«J’ai pleuré de reconnaissance devant tant de bienveillance»: Sabrina Cournoyer émue par la générosité de Jean-Michel Blais alors qu'elle traverse un moment difficile
Sabrina Cournoyer
Cela fait maintenant plusieurs jours que je n'entends plus rien de l'oreille gauche. Le diagnostic: un virus s'est attaqué à mon oreille interne, juste comme ça.
Affable, le spécialiste m'a annoncé avec délicatesse qu’il se pourrait que mon ouïe ne revienne jamais. J'ai éclaté en sanglots. Avais-je fait quelque chose de mal? «Ce n’est pas de votre faute, ce sont seulement des choses qui arrivent», m'a-t-il répondu.
Il m’a fait commencer le jour même un traitement intensif. Il ne fallait pas perdre une seule seconde si je voulais avoir des chances, aussi minces soient-elles, que je me rétablisse.
LA MUSIQUE DANS LE SILENCE
Cela fait des années que je m'entraîne, tous les jours, à conserver une attitude positive face à la vie. Aujourd'hui, mes efforts portent des fruits; elle vient à ma rescousse. Depuis la tombée de mon diagnostic, je concentre mon attention sur les belles et bonnes choses qui continuent à se produire dans ma vie dans ce silence accablant et cet acouphène aliénant que je subis. S'il fallait que j'en vienne à souffrir d’une surdité irréversible, je ne cesse de me répéter que j’ai encore une oreille qui tentera de faire le travail pour deux. Mes autres sens s’affineront, s’aiguiseront pour prendre le relais.
Je vis présentement d’espoir seulement, car je ne peux pas me rabattre sur ce qui m’a toujours aidée à faire face aux épreuves: la musique. Maintenant, les sons m’étouffent et m’angoissent. J’ai peur de devoir commencer à faire des deuils. Je pense aux spectacles auxquels je ne pourrai peut-être plus jamais assister de la même manière, mais surtout aux albums que je ne pourrai peut-être plus jamais écouter avec deux oreilles. Aubades de Jean-Michel Blais est le premier qui me vient en tête. La richesse de ses arrangements, la profondeur de ses mélodies, les nuances, la subtilité de chaque note qui vient parfaitement doser l’émotion, c'est un tout qui me procure (me procurait, devrais-je dire pour le moment...) immanquablement des frissons.
IL N’Y A PAS DE HASARD
Difficile de ne pas croire aux synchronicités quand, au moment même où je réalisais à quel point l'album Aubades allait me manquer, Jean-Michel me textait. Nos derniers échanges remontaient à quelques mois; et pourtant, c'est à cet instant précis qu'il me contactait. Je me suis mise à lui expliquer ma condition actuelle, la vie depuis le diagnostic, et je lui ai avoué que justement, son album Aubades allait cruellement me manquer. Que peut-être, plus jamais, je ne pourrai l'écouter avec mon audition d’avant.
Spontanément, avec la grandeur d’âme et la générosité que je lui connais, il m'a répondu: «Je t’en ferai un mix mono».
J’ai pleuré de reconnaissance devant tant de bienveillance.
On ne choisit pas les épreuves qui se déposent sur son chemin et ça ne sert à rien de les appréhender. La vie devient extraordinaire quand on saisit chaque occasion qui se présente pour bâtir des relations significatives avec les gens qui nous entourent. Ce sont ces relations-là qui viendront nous rattraper et nous soutenir lorsqu’on perdra pied. Jean-Michel n'avait aucune idée que le moment qu'il a choisi pour me texter était parfait, que j'avais, à cet instant précis, besoin de lui.