «C’était correct, mais pour les autres. Pas pour moi», dit-elle.
Et quand elle a consulté, c’était pour garder cela refoulé, explique-t-elle. Mais, elle n’y arrivait pas et commençait même à avoir des pensées suicidaires.
De papa à maman
Si la transition n’a pas toujours été facile, Marianne Bonin se réjouit du soutien et de la bienveillance de ses proches.
Ses deux garçons adolescents l’ont soutenu sans préjugés et l’appellent aujourd’hui «maman». «Récemment, un de mes gars m’a dit que depuis ma transition, j’étais plus patiente et plus souriante», raconte-t-elle.
Même chose pour les patrons de l’entreprise où elle est comptable. Et ses collègues de travail l’ont guidée dans ses expériences vestimentaires, dit-elle, avant d’adopter le bandeau comme «marque de commerce».
Elle salue aussi la bienveillance du Québec, qui rembourse l'accès à des chirurgies d'affirmation de genre. En plus de s’épanouir et d’avoir laissé les crises d’anxiété derrière elle, Mme Bonin dit aussi s’affirmer davantage.
«Une collègue m’a dit: “Marianne a plus de couilles que t’en avais avant”», rigole-t-elle.
La femme de 46 ans craint néanmoins le ressac observé chez les personnes trans, notamment aux États-Unis. Si bien qu’elle en vient à se demander si les droits, durement acquis, pour protéger les personnes trans, ne sont pas allés trop loin.
Elle se souvient de l’angoisse qu’elle a vécue à sa première sortie au restaurant et qu’elle a dû aller dans les toilettes des femmes.
«Mais avec une version mixte, peut-être que je l’aurais utilisée», admet la femme qui n’hésite pas à répondre aux questions sur sa transition afin d’en briser les tabous.