Grossesse ectopique et hémorragie interne: Rosalie Taillefer-Simard raconte son expérience
On s'informe sur la Semaine québécoise des personnes handicapées au quebec.ca.

Michèle Lemieux
Porte-parole de la 29e édition de la Semaine québécoise des personnes handicapées, Rosalie Taillefer-Simard a démontré à plusieurs reprises qu’elle assume sa différence. Elle relève aujourd’hui un nouveau défi en faisant de la suppléance auprès des jeunes, et sa résilience s’est encore une fois manifestée récemment, lorsqu'une grossesse extra-utérine lui a fait perdre un bébé.
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Rosalie, vous êtes à nouveau porte-parole de la Semaine québécoise des personnes handicapées. Est-ce un mandat que vous acceptez toujours avec joie?
Oui, je suis très contente d’entreprendre ma cinquième année de suite. Cette année, je suis co-porte-parole avec Luca Patuelli (Lazylegz), qui a participé à Révolution. Nous formons vraiment un beau duo. Nous avons encore du travail à faire, car je remarque qu'il y a encore des personnes qui ne sont pas sensibilisées à la différence. Par exemple, l’année dernière, j'ai publié sur Facebook une vidéo de moi parlant au téléphone pour montrer qu'une personne malentendante peut le faire, mais qu’avec les bruits ambiants, c’est parfois difficile. Une personne a écrit en commentaire: «Si tu es malentendante, pourquoi as-tu un cellulaire?»
Quel manque d’empathie!
C’est pour cette raison que le thème de cette année est «On perd de vue le potentiel quand on voit seulement la différence». Des gens s’arrêtent au handicap, mais il faut aller au-delà pour apprendre à connaître la personne, découvrir ses qualités. C’est quand on apprend à connaître la personne que l’amour peut grandir.
Il faut admettre que vous ne vous êtes jamais laissée limiter par la surdité.
On dirait que j’utilise ma différence pour devenir plus forte. Devant un obstacle ou une embûche, je continue. Je ne me referme pas sur moi-même. Je dois régulièrement expliquer que je suis malentendante, et parfois demander qu’on articule plus. Ça fait partie de ma vie. C'est une question d'acceptation de soi. Je pense que, quand on s'accepte, on n'a pas de difficulté à communiquer notre réalité.
Vous n’avez jamais été complexée par votre différence?
Je crois que ce qui m’a beaucoup aidée, c’est d’avoir un frère qui était comme moi. Olivier et moi étions dans la même situation. Je remarque que c’est souvent plus difficile pour les personnes en situation de handicap qui n’ont pas de personnes comme elles dans leur entourage. Je fais partie du conseil d'administration d'AlterGo, un organisme qui organise des sports et loisirs pour les personnes en situation de handicap. Je remarque comme elles sont fières de relever un défi. Elles ne se sentent pas seules dans la société.
Vous relevez depuis peu un nouveau défi, semble-t-il?
Oui, je fais de la suppléance et j’adore ça! J’ai passé une entrevue à la commission scolaire et j’ai été acceptée. Je n’avais jamais enseigné de ma vie, mais j'ai failli étudier en enseignement. J’avais finalement choisi les arts plastiques. Je fais du remplacement une fois par semaine à l'école primaire où j’ai étudié jusqu’en deuxième année. C’est une école extraordinaire et je me sens proche de ces élèves. Je sais ce qu’ils traversent.
Vous reste-t-il du temps pour votre passion, la peinture?
Oui, car ma petite Adélie, qui a 20 mois, est à la garderie. Je compte me remettre à la peinture. Je m’entraîne avec ma mère au Studio Moov. J’aime être une mère. En devenant maman, j’ai découvert la force de cet amour. Avant d'avoir ma fille, je disais à mon chum que je voulais qu’on s’aime tous de manière égale. Je ne voulais pas aimer ma fille plus que lui. Ce sont des amours différents. Mon amoureux et moi, on forme une équipe extraordinaire! Ma fille m'impressionne. Elle fait des phrases complètes. C'est incroyable comme elle apprend vite! Elle a fait un dépistage de l'audition à l'âge d'un mois. Mon chum et moi étions certains qu’elle entendait, mais nous attendions le dépistage pour le confirmer. Quand on nous a dit qu'elle entendait, nous étions bouche bée. Pour mes parents, c'était leur premier bébé entendant dans la famille... Mon frère a deux filles qui sont sourdes, mais elles ont reçu leurs implants cochléaires des deux côtés.
Vous avez perdu un bébé récemment. Êtes-vous remise de cette épreuve?
Honnêtement, je vais super bien. J'ai été bien entourée. On m'a sauvé la vie. J’ai été chanceuse, car à une autre époque, c’est sûr que je serais morte... Je ne savais pas que j’étais enceinte, mais j’ai consulté ma gynécologue pour des saignements anormaux. Elle m’a fait passer des tests et j’ai finalement reçu un appel qui m’annonçait que j'étais enceinte. Comme on essayait d’avoir un autre enfant, ce n’était pas tant imprévu...
De combien de semaines étiez-vous enceinte?
D’environ trois semaines. Je n’en revenais pas! Elle a suggéré que je sois suivie et qu’on fasse des tests pour s'assurer que les hormones de grossesse aient une bonne croissance. C'est comme ça qu’on a constaté que mes hormones n'augmentaient pas suffisamment. On m’a alors fait passer une échographie pour voir s’il y avait quelque chose. Je ne m’en faisais pas, car je me disais que rien n’arrive pour rien dans la vie.
L’échographie a-t-elle révélé quelque chose en particulier?
On a vu que j'avais une masse dans la trompe de Fallope droite. C’était une grossesse ectopique, qu’on appelle aussi grossesse extra-utérine. On m’a donné deux doses de médicaments pour faire fondre la grossesse. Une semaine plus tard, j'ai ressenti de grosses crampes. Mon ventre était gonflé, comme si j'en étais à sept mois de grossesse. Mon chum et moi sommes allés à l’urgence. Quand j’ai passé une échographie, on a découvert que je faisais une hémorragie. On m’a rapidement opérée. Je n’étais pas en mode panique: je faisais vraiment confiance au médecin. On m’a enlevé la trompe droite pour éviter les risques de grossesse ectopique.
Cette opération affecte-t-elle la fertilité?
On m’a dit que même si j'ai une trompe en moins, je suis toujours aussi fertile. Je pensais que j’aurais moins de chances de tomber enceinte, mais ce n’est pas le cas. À cause des médicaments que j’ai pris, il fallait que j’attende trois mois avant d’essayer à nouveau d’avoir un bébé. Je veux un autre enfant. Si ça ne fonctionnait pas, je me dirais que c’est la vie, car j’ai au moins ma petite Adélie, que j’adore. J’ai déjà eu une grossesse normale, alors je garde espoir...