Gagnon était calme, mais n’avait pas pris ses médicaments depuis deux semaines, faute d’argent
La policière qui a surveillé l’accusé en cellule a détaillé au jury l’état de Steeve Gagnon dans les heures suivant le drame du 13 mars 2023

Pierre-Paul Biron
Steeve Gagnon était «calme» et il «comprenait très bien», mais il a expliqué, après avoir été mis sous surveillance policière au poste de la Sûreté du Québec d’Amqui, ne pas avoir pris sa médication depuis deux semaines, «puisqu’il n’avait plus d’argent».
• À lire aussi: Drame d’Amqui: découvrir l’horreur après 5 semaines de coma
• À lire aussi: Attaque au camion-bélier à Amqui: une véritable scène d’horreur qui s’est déroulée sous les yeux de témoins encore troublés
Ces détails sur l’état de Gagnon dans les heures suivant le drame découlent du témoignage de la policière Émilie Ouellet.
Intervenue sur les lieux du drame, l’agente a notamment fait des manœuvres de réanimation sur Gérald Charest avant que les ambulanciers ne lui donnent le «code noir», signe que plus rien ne pouvait être fait pour l’homme de 65 ans.
De retour au poste à 16h15, la policière a été affectée à la surveillance de l’accusé, qui s’était livré lui-même aux autorités quelques instants après la tragédie survenue sur le boulevard Saint-Benoît Ouest.
Les premiers échanges entre Gagnon et l’agente Ouellet sont survenus vers 18h45, au moment de remplir un questionnaire médical. Elle décrit à ce moment le chauffard comme étant alerte.
«Il répond très bien aux questions, il est calme et ses réponses sont claires et précises. On n’a pas besoin de répéter les questions, il comprenait très bien», a déclaré mercredi au jury la policière.
Arrêt de médicaments
Cette dernière a aussi expliqué que Steeve Gagnon n’avait à ce moment aucun problème de santé majeur.
Il a indiqué aux autorités avoir une médication prescrite, mais a ajouté ne pas l’avoir prise depuis un certain temps.
«Il prenait une médication pour son mal de dos, mais ça faisait deux semaines qu’il avait arrêté de les prendre, puisqu’il n’avait plus d’argent étant donné qu’il n’avait plus droit au chômage», a expliqué Émilie Ouellet.
Rappelons que la thèse du ministère public repose sur le fait que Steeve Gagnon avait développé une «hargne importante» envers l’État, le système de santé et les médecins à la suite de ses problèmes de dos.
• À lire aussi: Attaque au camion-bélier d’Amqui: un geste planifié par un individu qui en avait contre le système, selon la théorie de la Couronne
Le procureur au dossier avait indiqué dans son exposé d’ouverture que l’accusé de 40 ans s’était fait couper ses prestations de chômage pour maladie deux semaines avant le drame du 13 mars 2023.
«On va vous faire la démonstration que l’accusé était dans une situation financière précaire», a annoncé d’entrée de jeu Me Jérôme Simard.

«70, 80km/h», selon un témoin
D’autres témoins du drame ont aussi défilé devant le juge Louis Dionne mercredi. Un résident d’Amqui a expliqué que la camionnette l’avait dépassé par la droite «assez vite».
«Il devait rouler 70, 80km/h, je ne pourrais pas dire exactement», a souligné Charles Boulianne, qui a aussi vu l’accusé faire demi-tour dans un stationnement avant de retourner vers les lieux des crimes qui lui sont reprochés.
«Il avait l’air speedé.»

Une autre citoyenne, Line Corbin, a quant à elle été témoin de l’impact qui a tué Gérald Charest. Sa déclaration filmée faite aux enquêteurs de la SQ au lendemain de l’événement a été déposée en preuve, puisque la dame est décédée depuis.
«Il les a fessés et ça a monté dans les airs. Le monsieur c’est comme s’il avait été une feuille de papier», avait-elle raconté, confiant toute sa colère au policier. «J’ai dit: “Le chien sale, il n’a pas arrêté.”»
Le procès de Steeve Gagnon est prévu pour une durée totale de huit semaines au palais de justice de Rimouski. Il est accusé de trois meurtres prémédités et de deux chefs d’accusation de tentatives de meurtre multiples sur un total de neuf autres personnes.
Dans les admissions déposées par les parties en ouverture de procès, l’accusé reconnaît qu’il était au volant de la camionnette Ford qui a happé la douzaine de piétons et qu’aucun bris mécanique ne peut expliquer l’empiétement du camion sur le trottoir du boulevard Saint-Benoît.