«Il a perdu espoir qu'on le traite»: la sœur d’un patient qui s’est enlevé la vie à l’Institut Douglas gagne sa bataille judiciaire

Laurence Morin
L'Institut universitaire montréalais en santé mentale Douglas et un psychiatre ont été condamnés mercredi par la Cour du Québec à verser 40 000$ à la sœur d'un patient qui s'est suicidé en 2018 durant son hospitalisation.
Sept ans après les faits, le juge Patrick Choquette a établi que le décès de Jean-Sébastien Gélinas, 40 ans, constituait une «conséquence prévisible» des manquements de l'établissement et d'un psychiatre, notamment concernant le suivi médical, la surveillance du patient et les mesures de sécurité.
Pour la sœur de la victime, Mélanie Gélinas, ce jugement représente une victoire, mais met surtout en lumière d'importantes défaillances dans la prise en charge d'un patient souffrant de dépression majeure.
«J’ai eu gain de cause, ça c’est à la hauteur. Je suis très très satisfaite du règlement judiciaire», affirme-t-elle, au micro de Mario Dumont jeudi à QUB radio et télé, diffusé au 99,5 FM à Montréal.
«C’est sûr que ça ne ramènera pas mon frère, poursuit Mme Gélinas. [...] Si des choses comme ça se reproduisent, ce sera insatisfaisant. Mais j’ose espérer que ça fait réfléchir tous les acteurs des lieux.»
Jean-Sébastien Gélinas entamait sa cinquième semaine d'hospitalisation à l'Institut Douglas lorsqu'il a mis fin à ses jours. Pour sa sœur, la tragédie est d'autant plus difficile à accepter qu'elle s'est produite dans un établissement où les patients devraient être «surveillés, soignés et encadrés».
«Mon frère n’était pas là de force, il restait là de son plein gré, parce qu’il avait confiance en ce système-là», précise-t-elle, notant que M. Gélinas venait tout juste de terminer ses études en soins infirmiers. «Les soins qu’il a reçus n’étaient pas du tout à la hauteur de ce à quoi on s’attendait», ajoute-t-elle.
Le jugement a révélé d'importantes lacunes dans la prise en charge médicale. Jean-Sébastien n'aurait eu que très peu d'entretiens avec le psychiatre responsable de son dossier, lequel n'aurait pas «cherché à établir avec son patient une relation de confiance mutuelle».
Selon le document, le psychiatre en question, le Dr David Bloom, nie cependant tout manquement dans le diagnostic, le traitement ou les soins, tandis que l'hôpital rejette toute faute liée à la sécurité ou à la surveillance du patient.
«L’alliance thérapeutique, je pense que ce n’est pas un secret pour personne, quand on est soigné dans un hôpital [...] la relation avec son médecin traitant est extrêmement importante, souligne la sœur de la victime. Dans une question de santé mentale, c’est peut-être encore plus criant.»
Pour Mélanie Gélinas, son frère ne s’est pas seulement enlevé la vie parce qu’il était malheureux, mais plutôt parce qu’il avait «perdu espoir qu’on le traiterait».
«Le juge a utilisé l’expression “crescendo de désespoir”. Mon frère, quand il est arrivé au début du mois de juin, il avait des raisons d’être malheureux, indique-t-elle. Puis quand il est décédé au mois de juillet, il est parti pour des raisons autres.
Voyez l'entrevue complète dans la vidéo ci-dessus.