IA: le Québec doit agir vite pour rattraper son retard

Marie-Laurence Delainey
Alors que les États-Unis investissent massivement en intelligence artificielle, le Québec, qui était jadis un leader dans le secteur, doit agir rapidement pour rattraper son retard, préviennent des experts.
«Dans les années 2010, on était à l’avant-garde sur le plan de l’intelligence artificielle [IA]. On a pris un retard, depuis que l’IA générative est arrivée sur le marché», explique le cofondateur de Moov AI, une des plus importantes entreprises québécoises en IA, Olivier Blais.
Selon lui, la province se démarquait à une autre époque, au début de l’IA. «L’IA traditionnelle, c’était pour être capable de faire de la prédiction, recommander du contenu par exemple sur YouTube. [...] L’IA générative, tu poses des questions, tu obtiens des réponses très réalistes. Cette nouvelle mouture de l’intelligence artificielle est clairement dominée par les Américains», explique-t-il.
Course aux investissements
Une entreprise chinoise est venue bouleverser le monde de l’IA avec le lancement le 20 janvier de DeepSeek, l’application faisant compétition à moindre coût à l’agent conversationnel américain ChatGPT.
Avec son projet Stargate et ses investissements de 500 G$ dans des infrastructures en IA, le président Donald Trump veut prendre encore plus d’avance dans la course. En comparaison, le gouvernement de Justin Trudeau a annoncé l’an dernier des mesures totalisant 2,4 G$ dans le secteur.
«Comparé à Stargate, c’est une goutte d’eau. Même si on a des cerveaux en IA avec Mila, entre autres, il faut continuer à investir pour que nos entreprises commencent à mettre sur pied de l’innovation avec de l’IA, qu’elles soient capables d’avoir de la main-d’œuvre», soutient Myriam Côté, la directrice en recherche et innovation de JACOBB, un centre qui offre entre autres des formations sur le sujet.
Selon le Conseil de l’innovation du Québec, près de 500 entreprises québécoises se spécialisent dans l’intelligence artificielle. Parmi elles, Keatext, qui offre des solutions d’IA pour maximiser le rendement de ses clients. À l’instar de plusieurs dirigeants d’entreprise, sa fondatrice soutient que le Canada devrait avoir ses propres infrastructures d’hébergement de données.
«L’indépendance, elle est fondamentale, indépendamment de Trump. [...] Notre stock à nous est sur Amazon. Aujourd’hui, on travaille avec des compagnies américaines. [...] On n’a pas d’indépendance par rapport à ça. Je crois beaucoup à l’internationalisation. Mais il devrait y avoir des services essentiels comme ce genre de services dont la nation est propriétaire. Il faut que ce soit une entreprise canadienne», explique Narjes Boufaden, la fondatrice.
Stockage de données
Le cofondateur de Moov AI trouve aussi qu’un système de stockage canadien permettrait d’assurer une pérennité. «Dans le cas où il commence à y avoir du protectionnisme au niveau de l’accessibilité aux données. Si les grandes entreprises, les Google, Amazon, Microsoft, Facebook, décident de fermer leur environnement de données, on aurait quand même des infrastructures», dit-il.