Huit ans plus tard: début du procès de Frank Zampino, ex-numéro 2 de la Ville de Montréal
Il est accusé en lien avec un stratagème d’obtention de contrats publics dans la métropole


Camille Payant
L’ex-numéro 2 de la Ville de Montréal Frank Zampino et quatre collaborateurs subissent finalement leur procès en lien avec un stratagème d’obtention de contrats publics dans la métropole, huit ans après avoir été arrêtés par l’UPAC.
«Frank Zampino a mis sur pied et orchestré un système de collusion vers 13 firmes de génie-conseil en échange de financement politique occulte», a souligné le procureur de la Couronne, Me Nicolas Ammerlaan, lors de l’ouverture du procès lundi matin au palais de justice de Montréal.
Selon la théorie de la poursuite, ce système a permis d’octroyer frauduleusement 34 contrats entre 2004 et 2009 à Montréal d’une valeur totale de plus de 160 M$.
En échange, les firmes devaient offrir une redevance de3 % au parti Union Montréal du maire de l’époque, Gérald Tremblay.
«Les firmes se voyaient à tour de rôle désignées gagnantes, souvent même avant que l’appel d’offres ne soit dévoilé», a souligné Me Ammerlaan, qui fait équipe avec Mes Daniel Martel-Croteau et Simon Murray.
Selon la poursuite, les 13 firmes visées par ce système ont également dû financer les élections de 2005, ce qui a «directement porté atteinte à l’intégrité de la démocratie municipale». Les sommes variaient entre 50 000$ et 200 000$ en fonction de la taille de l’entreprise.
Frank Zampino, qui était à l’époque président du comité exécutif de la Ville de Montréal, avait «toujours le dernier mot», a précisé Me Ammerlaan. Il était secondé par Bernard Trépanier, directeur du financement du parti. Ce dernier n’aura toutefois jamais subi son procès, puisqu’il est décédé en 2018.
Coaccusés
Seulement trois patrons de firmes de génie-conseil, Kazimierz Olechnowicz, de CIMA+, Normand Brousseau, de Teknika HBA, et Bernard Poulin, du Groupe SM, subissent maintenant leur procès.

La Couronne a annoncé qu’une douzaine de présidents et vice-présidents des 10 autres firmes impliquées dans ce système de collusion prendront la barre pour admettre leur propre participation et témoigner des montants qu’ils ont dû verser à Union Montréal pour faire partie du stratagème.
L’ingénieur Michel Lalonde, qui a agi comme «porte-parole» pour «coordonner la collusion avec les firmes», viendra également témoigner de la participation criminelle des accusés.
Longue saga
Frank Zampino et Bernard Poulin assistaient à l’audience par visioconférence en raison d’enjeux de santé. Une portion de la journée a été consacrée au dépôt d’une partie de cette volumineuse preuve documentaire.

L’ouverture de ce procès, présidé par la juge Silvie Kovacevich, survient huit ans après le dépôt des accusations. En 2019, la juge Joëlle Roy a ordonné l’arrêt des procédures en raison de la violation des droits des accusés dans ce dossier.
Une partie de la preuve reposait sur des écoutes électroniques. Or, des centaines d’entre elles impliquaient des avocats et étaient donc protégées, mais les enquêteurs y ont eu accès.
Le dossier a été porté en appel, où on a donné partiellement raison à la Couronne et ordonné un nouveau procès. La preuve obtenue par écoute électronique ne pourra toutefois pas y être présentée.
Qui sont les accusés?
Frank Zampino, 65 ans, ex-président du comité exécutif de la Ville de Montréal
Robert Marcil, 60 ans, ex-directeur des travaux publics de Montréal
Bernard Poulin, 73 ans, ex-président de la firme de génie Groupe SM
Kazimierz Olechnowicz, 72 ans, ex-PDG de la firme CIMA+
Normand Brousseau, 80 ans, ex-président de la firme Teknika HBA