Intimidation dans l'autobus scolaire: «Ma fille n’a pas à devenir le “bouncer” de son frère»
La turbulence et le harcèlement entre élèves sont souvent mal ou pas gérés par les chauffeurs


Dominique Scali
Savez-vous vraiment ce qui se passe dans l’autobus jaune de votre enfant? Chauffeurs vulgaires ou agressifs, élèves turbulents hors de contrôle, enfants égarés. Le Journal a épluché des centaines de plaintes en lien avec le transport scolaire.
Il se faisait traiter de «gros lard» par un camarade. Au lieu d’intervenir auprès de l’agresseur, on lui a recommandé de s’asseoir près de sa grande sœur, un exemple parmi d’autres du manque d’encadrement de l’intimidation dans plusieurs autobus scolaires.
«Ma fille n’a pas à devenir le bouncer de son petit frère», lance Mathieu Sauvé, résident de Lanaudière, à propos de la manière «à l’ancienne» dont l’intimidation de son garçon a été gérée par un transporteur scolaire.
Depuis le début de l’année, Mathis, 12 ans, recevait des commentaires désobligeants de la part d’un camarade de classe, tant à l’école que dans l’autobus.
«Il me traitait de gros lard», rapporte Mathis.
«J’ai déjà entendu [le garçon] traiter mon frère de bouboule», abonde sa grande sœur, Noémye, 15 ans, qui prend le même autobus pour se rendre à l’école Thérèse-Martin de Joliette.
Ce genre de situation arrive régulièrement, si l'on se fie aux centaines de plaintes analysées par Le Journal en lien avec le transport scolaire.
Un «service séparé»
Après une accalmie cet automne, l’intimidation a repris de plus belle au retour des Fêtes, cette fois-ci avec des bousculades, jambettes et coups de pied, relate Mathis.
L’école a rapidement pris la situation au sérieux et des interventions ont eu lieu auprès de l’intimidateur, impliquant une éducatrice spécialisée et la direction.
«Pour nous, ça a été bien géré. On n’a pas eu à se fâcher avec l’école», estime M. Sauvé.
Le seul bémol: on a fait comprendre aux parents que ce qui se passait dans l’autobus scolaire relevait d’un «service séparé».
Or, la responsabilité de ce qui se passe dans l’autobus relève tout autant du CSS que du transporteur.

C’est toujours au CSS qu’un parent devrait s’adresser, bien que plusieurs se fassent dire le contraire, observe Sylvain Martel, porte-parole du Regroupement des comités de parents autonomes du Québec.
«Ça a dérapé»
On a ainsi indiqué aux parents qu’ils devaient s’adresser directement à la compagnie de transport. «C’est là que ça a dérapé», résume Hélèna Riverin Mercher, à propos de sa discussion avec une répartitrice à la mi-janvier.
«La réponse [de la compagnie], c’était que ce serait plus facile que Mathis change de place», et donc qu’il s’assoie loin de ses amis.
«Voyons donc, on est en 2025. Ça ne se fait plus, de punir la personne qui est victime», s’étonne M. Sauvé.
Peu après, le chauffeur serait intervenu auprès des deux garçons en abordant le problème comme s’il s’agissait d’un conflit, et non d’intimidation. Il aurait également demandé à Noémye de surveiller son petit frère.
Pour M. Sauvé, sa fille n’a pas à «servir de bouclier» parce qu’un chauffeur est dépourvu pour gérer les situations entre élèves. «On dirait qu’il y a un manque de formation», ajoute-t-il.
Heureusement, depuis la fin janvier, l’intimidation a cessé. «Mais on sent que dans l’autobus, c’est plus fragile qu’à l’école», conclut Mme Riverin.
De son côté, le CSS des Samares dit s’assurer «que le transporteur voit à ce que le chauffeur prenne les dispositions nécessaires pour prévenir et contrer toute forme d’intimidation», indique par courriel Hélène Duchaine, du service des communications.