Invasion russe en Ukraine: les employés de l'ambassade canadienne laissés à eux-mêmes

Raphaël Pirro
Affaires mondiales Canada aurait laissé à leur sort la cinquantaine d’employés ukrainiens de son ambassade à Kyïv malgré le danger qui pesait sur eux après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, selon The Globe and Mail.
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Trois diplomates cités sous le couvert de l’anonymat ont raconté au quotidien que la haute direction de l’ambassade avait été informée par les services de renseignements des Five Eyes (États-Unis, Grande-Bretagne, Australie, Nouvelle-Zélande et Canada) qu’une invasion par la Russie était plausible et que son personnel ukrainien serait particulièrement en danger dans un tel contexte.
Or, le gouvernement canadien aurait intimé la direction de l’ambassade de ne pas révéler ce scénario à ses travailleurs ukrainiens, sans envisager de scénario de rechange advenant une invasion, laissant ainsi les employés à leur sort.
Peu avant la fermeture de l’ambassade de Kyïv et l’évacuation du personnel vers Lviv, le reste des employés canadiens ont, eux aussi, reçu l’ordre de ne pas faire part du danger qui guettait leurs collègues, toujours selon le Globe.
Ottawa était conscient que ces derniers auraient pu faire partie de listes détaillant les cibles potentielles de Moscou. Les personnes figurant sur ces listes sont particulièrement susceptibles d’être poursuivies, détenues ou même tuées.
Des employés canadiens passés et actuels de l’ambassade ont même cotisé de leur poche pour aider leurs collègues ukrainiens. Une somme de près de 90 000$ ainsi amassée aurait aidé de nombreuses personnes, particulièrement des femmes, à fuir le pays.
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Ottawa aurait agi en cas de menace directe
Dans une déclaration transmise à l’Agence QMI, l’attaché de presse de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a assuré que «si la ministre avait de l’information selon laquelle des employés recrutés sur place étaient directement menacés, elle aurait pris les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité».
Le ministère affirme par ailleurs que des «breffages réguliers» sur la sécurité en Ukraine avaient lieu avec le personnel recruté sur place et que des hauts gradés d’Affaires mondiales étaient en contact «constant» avec celui-ci après l’invasion.
«Depuis le début de la guerre, nous avons soutenu les employés recrutés sur place dans les décisions individuelles qu'ils ont prises pour assurer la sécurité de leur famille. Ils ont été informés des voies d'immigration vers le Canada qui s'offraient à eux s'ils choisissaient de quitter le pays. Nous avons organisé des modalités de travail flexibles afin qu'ils puissent travailler depuis un autre endroit s'ils décidaient de quitter Kyïv. Ils ont également été informés que leurs salaire et avantages sociaux ne seraient pas touchés par l'arrêt des activités de l'ambassade», a déclaré Adrien Blanchard, attaché de Mme Joly.
Ottawa avait ordonné le déplacement des employés de son ambassade de Kyïv vers la ville de Lviv le 12 février dernier, soit près de deux semaines avant le début de l’invasion ayant eu lieu le 24. Ce jour-là, l’ambassade a finalement été déplacée en Pologne.