Devon Levi veut faire changer les mentalités


Jean-François Chaumont
Jadis une pépinière pour la LNH, les gardiens originaires du Québec représentent maintenant un phénomène rare. Mais à Buffalo, un Montréalais de 21 ans cognera à la porte du vestiaire des Sabres dès cet automne.
Après un court passage prometteur en fin de saison l’an dernier, Devon Levi rêve maintenant de s’installer pour de bon dans la ville de Gilbert Perreault.
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Il suivrait ainsi les traces de Marc-André Fleury (Wild du Minnesota) et Samuel Montembeault (Canadien de Montréal), les deux uniques gardiens réguliers de la Belle Province en 2022-2023.
«Je suis tellement excité, a dit Levi dimanche lors d’un entretien téléphonique au Journal. J’ai joué sept matchs l’an dernier en fin de saison avec les Sabres et j’ai gagné en confiance. J’ai vraiment aimé cette expérience. J’ai hâte au camp, j’ai hâte de retrouver les gars et j’ai hâte de resauter sur la glace.»
Levi, un modeste choix de 7e tour des Panthers de la Floride en 2020 et acquis par les Sabres dans la transaction pour Sam Reinhart au mois de juillet 2021, a répondu aux attentes à ses premiers pas dans la LNH.
Faisant le saut directement des Huskies de l’Université Northeastern aux Sabres au mois de mars dernier, il a signé cinq victoires en sept matchs en plus de maintenir une moyenne de 2,94 et un taux d’efficacité de ,905.
«Depuis la fin de la saison, j’ai eu du temps pour apprécier ce que je venais de vivre, a-t-il rappelé calmement dans un français impeccable. J’ai atteint mon rêve. Mais c’est juste le début. Je veux écrire un autre chapitre. Je ne désire pas seulement jouer dans la LNH, mais devenir un gardien qui s’établit dans cette ligue et qui devient important.
«J’ai toujours cru en moi, a-t-il poursuivi. Je savais que je pouvais jouer au niveau de la LNH. J’ai découvert le rythme de la LNH. C’est une bonne chose pour le côté mental. Je connais mieux le niveau. Mais je ne sais pas encore à quoi ressemble la réalité d’une saison complète. J’ai hâte de découvrir ça.»
Une chaude lutte à prévoir
Il n’y a rien de coulé dans le béton à la position clé de gardiens chez les Sabres. Eric Comrie, Ukko-Pekka Luukkonen et Levi se battront pour deux postes au prochain camp. Comrie (1,8 million) et Luukkonen (0,837 million) ont des contrats à un seul volet, mais ils n’ont rien d’un gardien indélogeable comme Igor Shesterkin ou Jake Oettinger.

Quand on lui demande s’il s’imagine plus à Buffalo pour l’ouverture de la saison ou à Rochester dans la Ligue américaine, le Montréalais cache assez bien ses intentions.
«Je me concentre juste sur le prochain arrêt, je dois arrêter la rondelle. Je ferai de mon mieux et je ne me poserai pas trop de questions. Je devrai être la meilleure version de moi. Si j’y parviens, les choses se placeront d’elles-mêmes. Je ne décide pas où je jouerai. Les entraîneurs et le DG feront ce choix selon mon niveau de jeu.»
De ses sept départs avec les Sabres, Levi gardera toujours une place spéciale dans son cœur pour le tout premier. Il avait bloqué 31 tirs dans un gain de 3 à 2 en prolongation contre les Rangers au KeyBank Center.
Auteur du but gagnant lors de cette rencontre du 31 mars, Jeff Skinner s’était rué vers son jeune gardien, comme le reste de ses coéquipiers.
«C’était incroyable, a-t-il répliqué. Les joueurs étaient tellement heureux pour moi. C’était un bon sentiment. Je ne l’oublierai jamais. Je trouvais ça spécial de voir tous les gars se diriger vers moi. Les entraîneurs étaient aussi heureux. Ma famille et mes amis avaient aussi fait le voyage à Buffalo. Je revois encore la scène quand Skinner met la rondelle dans le filet.»
√ Kevin Mandolese, un Lavallois de 23 ans, a également joué trois matchs l’an dernier dans la LNH, recevant ses premiers départs avec les Sénateurs d’Ottawa.
Levi: un petit, mais ce n’est pas un désavantage
Des 107 gardiens qui ont bloqué une rondelle dans la LNH l’an dernier, on en répertorie seulement 13 qui mesurent 6 pi et moins.
Devon Levi fait partie d’un petit groupe de neuf gardiens qui arrêtent le ruban à mesurer à exactement 6 pi. Il y a quatre autres hommes masqués à 5 pi 11 po.

Si Levi avait la stature typique des géants gardiens d’aujourd’hui, il aurait probablement connu son sort bien avant le septième tour au repêchage de 2020.
À 6 pi et 172 lb, le Montréalais a eu à se battre contre un préjugé bien présent, celui de sa taille. Mais il n’a jamais perçu cette réalité comme un désavantage.
«Je dirais que ça m’a aidé, a-t-il expliqué. Pour être reconnu, j’avais besoin de jouer du très bon hockey. Ça me poussait à me dépasser, à devenir la meilleure version de moi-même. Il y a plusieurs personnes qui pensent que plus un gardien est grand, plus il arrêtera de rondelles. Mais il n’y a pas juste la grandeur. Les mentalités changent un peu. Il y a de bons gardiens plus petits. À Nashville, Juuse Saros est l’un des meilleurs de la LNH.
«Si je peux faire rêver un gardien plus jeune qui est plus petit, ça me rend réellement heureux. La technique, la rapidité, la souplesse et le désir de gagner comptent plus que la grandeur.»
Sortir d’une reconstruction
Levi, du haut de ses 6 pi, fera partie d’un jeune noyau de joueurs des Sabres qui voudront sortir de cette éternelle reconstruction à Buffalo avec 12 saisons d’affilée sans participer aux séries.
«C’est un mariage parfait pour moi avec les Sabres, a souligné le médaillé d’or au Championnat du monde à Tampere [Finlande] et Riga [Lettonie] avec l’équipe canadienne à titre d’adjoint à Samuel Montembeault. Avant mes débuts à Buffalo, je savais déjà que j’étais pour me joindre à une équipe jeune qui a comme mission de grandir. Il y a plusieurs bons jeunes joueurs. Les Sabres veulent maintenant gagner et s’améliorer.»
À l’attaque, il y a les Tage Thompson, Dylan Cozens, Alex Tuch, Jack Quinn et JJ Peterka. À la ligne bleue, il y a Rasmus Dahlin et Owen Power. Il ne manque qu’un bon gardien aux Sabres. Et ça pourrait bien être Levi.