«J’avais l’impression d’être dans un champ de mines»: déçu, Jocelyn Thibault annonce sa démission

Kevin Dubé
Deux ans et un peu moins de quatre mois après avoir fait son entrée comme directeur général de Hockey Québec, Jocelyn Thibault quitte son poste. Échaudé par la lourdeur de la structure organisationnelle et une résistance constante des régions, Thibault partira officiellement en juin et sera remplacé par l’ancien arbitre de la LNH, Stéphane Auger.
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La nouvelle est venue comme une surprise. Après tout, Thibault était arrivé en novembre 2021 en insufflant un vent de renouveau au sein de la fédération provinciale de hockey sur glace. À l’interne, la grande majorité des intervenants se disaient fort satisfaits de son travail et, surtout, de son désir d’y aller d’une importante réforme des façons de faire.

Mais cette réforme, Thibault a vite réalisé qu’elle ne se ferait pas aussi facilement qu’il ne l’aurait souhaité. D’importantes résistances au niveau des organisations régionales ont fait en sorte qu'il était tout simplement impossible de faire avancer l’immense paquebot dont il était aux commandes ou, du moins, pas à la vitesse souhaitée.
«J’avais l’impression d’être dans un champ de mines. Il n’y a aucune prévisibilité et on est constamment en gestion de crise. On doit réussir à redresser la gouvernance de nos instances et c’est un risque que je n’étais plus capable de prendre. L’imprévisibilité, pour un gestionnaire, c’est extrêmement insécurisant.»
Appelé à quelques reprises à expliquer concrètement, comment cette imprévisibilité se traduisait sur le terrain, Thibault a préféré ne «lancer personne en dessous de l’autobus».
Une structure lourde
Thibault a souvent déploré la lourdeur de la structure du hockey québécois. Pour résumer, Hockey Québec est régie par un conseil d’administration et compte un peu plus de 20 employés à son siège social, à Montréal. Toutefois, chacune des 14 régions administratives du Québec possède sa propre instance qui gère, de manière quasi indépendante, les activités de son secteur, possédant chacun leur propre conseil d’administration.
«Tout le monde est un peu maître chez eux, explique Thibault. Quand tu te retrouves à une certaine hauteur, tu n’as pas de contrôle sur la direction que tu veux aller.»
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Il devenait donc extrêmement difficile, pour Thibault, de faire avancer tout le monde dans la même direction puisqu’il devait se frotter constamment à la résistance de ces instances, habituées à se gérer de manière autonome et, souvent, réfractaire aux changements.
«J’avais l’impression d’être dans une chaloupe, sans rames et dans une mer très agitée.»
Travailler ensemble
Thibault ne dresse toutefois pas un constat d’échec absolu.
«Déçu de lui-même» de ne pas avoir été en mesure de mener son mandat à terme comme il l’aurait souhaité, il assure que Hockey Québec se dirige dans la bonne direction et qu’elle se rendra à la terre promise... mais moins vite que prévu.
«J’ai rapidement réalisé dans mon mandat que ce serait un marathon, mais aussi une course à relais. Je suis convaincu que Hockey Québec va y arriver. Je le vois, il y a tellement de bonnes choses qui se passent.»
Une réforme de la gouvernance à même le conseil d’administration de HQ a été entamée sous le règne de Thibault.
«Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas le faire à l’échelle provinciale», estime-t-il.
Ainsi, il continuera jusqu’en juin afin de conclure son mandat de livrer les grandes orientations stratégiques de la fédération, après quoi il partira officiellement.
Trop pour une seule personne?
En lien avec cette réforme de la gouvernance, Hockey Québec a décidé de scinder le poste de directeur général en deux. C’est pourquoi ils ont annoncé l’embauche de Stéphane Auger dans le rôle de directeur exécutif aux opérations. Un autre poste de direction exécutive au développement et mise en valeur du hockey sera aussi créé.

Dans le cas d’Auger, il voit ce défi avec enthousiasme. Ce dernier a été témoin de conflits internes qui faisaient reculer le hockey scolaire et a jeté les bases de l’intégration de la LHPS et de la LHIQ au Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ). Une expérience qui le pousse à croire qu’il est possible de rallier tout le monde autour d’un projet commun, même dans le monde conservateur du hockey.
«Quand on a voulu procéder à l’harmonisation du hockey scolaire, tout le monde était campé dans leurs positions. Il faut réunir tout le monde, échanger et voir comment on peut travailler tous ensemble. Je n’ai pas la solution magique, mais on va s’asseoir avec les intervenants et faire avancer les différents dossiers.»
Depuis novembre dernier, Auger agissait comme directeur de l’arbitrage, sécurité des joueurs et joueuses et réglementation, à Hockey Québec.