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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Jean Rigaud Fontaine: Il reportait sans cesse sa retraite

<strong>Jean Rigaud Fontaine</strong><br><em>72 ans</em>
<strong>Jean Rigaud Fontaine</strong><br><em>72 ans</em> Illustration, Élisabeth Simard
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Photo portrait de Nora T. Lamontagne

Nora T. Lamontagne

2021-03-13T06:00:00Z
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La COVID-19 a fauché la vie d’un travailleur de la santé de 72 ans qui repoussait sans cesse sa retraite tant il adorait son boulot.

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« Il disait tout le temps qu’il allait continuer tant que la santé le lui permettrait, “avec l’aide de Dieu” », se remémore sa fille adoptive, Sophia Chérubin, qui lui demandait chaque année quand il arrêterait de travailler. 

Jean Rigaud Fontaine, auxiliaire aux services de santé à domicile, prenait soin de ses patients avec douceur et avec cœur, « comme si c’était des parents à lui », se rappelle Mme Chérubin. 

La collection de cartes de remerciements qu’elle a découverte en vidant son appartement après son décès le 15 janvier est là pour en témoigner. 

Une vocation

Arrivé d’Haïti lors d’une vague de migration des années 1970, son père avait d’abord travaillé en restauration avant de trouver sa véritable vocation dans le milieu de la santé. 

Le septuagénaire y œuvrait depuis bientôt 25 ans et n’avait aucune intention d’arrêter, même s’il aurait pu prendre depuis longtemps sa retraite du CLSC de Saint-Laurent, à Montréal. 

Bien que son ardeur au travail ait impressionné ses proches, elle apportait aussi son lot d’inquiétude. 

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Quand la deuxième vague a commencé, son amie d’enfance, Marie Monique Sénat, elle-même préposée aux bénéficiaires retraitée, a tenté de le raisonner. 

« Je lui ai dit : “Tu vas avoir 72 ans... Peux-tu arrêter de travailler dans ce métier-là ?” »

  • Écoutez la journaliste Nora Lamontagne ici

Conscient des risques, l’auxiliaire faisait tout en son pouvoir pour minimiser les risques de contamination.  

Hélas, le coronavirus ne lui aura pas laissé le temps de recevoir sa première dose de vaccin, qu’il attendait avec impatience. 

Ses premiers symptômes se sont manifestés avant Noël après un contact avec un cas au boulot et il a reçu le diagnostic le 29 décembre. 

Puis tout a déboulé. Sa fille aînée n’a pas eu le temps de prendre un vol de l’Alberta pour être présente à ses derniers moments. 

« Sa mort a été brusque et soudaine. Au moins, avec une maladie en phase terminale, tu peux te préparer mentalement... », regrette Sophia Chérubin,
36 ans, qui n’avait pas vu son père depuis juillet. 

Un père modèle

M. Rigaud Fontaine a toujours été généreux et présent pour elle et sa sœur, Samantha, depuis leur petite enfance. 

« Il a fait tout ce qu’un père peut faire pour ses enfants. Ses filles, c’était les prunelles de ses yeux », témoigne Edy Chérubin, le parrain de Sophia. 

Grand voyageur depuis toujours, le travailleur infatigable rêvait de retourner prochainement en Espagne. 

Sophia Chérubin raconte qu’il a plutôt passé ses dernières vacances à Montréal, à trouver le temps long entre les quatre murs de son appartement.

« Il se sentait fortuné et béni de travailler encore », témoigne-t-elle. 

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