J’ai consulté une médium et voici ce qui m'a été révélé

Assise dans un bureau tout ce qu'il y a de plus banal, je me trouve devant cette dame, une médium, qui s'apprête à me faire vivre ma première constellation familiale. Étais-je sur le point de vivre une expérience... qui allait transformer mon avenir?

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Il peut arriver que des amies me tirent au tarot pour le plaisir ou que je m’en remette aux planètes et à l’astrologie pour expliquer des événements qui sortent de l’ordinaire, mais je le fais surtout à la blague. Je ne crois pas réellement que les astres et les énergies me réservent une destinée particulière, mais je m’y intéresse tout bonnement: avec ouverture et avec une curiosité prudente.

M^me Caroline Argouarch m’explique le déroulement de cette expérience hors du commun que je m’apprête à vivre avec elle, tout en alignant méticuleusement, de façon presque hypnotique, les articulations d’un pantin en bois qui se trouve sur son bureau. Je sais vaguement ce à quoi je m’abandonne, pour en avoir entendu parler d’amies qui ne jurent que par son talent de voyance. La méthode thérapeutique de M^me Argouarch se base sur les énergies et explore les dynamiques invisibles au sein des familles, les blessures transmises sans qu’on le veuille, parfois de génération en génération. Mais pour être honnête, je ne m’attendais pas à grand-chose. J’espérais peut-être rencontrer ou revoir des personnages de mon passé, explorer certains liens familiaux à travers des récits familiers... et en apprendre davantage sur moi-même au passage.

Loin de la voyante lugubre que l’on imagine parfois, la thérapeute se laisse guider par les énergies. Pas de transe spectaculaire ici. En me posant des questions, en émettant des hypothèses, elle parvient à dresser un portrait des membres de ma famille. Mais les vérités qu’elle énonce sont exactes et précises. Et ses intuitions, qu’elle n’aurait pu deviner à moins d’être ridiculement chanceuse, m’amènent à lui faire confiance.

Qu'est-ce que c'est?

Peu à peu, on “entre” dans ma constellation familiale pour explorer les dynamiques, parfois inconscientes, qui circulent dans mon arbre généalogique et qui peuvent avoir un impact sur mon présent. Comme les cernes d’un arbre révèlent son âge et son histoire, les bulles énergétiques qui entourent chacun d’entre nous porteraient la trace de nos expériences et de celles des gens qui nous ont précédés.

En mettant en lumière des enjeux bien identifiés ou, au contraire, une répétition de schémas dont on ignore l’origine, cette thérapie permet de découvrir d’où ils proviennent. Accompagné, on fouille alors les multiples couches de notre bulle énergétique: l’inconscient personnel, lié à nos souvenirs vécus, parfois refoulés; l’inconscient intra-utérin, qui renvoie à ce que nous avons vécu dans le ventre de notre mère; l’inconscient transgénérationnel, qui concerne les mémoires transmises par nos ancêtres; l’inconscient collectif, influencé par le lieu, la culture, l’époque où nous vivons.

Tout comme on chercherait dans les pages d’un livre, on ausculte alors ces vies passées, présentes et futures qui nous racontent. En remontant dans l’histoire de trois ou quatre générations, la constellation familiale identifie des zones qui peuvent créer des déséquilibres transmis inconsciemment. Sans intention de voyeurisme, on déterre des secrets liés à un événement difficile — une disparition, une honte vécue par soi ou par d’autres, une injustice — qui n’a jamais été reconnu ou intégré dans la mémoire familiale pour éclairer le présent et soigner l’avenir.

Le déroulement

Au cours de la première heure, on construit son arbre généalogique, en couchant toutes les informations sur papier. La thérapeute pose des questions: y a-t-il eu des fausses couches ou des enfants mort-nés au sein de la famille? À qui dirais-tu que tu t’identifies le plus parmi les membres de ta famille? Puis elle fait des remarques, de plus en plus précises: cette personne aimait-elle beaucoup la mer? Celle-ci me semble particulièrement triste, as-tu remarqué un changement d’attitude de son côté dans les derniers mois? Alors que ses suppositions tombent pile, je me demande, étonnée par son exactitude, ce qu’elle va bien pouvoir deviner de plus en continuant de creuser.

Pour entamer la seconde heure, elle dispose les personnages principaux de mon histoire sur le plancher en me demandant de les représenter sans dire un mot en choisissant une figurine parmi les jouets d'enfants qu'elle me présente: des poupées, des personnages de jeux vidéos ou d’émissions de télévision. Tour à tour, elle accueille leurs énergies, leurs vibrations, me décrivant comment elle voit chacun de mes proches.

Sans avertir, elle se met à parler au «je» et à prononcer des mots, des expressions qui semblent tout droit sortis de leur bouche. Des tournures de phrases qui ne pouvaient être inventées: elles m’appartiennent à moi et à ma famille. Aussi étrange que cela puisse paraître, en quelques instants, des énergies familières, de personnes décédées et toujours en vie, se sont invitées dans la pièce, prenant parole et déterrant leurs pensées à travers cette thérapeute assise devant moi et que je ne connaissais pas il y a quelques heures à peine.

Certaines précisions me frappent de plein fouet par leur justesse. Des souvenirs refont surface. Ce qu’elle me raconte est si juste qu’il est difficile de croire que cela puisse être de simples coïncidences. On m’apprend des choses sur des grands-parents que je n’ai jamais connus. «Ton grand-père aimait beaucoup sa terre, c’était important pour lui. Il y faisait pousser des tomates», nomme la médium. Mais ce n’est qu’en rentrant chez moi que ma mère pourra me confirmer que mon grand-père, chaque été, cultivait bel et bien un plant de tomates au fond de sa cour. Je vois se déployer devant moi une mosaïque dont je ne connais consciemment que quelques morceaux pour en faire des liens.

Et c’est là l'objectif d’une constellation familiale. Elle ne nous prédit pas l’avenir. On s’adonne à l’exercice parce qu’on sent qu’il y a quelque chose de bloqué en nous, comme un tuyau obstrué. Cette séance cherche à rétablir l’ordre dans l’arbre, à redonner une place à ceux qui en ont été exclus, à nommer qui on est. Elle offre des outils pour mieux comprendre nos blocages, pour donner un sens à nos habitudes, et pour avancer avec plus de clarté.

Une fois la séance terminée, je reste presque figée devant la thérapeute. Il m’est impossible de mettre des mots sur ce qui vient de se passer. Mais j’en mesure déjà le retentissement. Encore aujourd’hui, mes souvenirs de cette séance me paraissent parfois décousus: en écrivant ce texte, je saute du coq à l’âne, je me répète, j’écris dans le désordre. Mais des bribes, des phrases, des images me reviennent, s’expliquent. J’ai, l’espace d’un instant, eu le privilège d’être spectatrice d’une histoire, pourtant inévitablement liée à la mienne. Comme si j’assistais à une pièce de théâtre dont je ne connaissais pas tous les personnages, mais dans laquelle je reconnaissais des fragments de mon histoire.

Que la thérapeute possède ou non un véritable don pour lire ces énergies qui nous échappent m’importe peu, finalement. L’expérience, elle, amène à réfléchir, à se repositionner face à ce qui nous appartient vraiment et à ce qui relève de combats hérités, portés malgré nous. On met des mots sur des silences, on éclaire des zones longtemps restées dans l’ombre, on s’interroge sur les poids que l’on croyait devoir porter, bref on sème une graine: celle de la possibilité de se sentir plus léger, plus libre, prêt à reprendre le contrôle de la narration.

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