Huit jours au «trou» pour avoir volé de la nourriture: une histoire «loin d’être unique», selon une experte
Marie-Anne Audet
L’histoire d'une jeune femme atteinte d'une déficiente intellectuelle, qui a passé huit jours au «trou» à l’Établissement de détention Leclerc de Laval après avoir volé de la nourriture, est «loin d’être unique», a déploré la directrice générale de la Société québécoise de la déficience intellectuelle.
«Florence», atteinte d’une maladie génétique rare qui l’empêche de se sentir rassasiée, a passé un séjour infernal en prison le mois dernier après s’être introduite chez un voisin pour se servir dans son frigo, a rapporté La Presse jeudi matin.
Amélie Duranleau, qui a réagi à l’affaire au micro de Richard Martineau à QUB radio et télé, a comparé la situation à une «crise humanitaire».
• Sur le même sujet, écoutez cet épisode balado tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
«Il y a très peu d’endroits pour héberger les personnes qui ont une déficience intellectuelle. [...] Évidemment, ils vivent avec une condition. Ce n’est pas une maladie. Donc, ça prend vraiment des lieux qui sont sécuritaires, qui sont sains, qui sont adaptés aux besoins de chacun parce qu’évidemment, la déficience intellectuelle, c’est aussi un spectre», a-t-elle illustré.
«Cette situation-là, c’est vraiment une conséquence de manque d’endroits pour pouvoir être logé. C’est totalement un droit d’habiter dans un endroit qui nous convient», a-t-elle poursuivi.
Ces ressources sont rares et parfois, les familles n’ont pas le choix de jeter leur dévolu sur un hébergement qui n’est pas nécessairement adapté aux besoins de leur proche.
«Comme il n’y a pas beaucoup d’endroits, il y a des listes d’attente interminables. Pour trouver un endroit pour être hébergé, ça peut prendre jusqu’à trois ans, si ce n’est pas plus. Parfois, on est même délocalisé de sa région pour devoir être hébergé. C’est vraiment affreux. On n’a pas même le choix d’accepter là où on nous indique où on devrait habiter et on craint de dénoncer [s’il y a des abus]. Évidemment, il y a plusieurs situations de maltraitance qui surviennent dans les ressources intermédiaires», a dit la directrice.
Certains d’entre eux se retrouvent même à la rue, par manque de place.
Mme Duranleau a déploré le manque de connaissance et de sensibilisation de certains acteurs du milieu judiciaire par rapport à la problématique.
«Les personnes qui ont une déficience intellectuelle ne devraient jamais être en situation de judiciarisation. En fait, il faut vraiment qu’il y ait une bonne connaissance de la déficience intellectuelle. Donc, c’est vraiment une conséquence du manque de sensibilisation des personnes qui ont pris des décisions pour cette personne-là, notamment le tribunal», a-t-elle souligné.
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